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Enfance / Famille - La stratégie nationale de soutien à la parentalité est dévoilée

La stratégie nationale de soutien à la parentalité a été présentée et débattue le 30 mai entre services de l'Etat, collectivités, organismes de protection sociale et associations. Avant son lancement officiel par la ministre des Solidarités et les annonces relatives à la prochaine convention d'objectifs et de gestion Etat-Cnaf, la rencontre visait à prolonger la mobilisation issue de la concertation et à stabiliser un peu plus les "termes du débat".

Issue de près d'un an et demi de concertation entre services de l'Etat, collectivités, branche famille et secteur associatif, la stratégie nationale de soutien à la parentalité 2018-2022 a été présentée le 30 mai, lors d'une journée de réflexion et d'échange organisée par la direction générale de la cohésion sociale (ministère des Solidarités et de la Santé).
En s'appuyant notamment sur des données scientifiques (sociologie, pédagogie, sciences cognitives), la concertation s'est attachée à "réinterroger les dispositifs de soutien à la parentalité pour leur donner une plus grande cohérence, une plus grande efficacité", mais aussi "une plus grande visibilité et une plus grande accessibilité", a présenté Jean-Philippe Vinquant, directeur général de la cohésion sociale, en préambule de la journée. "Cette stratégie est une politique de prévention précoce, généraliste, universelle, au carrefour d'autres politiques telles que la lutte contre le décrochage scolaire, la santé, le handicap, la prévention des ruptures, la prévention en matière de protection de l'enfance", a ajouté David Blin, chef du bureau des familles et de la parentalité à la DGCS.
La stratégie nationale doit permettre aux acteurs de se mettre "d'accord sur les mots, sur les termes du débat", elle doit être "un cadre sur lequel vous appuyer pour le dépasser", a-t-il poursuivi. Invités ainsi à voter pour leurs mots préférés parmi cinq propositions, les participants ont plébiscité trois intitulés pour cette nouvelle politique - "Tous parents, tous différents",  "Prendre soin des parents pour prendre soin des enfants", "Dessine-moi un parent" - qui seront soumis à la ministre des Solidarités. Selon la DGCS, Agnès Buzyn devrait s'exprimer prochainement sur la stratégie, après avoir pris connaissance des échanges du 30 mai.  

Huit thématiques et quatre enjeux transversaux, dont le handicap et la précarité

La stratégie est organisée autour de huit axes de travail, dont trois relatifs à des tranches d'âges - l'accompagnement des parents de jeunes enfants, d'enfants âgés de 6 à 11 ans, d'adolescents - et cinq thématiques - le développement de "relais parental" et de "répit en famille", l'amélioration des relations familles-école, l'accompagnement des conflits familiaux, le soutien par les pairs et l'amélioration de l'information des familles. Quatre enjeux transversaux donnent aussi lieu à des pistes de travail : parentalité et égalité entre femmes-hommes, parentalité et précarité, parentalité et handicap, parentalité en outre-mer.
A noter que l'attention portée au handicap des parents ou des enfants dans l'ensemble des aspects de la stratégie a été saluée. Déléguée nationale Croix-Rouge française et membre du Conseil national consultatif des personnes handicapées, Céline Poulet s'est dite attentive à ce que cette ambition se traduise bien dans le déploiement.
Les actions proposées ont souvent trait à la sensibilisation des professionnels, à la formation, à l'amélioration de l'interconnaissance et du partenariat entre les différents intervenants, à la mise en place de parcours d'accompagnement plus intégrés… L'approche interministérielle a permis d'aborder des publics spécifiques tels que les parents détenus et leur famille.

