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Médicosocial - Etablissements et services médicosociaux publics : le contrat n'est pas un contrat

Dans un arrêt du 5 juillet 2017, le Conseil d'Etat apporte des précisions importantes sur la nature juridique de documents comme le "contrat de séjour" ou le "document individuel de prise en charge", désormais systématiquement signés par les établissements et services médicosociaux et les personnes qu'ils prennent en charge. En l'occurrence, l'affaire est partie d'un recours déposé par Mme B... contre le centre communal d'action sociale (CCAS) de Quimper, à la suite d'une chute à son domicile en lien - semble-t-il - avec une intervention d'un service d'aide à domicile du CCAS. La requérante demandait le versement d'une somme de 20.465,77 euros, en réparation du préjudice subi du fait de cette chute.

Une méconnaissance du champ d'application de la loi

Le recours reposait sur le fondement de la responsabilité contractuelle du CCAS, en application du "contrat de prise en charge" signé par son vice-président et par Mme B... Ce recours a été rejeté successivement par le tribunal administratif de Rennes, puis par la cour administrative d'appel (CAA) de Nantes. Mme B... faisait donc appel devant le Conseil d'Etat.
En l'occurrence, le Conseil d'Etat annule l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes et, sans se prononcer sur le fond de l'affaire, renvoie l'affaire devant cette même cour. La raison de cette décision tient à une erreur de droit commise par la CAA de Nantes (et sans doute aussi par le tribunal administratif de Rennes). En effet, pour rejeter le recours de Mme B..., la CAA de Nantes s'est fondée sur la responsabilité contractuelle du CCAS et a donc méconnu le champ d'application de la loi.

Un motif d'ordre public justifiant l'annulation de l'arrêt

Or, dans son arrêt, le Conseil d'Etat rappelle qu'un CCAS a le caractère d'un établissement public administratif communal ou intercommunal, en vertu de l'article L.123-6 du code de l'action sociale et des familles. Dans ces conditions, "les usagers de ce service public ne sauraient être regardés comme placés dans une situation contractuelle vis-à-vis de l'établissement concerné, alors même qu'ils concluent avec celui-ci un 'contrat de séjour' ou qu'est élaboré à leur bénéfice un 'document individuel de prise en charge', dans les conditions fixées par l'article L.311-4 du même code".
De ce fait, "le moyen tiré de ce qu'un litige opposant un tel service public administratif à un de ses usagers ne peut être réglé sur un fondement contractuel est relatif au champ d'application de la loi et est, par suite, d'ordre public". D'où l'annulation de l'arrêt de la CAA de Nantes sans qu'il soit besoin d'examiner l'affaire au fond et le renvoi du contentieux devant cette même cour, pour y être jugé sur un autre fondement (a priori celui de la responsabilité sans faute). Conclusion : les contrats, qui sont pourtant devenus l'alpha et l'oméga dans les relations entre les établissements et services sociaux et médicosociaux publics et les personnes prises en charge, en établissement comme à domicile... ne sont pas des contrats.

Référence : Conseil d'Etat, 7e et 2e chambres réunies, arrêt n°399977 du 5 juillet 2017, Mme B... c/ Centre communal d'action sociale de Quimper.