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La stratégie d’Orange pour fermer le réseau cuivre soumise à consultation publique

Orange a transmis au régulateur sa stratégie pour arrêter le cuivre d’ici 2030. Le projet, soumis à consultation publique jusqu’au 4 avril 2022, prévoit deux grandes phases et une large association des élus locaux. L’opérateur souhaite par ailleurs un assouplissement du principe de complétude des déploiements, un point qui n’a pas manqué de faire réagir l’Avicca.

Orange, propriétaire du réseau cuivre, a décidé de fermer puis démonter son infrastructure d’ici à 2030. Dans sa décision de décembre 2020, l’Arcep avait dessiné un cadre et des lignes rouges pour un dossier qui impacte l’ensemble des acteurs des télécommunications. En 2021, Orange a mené plusieurs expérimentations et élaboré un plan stratégique transmis à l’autorité fin janvier 2022. L’Arcep lance aujourd’hui deux consultations publiques, l’une sur le plan d’Orange, l’autre sur les tarifs du cuivre.

Deux grandes phases

Le plan d’Orange s’articule autour de deux grandes phases. La première court jusqu’en 2025, date à laquelle le gros des raccordements FttH doit être finalisé selon les objectifs fixés par le plan THD. Cette phase sera dédiée à "la préparation de la fermeture du réseau" avec la mise en place de nouvelles expérimentations pour roder la gouvernance, industrialiser les processus et organiser la migration des clients. C’est entre 2026 et 2030 que le réseau sera à proprement parler fermé commercialement, puis techniquement. Ces deux étapes franchies, le démontage des câbles et installations pourra intervenir, l’opérateur exprimant cependant des réticences sur le retrait des câbles enterrés. En 2030, il n’y aura plus aucun accès cuivre. Le plan d’arrêt du cuivre sera par ailleurs articulé avec celui de RTC, technologie gérant certains services comme les numéros d’urgence ou encore les alarmes. L’arrêt de RTC est avancé à 2023 et reprendra le zonage retenu par Orange sur le cuivre.

Fermeture par lots de communes

Après avoir un temps évoqué des opérations menées à la maille de la zone arrière du nœud de raccordement (NRA), Orange a opté définitivement pour un arrêt programmé par "lots de communes", avec des exceptions pour les grandes agglomérations où il pourra être réalisé par quartiers ou de "découpes administratives existantes". Les lots de communes concernés par la fermeture commerciale ou technique seront arrêtés annuellement avec une montée en charge progressive du nombre de locaux concernés. Sur quels critères seront sélectionnés les communes ? L’opérateur prévoit de prioriser les communes dont le réseau cuivre est "identifié comme particulièrement fragile" ou nécessitant de lourds investissements et celles où la migration du cuivre vers la fibre est largement engagée.

Association des élus locaux

L’opérateur s’engage à associer les élus locaux tout au long du processus, les expérimentations menées ces derniers mois ayant montré l’importance de leur rôle pour réussir la migration. Ainsi le choix des zones sera débattu localement "avec différentes instances regroupant opérateurs et collectivités, en fonction des sujets à traiter". Orange suggère de mobiliser à cette fin les instances départementales sur les réseaux de communication électroniques créées par le gouvernement. Les associations nationales d’élus locaux seront également régulièrement informées de l’avancement des travaux. Des élus, Orange attend notamment un appui sur la communication pour expliquer aux habitants l’enjeu du chantier et inciter les derniers récalcitrants à migrer vers la fibre. Tout en reconnaissant que ce qui s’est passé dans une commune pilote comme Lévis-Saint-Nom - où les élus ont été jusqu’à faire du porte-à-porte – n’est pas reproductible dans une grande commune pour "des raisons de coûts et de faisabilité opérationnelle".

Revoir le principe du 100% raccordé

Par ailleurs, Orange estime nécessaire de revoir les conditions réglementaires nécessaires au déclenchement de la bascule. Pour éviter "une situation de blocage", l’opérateur souhaite "pouvoir fermer commercialement le réseau cuivre dans une commune donnée quand bien même une partie résiduelle des locaux ne seraient pas raccordables au FttH". Orange suggère que les locaux les plus couteux à raccorder soient rendus éligibles au fonds de cohésion numérique pour les équiper en solutions hertziennes alternatives. Une remise en cause du principe de complétude des déploiements FTTH qui n’a pas manqué de faire réagir l’Avicca (voir ci-dessous). Les opérateurs pourraient en effet être tentés de s’engouffrer dans la brèche pour ne pas réaliser les derniers raccordements fibre dans les zones denses…

Baisse des tarifs du dégroupage ?

La fermeture du cuivre implique enfin de revoir le cadre réglementaire du dégroupage (accès des opérateurs concurrents d’Orange aux répartiteurs ADSL). Au de-là des clauses contractuelles qui pourraient ralentir le processus de fermeture du cuivre, c’est le tarif du dégroupage qui doit être remis à plat, objet d’une consultation spécifique de l’Arcep. L’autorité estime que le principe d’une tarification orientée vers les coûts doit être "allégé" tout en restant "progressif et prévisible". Pour mémoire, les concurrents d’Orange souhaiteraient le voir réduit drastiquement quand Orange voudrait l’augmenter pour contribuer au financement du chantier.

Qualité du cuivre et 100% fibre, l’Avicca rappelle ses exigences

Dans un communiqué daté du 8 février, l’Avicca s’est réjouie de la publication du plan cuivre d’Orange. Elle note de nombreux "éléments structurants positifs" comme la place laissée aux collectivités, le phasage, la multiplication des expérimentations et "l’affirmation d’une équité d’intervention entre les différentes plaques des opérateurs d’infrastructure". L’association exprime néanmoins sa vigilance sur des points qu’elle détaillera dans sa réponse à la consultation. Elle insiste ainsi sur la nécessité du maintien "d’une qualité de service jusqu’au bout pour tous ceux, nombreux, qui dépendent encore du réseau cuivre". Elle rappelle aussi la nécessité d’amener la fibre "partout où le cuivre a été déployé" et demande que les exceptions à cette règle "soient limitées et réservées aux zones les moins denses du territoire ou lorsque les particuliers refuseront le déploiement de la fibre". Elle souligne enfin l’imbrication entre ce chantier et celui du service universel des télécommunications.