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Élections les 20 et 27 juin : "L'exercice ne sera pas simple"

C'est décidé. Les élections régionales et départementales auront bien lieu en juin. Mais une semaine plus tard que prévu. Jean Castex l'a confirmé ce 13 avril devant l'Assemblée nationale. Et a détaillé les dispositions envisagées pour l'organisation de la campagne puis du déroulement de ce double scrutin. Une circulaire, un décret et un volet législatif viendront les décliner. Un "comité de suivi permanent" va être mis en place et les maires devraient être accompagnés sur la "logistique".

Comme envisagé, Jean Castex s'est prononcé mardi pour le maintien des élections régionales et départementales en juin. Mais aux dates des 20 et 27 juin, soit une semaine plus tard que prévu. Ceci afin de disposer d'"une semaine de vaccination et de préparation en plus". Un décret en ce sens sera présenté en conseil des ministres mercredi prochain. C'est ce qu'il a déclaré ce 13 avril en fin de journée à l'Assemblée nationale, dans une allocution suivie d'une prise de parole de chacun des groupes politiques puis d'un vote. Malgré les réserves, interrogations et critiques, l'issue de ce vote a été sans appel : 443 voix pour le scénario proposé, 73 voix contre et 13 absentions. Outre la plupart des députés LREM, les LR et les socialistes notamment ont voté pour.

Le pourquoi

Le Premier ministre a commencé par rappeler ce qui avait présidé à cette décision. "L'a priori" était bien le maintien des élections en juin, dans la mesure où "il n’est jamais anodin, ni politiquement, ni juridiquement, de décaler les dates d’un scrutin démocratique". Mais il y avait "les difficultés" posées par les recommandations du conseil scientifique, que ce soit pour la campagne ou les opérations de vote de ce double scrutin. Il y a eu aussi, a précisé Jean Castex en intervenant à l'issue des temps de parole des parlementaires, l'arrivée des variants du Covid-19, qui pouvait remettre en question l'hypothèse de départ. Alors "oui, nous nous sommes interrogés", a-t-il reconnu.

D'où les consultations menées auprès des présidents des deux assemblées et des groupes parlementaires, des partis politiques et des présidents d’associations d’élus locaux. Sur les 39 contributions reçues, 25 étaient pour le maintien des dates prévues, "11 n’ont pas pris position tandis que 3 ont indiqué être favorables au report", a rapporté Jean Castex. A suivi la fameuse consultation par mail et SMS menée le weekend dernier via les préfets auprès de tous les maires. "Cette initiative a semblé en surprendre certains. Je trouve précisément surprenant que l’on puisse s’étonner d’une telle consultation, s’agissant d’un enjeu d’organisation qui pèsera fondamentalement sur les maires", a riposté le Premier ministre face aux réactions suscitées par l'opération. Plusieurs députés ont d'ailleurs relevé que celle-ci avait reposé sur les dispositifs d'alerte normalement réservés aux catastrophes naturelles. "Cette consultation n’était dirigée contre personne, et certainement pas contre les associations d’élus pour lesquelles j’ai le plus grand respect, elle est au contraire venue compléter utilement leurs réponses", a poursuivi Jean Castex. Qui a rappelé le résultat de ce sondage grandeur nature : 69% de répondants et, parmi ceux-ci, 56% de maires pour le maintien en juin et 40% pour le report (voir notre article du 12 avril).

Selon lui, "ce résultat montre à lui seul que le sujet est complexe" et le fait "que 40% des maires aient, en leur âme et conscience, recommandé le report nous oblige et nous interpelle". L'enjeu : faire en sorte que les difficultés "soient levées", que les conditions de sécurité sanitaires "soient remplies"… et que "le taux de participation soit le plus élevé possible".

Une campagne "différente"

  • "L'usage des outils de campagne dématérialisés sera encouragé" : le ministère de l'Intérieur réactivera le site créé lors des municipales "permettant aux électeurs de disposer de l’ensemble des professions de foi des candidats aux deux élections" et un débat TV et radio "sera organisé entre les candidats des régionales avant chacun des deux tours", a simplement illustré Jean Castex. Plusieurs députés ont exprimé des mises en garde sur le sujet : "Nous ne serons jamais des candidats zoom", une campagne c'est "aller sur le terrain à la rencontre des électeurs" (Sébastien Jumel, Gauche démocratique et républicaine), "Doit-on parler d'élections virtuelles ?" (Patrick Mignola, Modem), on ne peut miser, surtout dans les territoires mal connectés, sur une "campagne numérique" consistant à "organiser des facebook live" (Olivier Becht, Agir ensemble).
     
  • Les réunions publiques – Si le conseil scientifique a préconisé "l’interdiction des meetings physiques et des réunions publiques, à l’intérieur comme à l’extérieur", le gouvernement prévoit de "réévaluer" les choses, dès que l'on pourra envisager "la reprise progressive de certaines activités et l’ouverture de certains équipements recevant du public".
  • Les déplacements – Alors que prévaut toujours la règle des 10 km, "les déplacements des candidats dans le ressort de la circonscription électorale, ainsi que des militants qui les accompagnent dans leur campagne", seront autorisés "sur la base d’une attestation du candidat ou, à défaut, de son mandataire financier". Gérald Darmanin, intervenu en fin de séance, l'a confirmé.
  • La propagande – "La distribution des tracts dans les boîtes aux lettres, le collage des affiches, le porte-à-porte" vont faire l'objet de règles précises, qui figureront dans une circulaire du ministère de l’Intérieur "d’ici la fin de la semaine".
  • Le dépôts des candidatures – Le ministre de l'Intérieur a précisé que le décalage d'une semaine des dates du scrutin entraînera le même décalage pour toutes les échéances, dont celle du dépôt des candidatures. Le "rétroplanning" déjà en ligne sur le site du ministère va être mis à jour.

