Archives

Formation et parcours des hauts fonctionnaires, action publique… ce qu'Emmanuel Macron a annoncé

La réforme de la haute fonction publique que le président de la République a dévoilée le 8 avril ne se résume pas à la suppression de l'ENA et la création d'un Institut du service public. Les carrières des hauts fonctionnaires de l'État doivent aussi changer profondément. Évoquant par ailleurs dans un discours fleuve les politiques communes à plusieurs acteurs (État et ses opérateurs, collectivités…), il a appelé à une clarification des responsabilités.

Tout autant admirée que vilipendée, l'École nationale d'administration (ENA) fondée en 1945 pour former les hauts fonctionnaires de l'État va disparaître. Emmanuel Macron a tenu la promesse qu'il avait faite en avril 2019, à l'issue du Grand Débat. "Nous devons aujourd’hui changer radicalement la manière dont on recrute, dont on forme, dont on sélectionne, dont on construit les parcours de nos hauts fonctionnaires", a-t-il déclaré le 8 avril devant les 600 cadres de la haute administration réunis en visioconférence pour la convention managériale de l'État.

Creuset

L'ENA, qui forme quelque 80 élèves chaque année, va laisser place à un Institut du service public (ISP) qui sera "le creuset de la formation des cadres de l'État". L'institution formera l’ensemble des élèves administrateurs de l'État. Ils suivront un tronc commun de formation partagé par treize écoles de service public. "La multiplication des écoles d’administration depuis la création de l’ENA (…) nuit au développement d’une culture commune chez les grands serviteurs de l’État, pourtant appelés à travailler ensemble", avait diagnostiqué Frédéric Thiriez, début 2020, dans son rapport au Premier ministre sur la haute fonction publique. L'avocat avait proposé la création d'un tronc commun de formation initiale de six mois, partagé par les lauréats des concours externes de sept écoles de service public, dont l'Institut national des études territoriales (Inet) qui forme les administrateurs territoriaux. Le président de la République n'a précisé ni les écoles concernées par le tronc commun, ni la durée et le contenu de celui-ci. "L'objectif, a-t-il seulement dit, est, dans ce creuset, de définir une culture commune, une formation commune." En outre, l'ISP regroupera les structures de formation continue des cadres supérieurs de l'État.

La nouvelle école devra être "plus ouverte" aux classes populaires que ne l'a été l'ENA. Il s'agira de "sélectionner des profils moins déterminés socialement". À la sortie, tous les élèves intégreront un corps unique, celui des administrateurs de l'État. Ils n'iront plus directement dans les corps d'inspection et de contrôle. "On ne pourra plus intégrer le Conseil d'État, la Cour des comptes ou les inspections à 25 ans, mais après s'être distingué par des résultats concrets, c'est-à-dire après plusieurs années d'expérience", a souligné le président de la République. En indiquant que "pour leur première année, ils seront tous affectés sur des fonctions opérationnelles, préfectorales, administrations déconcentrées…".

Carrières et rémunérations

Les parcours et les carrières des hauts fonctionnaires "vont radicalement changer", a promis le chef de l'État. Il a aussi souhaité que les rémunérations des hauts fonctionnaires de l'Etat soient plus attractives - "afin d'attirer les meilleurs talents" - et harmonisées entre les ministères.

Une grande partie de la réforme sera comprise dans une ordonnance qui doit être adoptée avant le 7 juin.

Au-delà de la formation et des carrières des hauts fonctionnaires de l'État, Emmanuel Macron a abordé longuement la réforme de l'action publique au sens large, un thème sur lequel il a souhaité une accélération "massive". Celle-ci doit être bâtie sur "plus de proximité", "plus d'efficacité", "plus de simplicité et en même temps d'innovation", a déclaré Emmanuel Macron.

"Emiettement de l'action publique "

Alors que le gouvernement doit présenter prochainement le projet de loi "4D" prévoyant de nouveaux transferts de compétences de l'État aux collectivités, il a estimé que "la question de la décentralisation (…) est bien souvent mal posée". "La question, a-t-il poursuivi, n'est pas en effet de savoir s'il faut décentraliser telle et telle compétence. Ce qui est demandé, c'est une plus grande proximité des services, une plus grande capacité à décider au plus près du terrain." Les décisions prises depuis le début du quinquennat en matière de déconcentration ont nourri cet objectif. "Je souhaite désormais que ça puisse se voir sur le terrain et s'appliquer pleinement", a indiqué Emmanuel Macron.

Appelant à améliorer l'efficacité des politiques publiques, le président de la République a demandé au gouvernement de procéder à "une revue de la cohérence de l'action publique." "Nous avons souvent éclaté l'action publique entre une kyrielle d'opérateurs. Parfois, il faut bien le dire aussi entre certains opérateurs d'État, entre des administrations publiques locales", a-t-il déclaré. En citant les exemples des politiques de l'emploi, de la pauvreté, des inégalités, de l'enfance et du handicap. Pour toutes ces politiques, "la capacité à mener une action publique résolue, rapide, vérifiable est remise en cause par la multiplication des acteurs et au fond, à travers le temps, par des susceptibilités institutionnelles qui ont impuissanté toute la chaîne", a dénoncé le chef de l'État. Ce constat doit amener à "clarifier les responsabilités et donc en quelque sorte remembrer", a-t-il conclu. Cette volonté d'une plus grande "cohérence" de l'action publique conduira-t-elle l'exécutif à décider de nouvelles mesures dans le projet de loi 4D ? Emmanuel Macron n'a pour l'instant dévoilé aucune piste.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis