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Dans les 19 départements "confinés", un seul cas de Covid dans une classe entraînera sa fermeture

Alors que la pression monte autour des écoles, Jean-Michel Blanquer a annoncé vendredi que dans les 19 départements soumis à des mesures de "freinage renforcé", un seul cas de Covid dans une classe entraînera désormais sa fermeture, contre trois cas auparavant. Durant toute la semaine, de nombreuses voix, y compris du côté des élus locaux, s'étaient élevées pour réclamer la vaccination des enseignants mais aussi des personnels territoriaux. Ainsi que la fermeture des établissements scolaires dans certaines zones. Dimanche, Emmanuel Macron déclarait au JDD que la fermeture complète des écoles "doit demeurer un dernier recours".

 

 

  

Le ministre de l'Éducation, Jean-Michel Blanquer, a annoncé vendredi 26 mars lors d'un point presse que dans les 19 départements soumis aux mesures de "freinage renforcé", un seul cas de Covid dans une classe entraînera désormais sa fermeture, contre trois cas auparavant. "Cela va nécessairement signifier plus de fermetures de classes dans les prochains jours pour ceux qui sont concernés", a-t-il admis, précisant que cela touchera "tous les niveaux scolaires", de la maternelle au lycée. "Nous renforcerons de ce fait les moyens de remplacement" des enseignants, a promis le ministre, reconnaissant "de la tension dans certains territoires". "Les rectorats concernés pourront recruter davantage", a-t-il dit. Les classes fermées le seront pour "une durée de deux à trois semaines" et les parents pourront demander à bénéficier d'arrêts de travail pour garder leurs enfants, a encore indiqué Jean-Michel Blanquer. "Cela suppose de grandes adaptations de la société", a-t-il ajouté. La mesure "prend effet immédiatement". La FAQ du ministère a été mise à jour samedi sur son site.

L'annonce du ministre s'est faite au terme d'une semaine particulière sous la pression des associations d'élus, de territoriaux et des syndicats. La question de la fermeture des écoles devait "être posée" avait ainsi estimé mardi 23 mars le président de l'Association des maires de France (AMF), François Baroin, sur BFMTV. "Je l'ai dit au ministre de la Santé, il y a une question sur les écoles", a-t-il déclaré. "Je peux comprendre qu'on essaie de préserver l'ouverture des écoles" mais pour freiner ce variant britannique, "il faut poser la question des zones où le virus se développe et les écoles en font partie", a-t-il étayé. D'ailleurs, "il y a une semaine, si j'en avais eu la possibilité, j'aurais pris comme maire de Troyes (Aube) la décision d'établir un confinement strict, permettant de mieux protéger la population", a-t-il ajouté. L'Aube est l'un des trois nouveaux départements de forte circulation du virus soumis aux mesures de freinage renforcées. Le maire de Troyes a aussi regretté que les maires aient perdu le pouvoir de décider des fermetures. "On vit sous un cadre dérogatoire au droit commun qui est l'état d'urgence sanitaire. L'État a récupéré les pouvoirs propres au maire et nous n'avons plus le pouvoir d'ouvrir ou de fermer que ce soit un bar ou une école."

Vaccination prioritaire pour les enseignants... et les personnels territoriaux

"L'évolution de la présence du virus dans les écoles inquiète énormément le personnel enseignant", a poursuivi François Baroin, qui demande que la vaccination des enseignants soit prioritaire "si on souhaite maintenir nos écoles ouvertes". Des enseignants... et des personnels territoriaux ? Le communiqué diffusé ce vendredi soir à l'issue de la conférence de presse de Jean-Michel Blanquer peut le laisser supposer : "D'ici la fin du mois d’avril, la vaccination pourra s’engager pour les professeurs et les personnels, avec en priorité les plus vulnérables et les plus exposés au virus."
Dès lundi, l'Association nationale des directeurs et des cadres de l'éducation des villes et des collectivités territoriales (Andev) avait appelé à la priorité vaccinale des enseignants et des agents territoriaux et considéré que "la priorité donnée à l’ouverture des écoles doit s’accompagner des moyens adaptés" (voir notre article du 22 mars). L'Association des maires d'Île-de-France (Amif) faisait le lendemain la même demande : "L’ensemble des membres qui composent les communautés éducatives" doivent être vaccinés "parce qu’ils sont tous en première ligne". Son président, Stéphane Beaudet, a ainsi tenu à rappeler que "les communautés éducatives sont composées d’enseignants mais aussi d’administrateurs, d’animateurs, d’Atsem, de surveillants, d’agents de maintenance, d’agents d’office, de nettoyage…" (voir notre article du 23 mars). Même rappel ce vendredi de la part de Régions de France : "Le Président de la République a annoncé que les enseignants pourront se faire vacciner à partir de la mi-avril, sans mentionner les agents techniques des écoles, collèges et lycées !". Ces agents "doivent eux aussi bénéficier des vaccins en même temps que les enseignants, c'est une question d’égalité des droits de tous", souligne Renaud Muselier.