Le jour J

Gérald Darmanin a rappelé deux chiffres : 70.000 bureaux de vote (soit "140.000 en double scrutin") et "600.000 personnes qui les tiennent", sans compter les scrutateurs.

  • "Un protocole sanitaire sera mis en place", comme lors des dernières municipales.
     
  • Vote par procuration – Jean Castex et Gérald Darmanin ont rappelé les dispositions de la loi du 22 février autorisant notamment de disposer de deux procurations et la mise en place par le décret du 11 mars dernier de la plateforme MaProcuration.gouv.fr (voir notre article du 8 avril).
  • Les membres des bureaux de vote – Le conseil scientifique ayant recommandé "la vaccination ou, à défaut, le dépistage de l’ensemble des membres des bureaux de vote", Jean Castex a annoncé que "trois semaines avant le premier tour, les communes seront invitées à faire connaître la liste des personnes non vaccinées membres des bureaux de vote et fonctionnaires mobilisés le jour du scrutin afin qu’une vaccination puisse leur être proposée" (de quoi susciter des vocations ?).
    À défaut de vaccin, ces membres devront réaliser un test. À cette fin, l'État "dotera les communes de lots d’autotests".
    Gérald Darmanin a par ailleurs conseillé aux communes de définir les effectifs au minimum trois semaines avant le scrutin afin que l'État puisse, "si besoin, réquisitionner des fonctionnaires".
  • Les horaires – "Les préfets seront invités à étendre les horaires des bureaux de vote, de 8h à 20h, dans toutes les communes où, après échange avec les maires, cela semblera pertinent", a déclaré Jean Castex. Cela passera par des arrêtés préfectoraux, a précisé Gérald Darmanin, ajoutant qu'il ne souhaitait pas d'ouverture au-delà de 20h. Le ministre n'est pas favorable à l'établissement de plages horaires spécifiques pour certains électeurs fragiles mais prévoit que l'on puisse leur accorder la "priorité" en cas de pic d'affluence.
     
  • Les locaux – "Lorsque les deux bureaux de vote relatifs à chaque scrutin sont installés au sein d’une même salle", une "mutualisation des équipements et de certaines fonctions" sera possible. Et s'il n'est pas question de "réformer la carte des bureaux de vote", Gérald Darmanin reprend l'idée du conseil scientifique de pouvoir, sur la base des dispositions de l'article R40 du code électoral (prévues en cas de "force majeure"), prévoir certaines opérations en extérieur. Ou de "l'aération de l'acte de vote", selon ses termes…
     
  • Le dépouillement – Les opérations de dépouillement pourront se faire "soit simultanément mais dans deux salles distinctes ou une salle suffisamment grande" soit "l’une après l’autre, dans une même salle, avec les mêmes personnes". Les membres du bureau de vote et les assesseurs seront autorisés à participer au dépouillement.

D'ici là…

Les préfets et les sous-préfets seront chargés d'accompagner les maires dans la préparation et l’organisation des scrutins.

Au plan national, un "comité de suivi permanent" va être mise en place. Présidé par Jean-Denis Combrexelle, ancien président de la section du contentieux du Conseil d’État et "associant les représentants des partis politiques et les associations d’élus", il sera chargé d'examiner "toutes les questions juridiques et organisationnelles de la campagne et du scrutin". En outre, un préfet "sera désigné pour piloter les sujets à caractère logistique".

Au-delà de l'imminente circulaire et du décret qui sera présenté la semaine prochaine, certaines des dispositions présentées sont d'ordre législatif. Un "chapitre électoral" va donc être intégré au "projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire" (rappelons que la précédente loi du genre, celle du 15 février, ne proroge l'état d'urgence sanitaire que jusqu'au 1er juin) qui sera présenté "dans les toutes prochaines semaines". Gérald Darmanin a d'ailleurs invité les présidents de groupe à soumettre rapidement leurs propositions en vue de ce texte qui devra être soumis au Conseil d'État et à la Commission des comptes de campagne.

Enfin, Jean Castex a fait savoir qu'afin de limiter l'abstention, le gouvernement compte lancer une "grande campagne de sensibilisation au vote" ainsi qu’une "campagne d’information sur les compétences des conseils régionaux et départementaux". Une campagne probablement d'autant plus nécessaire du fait du double scrutin qui représente une première "depuis 1986", tel que l'a rappelé le ministre de l'Intérieur.

La "déclinaison opérationnelle" du schéma proposé par le gouvernement "va supposer des actes juridiques et matériels nombreux et importants à adopter dans des délais très rapprochés". Autrement dit, l'"exercice ne sera pas simple", a reconnu Jean Castex.

 

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