Archives

Incivilités : le rappel à la loi bientôt remplacé par un "avertissement pénal probatoire"

Jugé trop peu dissuasif, le rappel à la loi, prévu pour répondre à la petite délinquance, sera remplacé à compter du 1er janvier 2023 par un "avertissement pénal probatoire". La mesure sera examinée par les sénateurs dans le cadre du projet de loi de confiance dans l'institution judiciaire, à compter du mardi 27 septembre.

Créé en 1999 en réaction aux incivilités, le rappel à la loi vit ses dernières heures. Il va être remplacé par un "avertissement pénal probatoire" à compter du 1er janvier 2023, a annoncé le garde des Sceaux, lundi 29 septembre, à la veille de l’examen au Sénat du projet de loi de confiance dans l’institution judiciaire. C’est dans le cadre de ce même texte que le gouvernement avait fait voter par les députés, au printemps dernier, un amendement abrogeant le rappel à la loi dans le collimateur de l’exécutif depuis plusieurs mois. Les rappels à la loi "provoquent un sentiment d'impunité tant chez les victimes que chez les auteurs", avait alors argué Dupond-Moretti devant les députés. Il "ridiculise l'autorité de l'État", avait même déclaré le Premier ministre, Jean Castex. Dernièrement, la charge est venue du président de la République lors de son discours de clôture du Beauvau de la sécurité le 14 septembre à Roubaix (Nord). Dans deux circulaires récentes, le garde des Sceaux avait d’ores et déjà donné pour consigne aux parquets de "proscrire" tout rappel à la loi s’agissant des délits commis contre les forces de l’ordre et de lui "préférer le défèrement" s’agissant des atteintes contre les élus.
Restait cependant à lui trouver une alternative. C’est le sens du nouvel amendement gouvernemental que les sénateurs vont examiner dans le cadre du projet de loi, à compter de ce mardi, en vue d’instaurer l’avertissement pénal probatoire. L'amendement vient ainsi compléter l'article 41-1 du code de procédure pénale. Plusieurs différences distinguent l’avertissement du rappel à la loi.

Décharger les forces de l'ordre

Tout d’abord, l’avertissement sera désormais délivré uniquement par la justice - les procureurs de la république ou leurs délégués -, mais plus par les officiers de police judiciaire (OPJ), et ce afin de décharger les forces de l'ordre. En 2019, 272.000 rappels à la loi ont été prononcés, dont environ 183.000 par un OPJ, selon les chiffres du ministère de la Justice. "En deux ans, les crédits de frais de justice ont augmenté de 158 millions, permettant ainsi un recours accru aux délégués du procureur", précise-t-il.
Par ailleurs, la personne devra avoir reconnu sa culpabilité mais ne pourra pas avoir été déjà condamnée. Elle sera placée sous la surveillance de l’autorité judiciaire, puisque, comme le nom l’indique, il s’agit bien d’une "probation" : à la moindre incartade dans un délai d’un an, la personne sera jugée pour les deux délits.
Autre différence de taille : l’avertissement ne sera pas utilisée pour "les délits de violences ou de délits commis contre une personne dépositaire de l’autorité publique ou investie d’un mandat électif public, notamment contre un agent des forces de sécurité intérieure ou des maires et autres élus municipaux", précise l’objet de l’amendement, confirmant les orientations déjà prises par les deux circulaires récentes.

Entrée en vigueur progressive

Qualifiée de "réforme d’ampleur" par l'objet de l'amendement, l’avertissement pénal probatoire "n’entrera en vigueur que progressivement", pour être effectif au 1er janvier 2023, afin de mettre à jour les logiciels et préparer le transfert de charge entre services enquêteurs et autorités judiciaires. Mais dès promulgation de la loi, le rappel à la loi sera abandonné pour les délits contre les dépositaires de l’autorité publique ou les élus. À compter du 1er juin 2022, il ne sera plus non plus possible pour les délits de violences. En 2019, 8.738 rappels à la loi visaient des délits commis contre des personnes dépositaires de l’autorité publique ou investies d’un mandat électif. Et 49.139 rappels à la loi concernaient des cas de délits de violences.
Faisant partie de la batterie d'alternatives aux poursuites pénales, le rappel à la loi ne doit pas être confondu avec le "rappel à l'ordre" qui, lui, est à la disposition du maire pour répondre aux incivilités et autres nuisances du quotidien.

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis