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Confinement : l’attestation numérique difficile à contrôler par les policiers municipaux ?

Une attestation de déplacement numérique sera en service à compter du 6 avril. Mais les policiers municipaux, habilités à contrôler les passants, ne sont pas outillés.

À compter de lundi 6 avril, les détenteurs de smartphone ou de tablette numérique pourront disposer d’une attestation numérique pour sortir de chez eux pendant la période de confinement. L’attestation sera générée automatiquement à partir d’un formulaire mis en ligne sur le site du ministère de l’Intérieur. Ce dernier précise que, bien sûr, l’attestation papier "reste valide". Cette attestation qui repose sur un QR Code (code crypté en forme de carré blanc et noir) vise à fournir "une nouvelle capacité de production de l’attestation simple et sûre" (évitant la fastidieuse impression ou écriture à la main de l’attestation papier) mais elle est aussi pour les forces de l’ordre un moyen de "sécuriser le contrôle au travers d’une capacité de lecture à distance des informations figurant" sur le code, précise le ministère, dans un communiqué. Sauf que les policiers municipaux, habilités à contrôler les attestations par la loi instaurant l’état d’urgence sanitaire du 23 mars 2020, n’ont pas les moyens de contrôler cette attestation électronique. C’est en tout cas ce que dénonce le Syndicat de défense des policiers municipaux (SDPM). "Les agents de police municipale ne disposent pas de tablette et les appareils de verbalisation électronique ne permettent pas la lecture des QR Code. Enfin, hors de question pour les agents de police municipale d'utiliser leur smartphone personnel, eu égard à la nécessaire protection des données personnelles", s’offusque le syndicat, interpellant directement le ministre sur ce sujet, jeudi 2 avril.

"Pas de traitement de données personnelles"

Le ministère assure cependant que ce "service n'est pas un traitement de données personnelles", que "c’est une traduction fidèle du dispositif déclaratif au format papier : aucune donnée saisie n’est transmise aux serveurs du gouvernement" et que "les données saisies servent uniquement à générer localement, sur l’appareil de l’usager, l’attestation sous forme numérique". "Aux premiers jours du confinement, j’ai refusé les solutions d’attestations numériques qui avaient rapidement vu le jour sur internet, parce qu’elles ne protégeaient pas les données personnelles. Parce qu’elles augmentaient les risques de fraude. (...) Deux semaines plus tard, les enjeux et les principes du confinement semblent être désormais compris et globalement respectés par les Français", justifie le ministre Christophe Castaner, dans le communiqué.
Concrètement, l’utilisateur devra renseigner sur le formulaire (solution préférée à une application mobile) les informations relatives à l’identité, l’adresse, le motif de la sortie, ainsi que la date et l’heure, ce qui générera automatiquement un fichier PDF avec le code (comme pour les billets SNCF). Ce service a été conçu "pour être facilement utilisable par les personnes en situation de handicap, en appliquant les règles définies par le référentiel RGAA (référentiel général d’accessibilité pour les administrations)".

Système D

Mais le SDPM estime que "les policiers municipaux sont toujours oubliés des projets du ministère nous obligeant à nous mobiliser pour réparer ces bévues". Le syndicat Unsa Territoriaux est cependant moins catégorique. "Pour le moment c’est le flou, reconnaît Manuel Herrero, membre de la commission consultative des polices municipales (CCPM), mais on devrait nous envoyer les éléments d’ici ce weekend", espère-t-il. Il considère également comme "logique" et "écologique" l’usage de l’attestation numérique. Pour lui le problème est plus général. Les policiers municipaux disposent bien d’équipements numériques reliés au logiciel Antaï pour dresser leurs PV. Mais depuis qu’ils ont la possibilité de contrôler les attestations de déplacement, la case "piéton" est restée inactive. Les policiers municipaux doivent donc recourir au "système D" et dresser des PV papiers. "On n’a été mis dans la boucle que tardivement, il a fallu qu’on fasse pression sur le ministère de l’Intérieur pour nous englober dans le dispositif", déplore-t-il. Il constate également que la moitié des effectifs de polices municipales sont "en confinement". Les 6.000 ASVP (agents de surveillance de la voie publique) ont été retirés du terrain. Et de nombreux maires ont décidé ne pas exposer leurs policiers.
Pour rappel, les personnes qui sortent de chez elles sans attestation encourent 135 euros et 200 euros en cas de récidive.