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Biodiversité : le sommet One Planet, premier grand rendez-vous de l’année

L’organisation à l'Élysée, ce lundi 11 janvier et en concertation avec les Nations unies et la Banque mondiale, de la quatrième édition du sommet One Planet, une rencontre internationale consacrée à la protection de la biodiversité et à son financement, apparaît comme salvatrice après des reports en cascade, en raison de la pandémie de Covid-19, des grands rendez-vous censés jalonner les négociations internationales sur le climat et la nature. 

"Après une année blanche en matière de sommets internationaux, il s’agit de remobiliser collectivement", explique-t-on à l’Élysée, où se tient ce lundi 11 janvier la quatrième édition du sommet One Planet, organisée en concertation avec les Nations unies et la Banque mondiale. L’événement se tient en amont du Congrès mondial de la nature de l'UICN prévu en septembre prochain à Marseille. Il vise aussi à "créer les conditions d’un accord ambitieux" lors de la quinzième réunion de la Convention de l'ONU sur la biodiversité (COP15), elle aussi reportée et dont la tenue est attendue au second semestre en Chine. 

Primat du climat

Il s’agit également, poursuit-on à l’Élysée, "de renforcer la convergence entre ces deux enjeux - climat et nature - trop souvent considérés séparément". La biodiversité, parent pauvre des négociations internationales ? Alors que seuls une poignée d’experts ont longtemps déploré le primat de la politique climatique sur les autres politiques environnementales, le consensus s'affirme pour donner une plus grande place à cet effort de protection, de convergence entre enjeux climatiques et préservation des écosystèmes, et de renforcement des politiques d'adaptation aux changements. L'Élysée ne cache pas sa critique de certains fonds verticaux, "aux effets désastreux" car appréhendant uniquement les forêts en termes de puits de carbone, négligeant de fait "leur biodiversité, la protection des espèces et les populations indigènes qui y vivent".
L’événement rassemble autour de quatre enjeux - agro-écologie, écosystèmes terrestres et marins, financements et lien entre déforestation, espèces et santé humaine - des chefs d’État et de gouvernement, des leaders d’organisations internationales et des responsables d’entreprises et de la société civile. L’occasion, ajoute l'Élysée, de "relever le niveau d’ambition de la communauté internationale sur la protection de la nature tout en répondant aux nouvelles questions posées par la crise".
Un parterre de personnalités dont la chancelière allemande Angela Merkel, le chef de l'exécutif britannique Boris Johnson et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sont attendus : "Tous prendront un engagement concret lié à l'un des quatre thèmes du sommet." 

Course de haies

Parmi la série d’annonces et d’initiatives présentées, nouvelles pour certaines ou bien visant pour d’autres à renforcer des actions existantes, le point d’étape le plus attendu par les collectivités locales sera l'engagement, côté français et par le président Emmanuel Macron, d’atteindre dès 2022 l’objectif de préservation de 30% des écosystèmes terrestres et marins, "dont 10% sous protection stricte, ce que peu d’autres pays font", précise-t-on dans son entourage. Lors d'un déplacement début 2020, Emmanuel Macron était revenu sur cet engagement qui fait écho à la future stratégie nationale pour la biodiversité, dont la publication est désormais imminente. Autre annonce, la déclinaison opérationnelle d’un programme de création ou recréation de haies et bosquets sur un linéaire total de 7.000 kilomètres. Une action financée à hauteur de 50 millions d’euros dans le cadre du plan de relance. "Les bienfaits et services des haies pour la biodiversité ne sont plus à démontrer", éclaire-t-on à l’Élysée. Cette "petite muraille verte" s’étirera en zone rurale. 

Coalition du pourtour méditerranéen

Rien à voir, donc, avec la Grande Muraille verte (GMV), initiative-phare du continent africain en vue de reboiser le Sahel et d’y enrayer la dégradation des terres. L’ambition du sommet One Planet est d’accélérer la réalisation de cette entreprise pharaonique, à laquelle sont associés une dizaine de pays de la bande sahélienne mais qui prend du retard et s’enlise dans des difficultés de tous ordres depuis son lancement il y a quinze ans. Dix milliards de dollars vont être engagés d'ici à 2025 dans sa réalisation. Afin que ces fonds soient utilisés en toute transparence, un "mini-secrétariat" sera créé auprès du secrétariat de la convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification, en lien avec l'agence panafricaine de la GMV. L'Élysée veut s’assurer "que les promesses faites lors du sommet seront suivies dans la durée". Une nouvelle coalition "pour une mer Méditerranée exemplaire en 2030" sera aussi présentée. "Ses membres fondateurs sont la France, l'Espagne, l'Italie, Monaco, la Tunisie et la Commission européenne. Son plan d'action est très concret et concerne des enjeux tels que la pêche durable, la lutte contre les pollutions marines ou le transport maritime". 

Financements publics et déforestation importée

Au programme enfin, la mobilisation des financements pour la biodiversité. L’Élysée souligne qu’ils sont de plusieurs ordres. Ils proviennent en effet d'investisseurs privés – une alliance menée par le prince Charles devrait annoncer "des montants extrêmement conséquents" – mais aussi publics avec le lancement d’une coalition "pour la convergence des financements en faveur du climat et de la biodiversité, qui vise à s'assurer que 30% de la finance climat publique soit consacrée à des programmes visant des solutions d'adaptation fondées sur la nature". La France prendra ainsi l'engagement, dans le cadre son aide bilatérale, de consacrer 30% de sa finance climat à ces solutions. 
Le lien entre déforestation, espèces, santé humaine sera aussi au cœur du programme avec la présentation d’une initiative internationale de recherche-action baptisée Prezode (Prevention of the emergence of zoonotic diseases), qui fédérera des programmes existants visant à identifier et réduire les facteurs à l'origine des risques d'émergence zoonotiques.
Enfin, ce sommet sera aussi l’occasion de revenir sur l'initiative lancée il y a deux ans, lors du sommet du G7 à Biarritz, de préservation des forêts tropicales et humides. Et de démarrer un programme d'accélération de la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, en mettant en place une plateforme de partage des informations relatives à ces questions. L’enjeu n’ayant de sens qu’à l’échelon européen, le député et président de la commission environnement du Parlement européen, Pascal Canfin, interviendra pour faire le point sur les travaux législatifs attendus sur ce sujet dans l'année.