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Justice environnementale : la loi est publiée

La répression des atteintes à l’environnement figure parmi les points majeurs de renforcement de l’architecture juridictionnelle proposé par la loi du 24 décembre 2020 sur le "Parquet européen, la justice environnementale et la justice pénale spécialisée", à travers une palette de mesures allant de la création de pôles régionaux dédiés à ce contentieux jusqu'à l’introduction d'un mécanisme de transaction pénale en matière environnementale.

La loi relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée a été promulguée ce 26 décembre. Consacré (titre I) à la mise en place du nouveau Parquet européen, installé fin septembre 2020, le texte (titre II) améliore par ailleurs la procédure pénale en faveur des juridictions spécialisées, et en particulier dans le domaine de l’environnement, après avoir fait le constat que le contentieux environnemental ne représente que 1% des condamnations pénales. Au moyen tout d’abord de la spécialisation d’un tribunal judiciaire, dans le ressort de chaque cour d’appel, pour connaître des délits prévus par le code de l’environnement et des infractions connexes (article 15), sans interférer avec l’activité spécialisée par matière des Jirs (juridictions interrégionales spécialisées) et des Julis (juridictions du littoral spécialisées). Et sur le même modèle (article 17) pour le contentieux civil (actions relatives au préjudice écologique et actions en responsabilité civile). Le champ de compétence des pôles spécialisés couvrira en outre certaines infractions figurant dans d’autres codes, comme le code forestier, le code minier ou le code rural et de la pêche maritime relatives notamment aux produits pesticides et aux végétaux. 

Conventions judiciaires d'intérêt public 

Autre nouveauté, la loi (article 15) transpose les conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP) en droit pénal de l’environnement, sur le modèle de celles imaginées par la loi Sapin II pour les atteintes à la probité et les fraudes fiscales. Une possibilité limitée jusqu’ici à la transaction pénale prévue à l’article L. 173-12 du code de l’environnement pour des délits punis de moins de deux ans d’emprisonnement, mais qui faisait défaut pour les atteintes à l'environnement les plus graves. Ce nouvel outil à la disposition du parquet permet de proposer, à la condition que l'action publique n'ait pas été mise en mouvement, une alternative aux poursuites - et donc à une procédure judiciaire souvent longue et complexe - pour un champ plus vaste de délits réprimés par le code de l’environnement ou d’infractions connexes (à l’exclusion des crimes et délits contre les personnes du livre II du code pénal). Outre l’amende d’intérêt public au Trésor public proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés dans la limite de 30% du chiffre d'affaires moyen annuel, la convention pourra imposer à la personne morale mise en cause une régularisation de la situation dans le cadre d’un programme de mise en conformité, d’une durée maximale de trois ans, sous le contrôle des services du ministère de l’Environnement, qui pourront également veiller à la réparation effective du préjudice écologique résultant des infractions commises. Lorsque la victime est identifiée, la convention prévoit aussi le montant et les modalités de réparation des préjudices subis dans un délai qui ne peut être supérieur à un an. L'ordonnance de validation par le juge, le montant de l'amende d'intérêt public et la convention sont publiés sur les sites internet des ministères de la Justice et de l'Environnement, ainsi que de la commune sur le territoire de laquelle l'infraction a été commise ou, à défaut, de l’EPCI auquel elle appartient. 

Inspecteurs de l'environnement habilités aux fonctions judiciaires

Le texte acte également la création d’assistants spécialisés en matière d’environnement rattachés aux nouveaux pôles environnementaux. Il propose aussi (article 19) de conférer le statut d’officier de police judiciaire aux inspecteurs de l’Office français de la biodiversité (OFB), ouvrant la possibilité de constituer un service d’enquête en matière environnementale. Le texte met fin à la compétence du tribunal judiciaire de Paris dans les affaires de pollution marine d’une grande complexité. Par ailleurs, l’immobilisation, sous cautionnement, d’un navire ayant rejeté des eaux de ballast nuisibles devient possible (article 24). Le délit réprimant le non-respect d’une obligation de remise en état d’une installation ou d’un ouvrage en droit de l’environnement est précisé (article 22), afin que ce soit l’omission même de cette obligation qui fasse l’objet d’une sanction. Le texte (article 23) permet aussi à la juridiction pénale statuant en matière environnementale d’ajourner pour deux ans sa décision sur la peine (contre une année au maximum en droit commun). Une extension justifiée par le temps nécessaire à l’évaluation des dommages et au calcul des préjudices ainsi que par le primat de l’objectif de restauration du milieu sur celui de la sanction. Enfin, il donne compétence aux juridictions spécialisées du littoral, les Julis, pour connaître de nouvelles infractions commises au large des côtes françaises (article 25). 
Un temps envisagée dans le cadre de ce véhicule législatif, la création de nouvelles infractions, en particulier du délit d'"écocide", et l’aggravation substantielle des peines encourues (lire notre article) devrait finalement intégrer la future loi inspirée des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. 

 
Référence : loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, JO du 26 décembre 2020, texte n° 6.
 

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