"Aller à l'école, c'est rester en bonne santé"

Maintenir les écoles ouvertes reste une priorité pour l'exécutif. Le ministère de l'Education nationale a d'ailleurs lancé mercredi 24 mars une campagne de communication étonnante disant : "Aller à l'école, c'est rester en bonne santé" et "c'est continuer à vivre normalement tout en se protégeant". "On se contamine moins à l'école que dans le reste de la société", réaffirmait de même Jean-Michel Blanquer. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, avait lui aussi répété jeudi que les écoles ne seraient fermées qu'en tout dernier recours.

Et ce 28 mars, c'est Emmanuel Macron lui-même qui a déclaré dans un entretien au Journal du dimanche (entretien réalisé vendredi) que "la fermeture complète des écoles ne saurait être un tabou, mais elle doit demeurer un dernier recours et une mesure limitée au maximum dans le temps." "Pour les jours qui viennent, nous allons regarder l'efficacité des mesures de freinage et nous prendrons si nécessaire celles qui s'imposent. Mais à cette heure rien n'est décidé", indique plus globalement le chef de l'État. Un conseil de défense doit se tenir mercredi pour décider d'un éventuel durcissement des mesures.

Les cas positifs au Covid-19 chez les élèves et enseignants se sont multipliés ces dernières semaines. Et les témoignages s'enchaînent pour relater les difficultés grandissantes à faire fonctionner les établissements, personnels enseignants et administratifs étant eux-mêmes touchés par l'épidémie. La situation "est malheureusement critique dans un grand nombre d'établissements primaires ou secondaires, où on dispense une école au rabais depuis des mois", pointe de même Rodrigo Arenas, coprésident de la principale fédération de parents d'élèves, la FCPE. "Avec la vaccination des enseignants, les tests salivaires sont un élément clé pour casser les chaînes de contamination, alors qu'attend le gouvernement ?", s'interroge Stéphane Crochet, secrétaire général du SE-Unsa. Les syndicats demandent aussi l'application de la demi-jauge dans les collèges des 19 départements "reconfinés", comme c'est déjà le cas pour les lycées.

En Seine-Saint-Denis, des élus ont de nouveau tiré la sonnette d'alarme. "Depuis plusieurs semaines et chaque jour davantage, la situation sanitaire dans les écoles (du département) se dégrade. Élèves, enseignants, personnels communaux (...) sont de plus en plus nombreux contaminés par le virus. Ils ne peuvent plus assurer leurs missions", avertissaient samedi cinq maires du département dans Le Parisien. Ainsi par exemple, 22 classes du lycée Eugène-Delacroix à Drancy seront fermées ce lundi, a annoncé dimanche le recteur d'académie de Créteil. Soit environ 500 élèves concernés sur 2.400. Dans ce lycée comme dans d'autres établissements du département, un certain nombre d'enseignants ont d'ailleurs exercé leur droit de retrait.

La nouvelle règle édictée vendredi par Jean-Michel Blanquer pose un certain nombre de questions pratiques. Quelle rétroactivité ? Comment s'entend la notion de "classe" avec le jeu des options et, au lycée, de l'enseignement par spécialité ? Quid de l'organisation de la "continuité pédagogique" ? Et la règle devrait, dans certains territoires, entraîner au fil des jours à venir une multiplication des fermetures de classes... voire d'établissements. En somme, des écoles officiellement ouvertes, mais fermées de fait.