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11 recommandations des sénateurs pour une réouverture des établissements scolaires dans de bonnes conditions

La commission de la culture et de l’éducation du Sénat a publié le 23 avril 2020  ses recommandations pour que la réouverture des établissements scolaires fixée au 11 mai 2020 se fasse "dans des conditions sanitaires et pédagogiques satisfaisantes".

Après avoir interrogé des représentants des collectivités territoriales, des recteurs, des chefs d’établissements, des représentants d’enseignants, des fédérations de parents d’élèves et des experts médicaux et scientifiques, le groupe de travail de la commission culture et de l’éducation du Sénat (1) a présenté le 23 avril 2020 ses onze préconisations relatives aux conditions de retour des élèves dans les établissements scolaires à l’issue de la période de confinement.

Deux prérequis : avis scientifique et concertation

Le groupe a d'abord posé deux prérequis, à savoir "l’avis éclairé de la communauté scientifique et la mise en œuvre d’un travail systématique de concertation approfondie au niveau local, les collectivités étant les partenaires essentiels à la bonne marche de l’institution scolaire et périscolaire".  Il définit aussi trois objectifs "visant à garantir la sécurité sanitaire et la continuité pédagogique". Il s'agit de la nécessité de "préparer la reprise des cours en présentiel dans de bonnes conditions" ; de "garantir aux élèves et à l’ensemble de la communauté éducative les conditions sanitaires requises tout en poursuivant la continuité pédagogique" et de "prendre en compte les effets du confinement sur les apprentissages des élèves dans le cadre de la rentrée scolaire 2020". Les onze recommandations sont les suivantes : 

  1. Prévoir une formation à la gestion de la crise sanitaire et aux gestes barrières pour les enseignants et l’ensemble du personnel des établissements d’enseignement
  2. Mettre en place une prérentrée 
  3. Mobiliser tous les acteurs de la santé scolaire
  4. Mettre en place un réseau médical pouvant intervenir de manière préventive et curative dans les établissements d’enseignement
  5. Permettre un suivi pédagogique des élèves ne retournant pas en classe via le Cned et les autres supports (dispositif "nation apprenante", programmes dédiés sur Radio France et France télévisions, …)
  6. Faire preuve de souplesse dans l’obligation de scolarité en présentiel 
  7. Fixer le cadre des activités périscolaires
  8. Établir un état des lieux par territoire du taux de décrochage scolaire
  9. Construire les remises à niveau
  10.  Construire pour la rentrée de septembre une adaptation des programmes 
  11. Organiser à la fin du mois d’août un dispositif de soutien scolaire exceptionnel par son ampleur avec des enseignants volontaires
     

"Absence de concertation avec les collectivités"

Par ailleurs, les sénateurs ont beaucoup critiqué l’effet de "surprise" concernant la décision de rouvrir les écoles le 11 mai et "l’absence de concertation avec les collectivités". Le groupe de travail rapporte "avoir été très surpris d’apprendre que ni l’Association des maires de France, ni l’Assemblée des départements de France ne semblaient avoir officiellement été contactées et associées à cette démarche de concertation". Or, rappelle le groupe de travail, "le rôle des collectivités territoriales est fondamental" en termes de "nettoyage des locaux, transport scolaire, restauration scolaire, accueil périscolaire avant et après la classe, mais également le mercredi, mise à disposition de locaux supplémentaires pour un dédoublement des classes…" . 

15 élèves par classe : une mesure peu réaliste

Parmi les mesures annoncées qui font débat, celle de groupes de 15 élèves maximum par classe est "une hypothèse de travail considérée comme trop élevée et faisant fi des différences de situation entre les établissement", ont considéré de nombreuses personnes auditionnées. Les sénateurs mentionnent la situation de certaines classes dédoublées de CP et de CE1 en zone d’éducation prioritaire, dédoublement "qui s’est fait [...] en réduisant la taille des salles de classe". Ils soulignent par ailleurs que le nombre d'élèves est à mettre en regard de la distance minimale de un à deux mètres prévue entre deux bureaux d’élèves, comme ce qui s'est fait au Luxembourg, Allemagne, Danemark. 

Urgent de définir "qui achète quoi et pour qui" ? 

"Il est désormais urgent de définir clairement qui entre l’État, les collectivités locales voire les parents d’élèves achète quoi : masques, gel hydroalcoolique et pour qui :  personnel de l’éducation nationale, agents des collectivités locales ou intervenants du temps périscolaire, élèves", presse le groupe de travail. Il s’étonne qu’à plusieurs reprises dans ses auditions, il a été mentionné "l’absence de contact entre les agences régionales de santé et les autorités académiques, ainsi que d’un travail de recensement des besoins matériels de protection comme le gel hydroalcoolique, ou les masques…". 
Les sénateurs regrettent par ailleurs "qu'aucune réflexion n’avait commencé sur les temps entourant les moments pédagogiques". Le ministère de l’Education nationale se focalisant sur l’organisation du temps scolaire tandis que localement, "aucun travail ne peut commencer tant que le protocole sanitaire n’a pas été défini, laissant ainsi les élus locaux sans réponse face à leurs questionnements", dénoncent les sénateurs. Le groupe de réflexion émet enfin de sérieux doutes quant à la possibilité de faire revenir en présentiel les enfants des petites et moyennes sections de maternelle, ou alors "en tout petits groupes", "les contacts étant multiples" et "le respect des gestes barrières semblant très difficile". 

(1) Composition du groupe de travail présidé par Jacques Grosperrin (Doubs, LR) : Max Brisson (Pyrénées-Atlantiques, LR), Céline Brulin (Seine-Maritime, CRCE), Nicole Duranton (Eure, LR), Antoine Karam (Guyane, LREM), Laurent Lafon (Val-de-Marne, UC), Jacques-Bernard Magner (Puy-de-Dôme, socialiste et républicain), Colette Mélot (Seine-et-Marne, les indépendants – République et territoires), Marie-Pierre Monier (Drôme, socialiste et républicain) et Jean-Yves Roux (Alpes de Haute-Provence, RDSE)