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Bénéficiaires du RSA : la Seine-Saint-Denis lance sa "nouvelle" politique d’insertion

Le département de la Seine-Saint-Denis annonce la création de nouvelles "agences locales d’insertion" pour faciliter le retour à l’emploi des bénéficiaires du RSA. Une réforme qui va bousculer l’organisation actuelle, dont les résultats sont jugés insuffisants.

Le département de la Seine-Saint-Denis entame la rénovation de sa politique d’insertion. Alors que l’accord de renationalisation du financement du RSA (lire notre article du 21 septembre) conclu avec l’État doit permettre à la collectivité de doubler son budget dédié à l’insertion (33 millions d’euros en 2022 puis 46 millions d’euros en 2023), le président du conseil départemental n’a pas mâché ses mots sur ce chantier d’ampleur : il s’agira non seulement de faire "plus" mais "de faire surtout beaucoup mieux".
"Notre modèle actuel n’est pas satisfaisant, tant en termes d’organisation que de résultats", a averti Stéphane Troussel, à l’occasion d’un webinaire "de lancement" organisé ce lundi 13 décembre, réunissant l’ensemble des acteurs de l’insertion de la Seine-Saint-Denis. 90.000 foyers sont allocataires du RSA en Seine-Saint-Denis, soit 6% de la population du "93". Parmi eux, 44% sont inscrits depuis plus de 5 ans. "Au fil des ans, à la fois la montée en charge de l’allocation et le nombre d’allocataires nous ont empêchés de développer des politiques d’insertion, de les adapter, de les renouveler, de les mettre davantage en lien avec le monde de l’insertion et de l’emploi", a poursuivi Stéphane Troussel.

Taux de sortie en emploi de 7%

Trois catégories de structures sont aujourd’hui en première ligne pour accueillir et orienter les personnes percevant le RSA : les agences Pôle emploi pour les profils les moins éloignés de l’emploi, les services sociaux du département pour les cas les plus complexes, mais aussi et surtout les 34 "projets insertion emploi". Cofinancées par le département et le fonds social européen, ces structures de proximité nées dans les années 90 pour répondre aux besoins d’insertion reçoivent près de 55% des allocataires du RSA de la Seine-Saint-Denis.
Adossées à des CCAS, des communautés d’agglomération ou des communes, elles font aujourd’hui l’objet de critiques. "Il n’y a pas ou quasiment pas d’offre intensive", a souligné la vice-présidente chargée de l’insertion, Mélissa Youssouf. En moyenne, trois rendez-vous par an sont proposés aux allocataires, ce qui est "trop peu pour espérer avoir un impact". Par ailleurs, les services d’insertion entretiennent "très peu de liens" avec le monde du travail. Selon le département, le taux de sortie en emploi à l’issue de ces parcours atteint seulement 7%.
Ainsi, le doublement du nombre de conseillers annoncé – de 170 référents à 340 d’ici 2026 – ne va pas leur bénéficier directement, mais passera par des nouvelles "agences locales d’insertion", dont le périmètre correspondra aux 22 circonscriptions de service social du département. Un appel à manifestation d’intérêt doit paraître d’ici la fin de l’année, auquel les associations de l’économie sociale et solidaire comme les collectivités pourront candidater dans un délai de trois mois. "Si tous les PIE (projet insertion emploi) n'ont pas vocation à se transformer en nouvelle agence, les PIE peuvent bien évidemment répondre", précise le département à Localtis. Le financement de ces structures sera maintenu "pendant au moins deux ans, le temps d’opérer la transition vers la nouvelle forme des agences locales".

Une offre "intégrée" avec les agences locales d’insertion

Le département souhaite que ces agences - dont le nom est provisoire - rassemblent toutes les briques de l’insertion : l’accompagnement social, la définition d’un projet professionnel, la formation, l’accès à des offres d’emploi ou à des contrats d’insertion… "On veut une offre intégrée" qui permette de "se saisir de la plupart des enjeux, soit en y apportant des réponses en interne soit en organisant la réponse avec les partenaires", a souligné Mélissa Youssouf.
Exemple : alors que le département compte 20% de bénéficiaires du RSA d’origine extra-européenne, la collectivité se montrera ouvert à des projets d’agence intégrant des formateurs en français langue étrangère. Autre cas courant : l’insertion butant souvent sur le problème de la garde d’enfants, "on va demander aux agences locales d’insertion de penser la réponse avec les acteurs du territoire", a ajouté Anne-Sophie Casteigt, la directrice emploi, insertion, attractivité du département.
Le lien avec les structures d’insertion par l’activité économique, et plus globalement avec les entreprises, devra être renforcé. Ces agences locales "devront être, beaucoup plus qu’aujourd’hui, tournées vers l’accompagnement vers le travail, la mise en situation professionnelle, vers l’insertion par l’activité, vers l’économie sociale et solidaire", a aussi insisté Stéphane Troussel.

  • Un pilotage insuffisant ?

La nouvelle politique d’insertion de la Seine-Saint-Denis simplifiera-t-elle le "millefeuille" administratif ? Pour Frank Cannarozzo, vice-président de l’établissement public territorial Paris Terres d’Envol, également invité au webinaire, demeure "un vrai problème de coordination". Selon lui, "il n’y a pas de chef de file qui permette de se coordonner, et ce n’est pas à un appel à projets de faire cela", a-t-il estimé. "Dans le cadre d'un nouveau pacte territorial de l'insertion, le département souhaite proposer à l'État et tous les acteurs institutionnels de l'insertion une nouvelle gouvernance", répond le département de la Seine-Saint-Denis à Localtis.  

 

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