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Captages d'eau prioritaires : pour l’UFC-Que Choisir, le pilotage des plans d'action est à confier aux communes 

En l’absence d’évaluation, douze ans après le lancement de mesures déployées sur les captages prioritaires dits Grenelle, l’UFC-Que Choisir a réalisé et publié le 28 mars son propre bilan portant sur une centaine de captages répartis dans une vingtaine de départements. Son bilan démontre que la prévention y est efficace, sous certaines conditions. Elle préconise l'extension de ces mesures et un pilotage des plans d’action par les communes desservies par les captages.

Pour élaborer son bilan sur les captages d'eau potable dits Grenelle, publié ce 28 mars, l'UFC-Que Choisir a pris pour échantillon d'étude 102 captages répartis dans 27 départements et qui alimentent en eau des villes de plus de 100.000 habitants (Rennes, Rouen, Douai-Lens), des plus petites (Bourg-en-Bresse, Bourges, Niort, Poitiers, Valence, Vitré) et des villages. Les enquêteurs ont été formés aux enjeux de gestion de l’eau et travaillé à partir d’un questionnaire recensant et qualifiant les mesures de protection de ces captages prioritaires. "Le Grenelle de l’environnement avait redonné un souffle en décidant de concentrer les efforts sur un nombre resserré - un millier en 2013 - de captages prioritaires particulièrement touchés par les pollutions diffuses. Douze ans après, aucun bilan officiel n'en a été dressé et l’opacité règne sur leur mise en oeuvre. Pour mesurer l’impact de ces mesures sur la baisse des pollutions en nitrates ou en pesticides, nous avons pris les devants et réalisé ce bilan grâce à notre réseau d’associations locales", explique l'UFC-Que Choisir. L'association a dû faire face à  "un manque évident de transparence" : 20% des structures  chargées du suivi des mesures de protection (syndicats de l'eau, services départementaux, mairies, chambres d’agriculture, agences de l’eau) ne lui ont pas répondu. 

Intérêt des captages Grenelle : une baisse significative des pollutions 

Sur les 81 captages pour lesquels des réponses ont été rapportées, des mesures précises existent et "les évolutions observées sont favorables puisqu’on observe sur près des deux tiers des captages une baisse des pollutions pour au moins un des deux critères, nitrates ou pesticides". Dans une petite dizaine de captages en revanche, des hausses des niveaux de pollutions sont constatées. De réels plans d’actions n'y ont pas toujours été lancés. "C’est pour les nitrates que les évolutions constatées sont les plus favorables, avec des baisses observées dans près d’un cas sur trois. Des programmes d’action efficaces ont été mis en place, par exemple celui de la commune de Champdôtre en Côte-d’Or : les niveaux de pollution y ont été divisés par deux, mettant les eaux brutes en conformité avec la norme de potabilité. Autre captage vertueux cité, celui desservant la commune de Saint-Maurice-de-Rotherens (Savoie) qui a fait baisser les teneurs en nitrates de 35 mg/l à 2,6 mg/l, "soit une quasi disparition de ces pollutions".

Le pilotage par les communes desservies, facteur clé de réussite

L'association a par ailleurs cherché à déterminer ce qui forge la réussite de certains plans d'action et des mesures qu'ils contiennent. L'un des facteurs clés est le pilotage par les communes desservies par ces captages, plutôt que par les administrations locales ou les structures agricoles : "Quand les communes pilotent elles-mêmes ces plans d’action, les résultats sont globalement meilleurs. On peut supposer qu'elles sont d’autant plus incitées à obtenir une réduction des pollutions qu’elles subissent, puisque leur action permet de réduire non seulement le coût de traitement de l’eau, mais aussi l’impact sanitaire potentiel de ces pollutions sur leurs administrés. A l’inverse, des résultats moins bons sont observés pour les plans d’action pilotés par les chambres d’agriculture". Autre constat, des  baisses de pollutions en nitrates "trois fois plus importantes" lorsque les plans d’action Grenelle intègrent des mesures d’application obligatoires, et non strictement volontaires. 

Et dans les 35.000 autres ?

Reste que ces captages prioritaires concernés par la politique de prévention ne représentent que moins de 3% des 35.000 captages français, "le cas général reste celui des sources sans protection particulière contre les pollutions agricoles". L’UFC-Que Choisir rappelle qu'en cas de dépassement des valeurs autorisées pour l’eau potable, l’exploitant est contraint de prendre des mesures palliatives dont le coût est alors payé par les consommateurs. L'association y voit une façon "d'externaliser les coûts de dépollution" et estime que "cette politique de l’eau prive les agriculteurs d’une incitation majeure à amender leurs pratiques et constitue une négation flagrante du principe pollueur-payeur, puisqu’elle consiste à faire payer par les consommateurs l’essentiel du traitement des pollutions agricoles". Sur la base des résultats encourageants de son enquête sur les captages prioritaires, elle demande que ces mesures de protection contre les pollutions diffuses soient étendues à l’ensemble des captages du pays. Pointant le faible développement de l’agriculture biologique et des surfaces boisées dans ces périmètres de protection des captages, l'association réclame aussi du concret dans ce domaine et souhaite q'un bilan national de la protection des captages soit régulièrement publié.