Enerterre : entre Manche et Calvados, "auto-réhabilitation accompagnée" pour rénover les logements des plus modestes (50)

Dans le parc naturel régional des Marais du Cotentin et du Bessin, le dispositif Enerterre permet d'améliorer les conditions de logement des propriétaires les plus modestes vivant dans des maisons de terre crue. Entre 2012 et 2015, 16 logements ont été rénovés avec le concours de 100 bénévoles. Le parc voudrait pérenniser ce dispositif d’auto-réhabilitation accompagnée.

De 2007 à 2011, le parc naturel régional des Marais du Cotentin et du Bessin (150 communes, 74.000 habitants) a animé le volet "énergie"d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat et, à cette occasion, a constaté la difficulté à soutenir les projets des plus modestes. "Nous avons souhaité poursuivre en ciblant en priorité la réhabilitation de maisons de terre crue, un patrimoine local remarquable de notre territoire. Dans cet esprit, nous avons répondu l'appel à projet "éco-habitat"de la fondation de France", indique le chargé de mission précarité énergétique du parc, Laurent Bouyer. Retenu fin 2011, le projet du PNR - dit Enerterre - est fondé sur le principe de "l'auto-réhabilitation accompagnée". Il a été lancé début 2012 et a mobilisé plusieurs partenaires financiers. (Voir en fin de texte).
En 4 ans, Enerterre a permis la réhabilitation de 16 maisons via 27 chantiers qui ont mobilisé 6.000 heures équivalents main-d'œuvre. 80% des projets ont concerné des ménages modestes et très modestes.

Familles bénéficiaires du chantier et auto-constructeurs, encadrés par un artisan

"Pour chaque chantier de réhabilitation, nous mobilisons en moyenne entre 5 et 10 bénévoles pour une durée d'une semaine en général", précise le chargé de mission. Ces bénévoles sont à la fois les membres des familles logeant dans les maisons en cours de réhabilitation et des auto-constructeurs venus chercher une formation de terrain. Le chantier est encadré par un artisan. La famille bénéficiaire finance les matériaux - généralement issus de filières locales (chanvre, paille, terre) - et est indemnisée pour l'encadrement professionnel, partiellement (voir totalement), en fonction de ses ressources selon qu'il est ménage très modeste ou modeste au regard des critères Anah.

Système d'échange local pour équilibrer les contributions de chacun

Afin d'équilibrer les contributions de chacun, le dispositif mobilise un système d'échange local (SEL). Chaque bénéficiaire s'engage sur 35 heures équivalent main-d'œuvre (EMO) en participant à un ou plusieurs chantiers. S'il n'est pas physiquement apte aux travaux, il peut collecter des EMO en préparant les repas pour le groupe, en assurant des déplacements ou en prêtant du matériel.
Pour gérer ce système d'échange, mobiliser les bénévoles et indemniser les bénéficiaires, le PNR a créé une association support au dispositif Enerterre à laquelle chaque bénévole adhère pour un montant de 5 euros.

Améliorer le confort et reconstruire des vies...

Initialement, Enerterre visait surtout la réduction des consommations énergétiques des ménages modestes. "Nous nous sommes rendu compte que les ménages concernés se chauffaient peu, souvent avec du bois-bûche. La précarité énergétique n'était pas toujours le cœur du sujet." Les ménages avaient souvent des attentes en termes de confort : réguler l'hygrométrie ou limiter les effets de parois froides. Plusieurs chantiers ont donc porté sur la lutte contre la dégradation des murs et l'humidité, travaux non pris en charge par des Opah. "Améliorer le confort ressenti permet au bénéficiaire de mieux se sentir dans sa maison et dans sa vie plus largement. Au-delà de l'amélioration du bâti, un chantier Enerterre reconstruit aussi du lien social et constitue souvent un retour à une dynamique positive pour des ménages en difficulté."

Engagement fort des auto-constructeurs et des artisans

Du fait de leurs difficultés sociales, les bénéficiaires s'engagent généralement sur un temps assez limité. "Nous avons donc ouvert les chantiers aux auto-constructeurs du territoire. C'est un coup de pouce à des personnes en dynamique de réhabilitation ; cela apporte aussi une mixité sociale essentielle sur les chantiers et ces bénévoles sont très engagés." Le dispositif bénéficie aussi de la mobilisation forte des artisans qui acceptent désormais de faire jouer leur garantie décennale et dans certain cas à mettre en œuvre des matériaux et des techniques constructives parfois inhabituelles (paille, terre crue...).
Le Greta de Coutances situé en bordure du parc, forme des entrepreneurs en écoconstruction motivés par l'auto-réhabilitation accompagnée. En 2014, le parc a également soutenu la création de la coopérative d'activité et d'emploi (CAE) "Les chantiers de demain". Elle est aujourd'hui un partenaire important d'Enerterre.

Pérenniser une dynamique qui fait ses preuves

Les financements de la phase expérimentale arrivent à échéance fin 2015. "Enerterre apporte une réponse efficace et complémentaire aux aides déjà existantes. Nous travaillons désormais à la pérennisation du dispositif ; l'une des pistes consisterait à s'appuyer sur la création d'une filière de production de matériau terre prêt à l'emploi, et à terme, sur la transformation de l'association Enerterre en Scic", conclut le chargé de mission.
Pour assurer la transition, le parc a sollicité des financements complémentaires 2016-2017 auprès de la fondation de France et via son contrat Leader. A suivre donc.

Montage financier multipartenarial
Le budget total d'Enerterre pour les quatre années d'expérimentation est de 205.000 euros. La fondation de France, principal financeur, participe dans le cadre de l'appel à projets "éco-habitat". Les autres financeurs sont le ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, l'Ademe de la région Normandie et la fondation Macif. Le projet est également intégré au programme Feder et autofinancé par le parc à hauteur de 8,5%. En terme de personnel, le projet a mobilisé l'équivalent d'un temps plein : 20% pour le chargé de mission PCET du parc qui coordonne l'action, 70% pour le chargé de mission précarité énergétique du parc, le complément étant assuré par une assistante.

Claire Lelong pour la rubrique Expériences des sites www.mairieconseils.net et www.localtis.info

Parc naturel régional des Marais du Cotentin et du Bessin

Nombre d'habitants :

74000

Nombre de communes :

150
17, rue de Cantepie
50500 Les Veys

Laurent Huet

Elu de bureau du parc

Laurent Bouyer

Chargé de mission précarité énergétique

Association Enerterre

Manoir de Cantepie
50500 Les Veys

Olivier Landais

Président

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