Un volet "parentalité" dans les schémas départementaux des services aux familles 

Dès que la ministre des Solidarités aura officiellement présenté la stratégie, les groupes de travail thématiques s'attacheront à soutenir sa déclinaison. Garants de cette mise en oeuvre au niveau local, les comités départementaux des services aux familles devront élaborer ou enrichir un volet "parentalité" au schéma départemental et assurer le lien avec d'autres instances et stratégies telles que la future stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes ou encore le schéma enfance-famille du département.
"Nos politiques de prévention sont encore trop cloisonnées", a témoigné Sophie Quériaud, directrice Action sociale, famille, insertion du conseil départemental de la Corrèze. Des journées de travail thématiques permettent selon elle la rencontre entre les professionnels du département - aide sociale à l'enfance, protection maternelle et infantile, service social territorial - et également avec d'autres institutions telles que la caisse primaire d'assurance maladie. "Il ne faut pas oublier la place des magistrats dans notre réflexion", a-t-elle interpelé, soulignant que certains magistrats ne possédaient pas une connaissance suffisante des différents dispositifs de prévention.

"Empilage" des structures ou pénurie : problème des villes ou problème des champs

"Il serait souhaitable qu'il y ait au niveau local un coordinateur des actions en faveur de la parentalité", a quant à lui suggéré le pédopsychiatrie Daniel Marcelli, pointant une multiplicité et un "empilage des structures" entraînant à certains endroits une "rivalité".
Si cette question de l'articulation entre de nombreux dispositifs apparaît centrale dans les villes d'une certaine taille, c'est plutôt la pénurie de ressources institutionnelles et associatives qui est source de préoccupation dans d'autres territoires. Un responsable associative engagé dans la lutte contre l'illettrisme demande ainsi l'"équité territoriale", rappelant que "23 millions de Français vivent dans des communes de moins de 3.000 habitants" et sont confrontés à des "problèmes annexes" de mobilité et de garde d'enfants.

Comment prioriser ? L'accompagnement des "transitions" mise en avant

"Comment va-t-on faire pour s'adresser à tous ces parents et sur toutes ces problématiques ?", a interrogé de son côté Bruno Lachesnaie, directeur du développement sanitaire et social de la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole. L'approche se veut en effet volontairement large et sans hiérarchie bien claire, universaliste, même si les professionnels sont invités à avoir une attention particulière pour les publics fragilisés, notamment par le handicap et/ou la précarité sociale. "Si on veut vraiment mobiliser les parents, il va falloir définir notre offre à partir de moments clés (…) et travailler en réseau pour décloisonner les réponses", a tenté de répondre Bruno Lachesnaie.
La prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) entre l'Etat et la Caisse nationale des allocations familiales se concentrera justement sur trois "moments majeurs" que sont la naissance, l'adolescence et la "rupture familiale". Avec l'idée de proposer aux parents "des parcours plus articulés d'offres de services", intégrant les aides des CAF mais aussi les dispositifs portés par les autres acteurs du territoire (travailleurs sociaux, services d'aide à domicile, Reapp…), a détaillé Pauline Domingo, directrice du département Enfance, jeunesse et parentalité à la Cnaf.

Plus de lieux d'accueil parents-enfants et de structures de médiation soutenus dans la prochaine COG

Quels moyens pour investir dans de nouvelles façons de travailler, mais aussi et surtout pour "sécuriser ce qui existe déjà" ? C'est la question qu'a posé notamment Guillemette Leneveu, directrice générale de l'Union nationale des associations familiales (Unaf), appelant notamment à préserver l'accueil en centre de loisirs des 3-6 ans et les services de médiation familiale. Adjointe au maire de Nancy et co-présidente du groupe de travail "petite enfance" de l'Association des maires de France, Elisabeth Laithier a jugé que sans budget adéquat, "toutes les plus belles stratégies" pouvaient rester "lettre morte". "Attention à ce que cette stratégie nationale ne gomme pas toutes les initiatives locales", a ajouté l'élue, en insistant sur la nécessité de co-financements pour ces actions.
"S'il y a priorité, il devra y avoir progrès", a tenté de rassurer Vincent Mazauric, directeur général de la Cnaf, en conclusion de la journée, alors que les annonces relatives à la COG 2018-2022 sont imminentes. "Nous soutiendrons un plus grand nombre de lieux d'accueil parents-enfants, de structures qui s'impliquent dans médiation familiale", a-t-il glissé. Il y a selon lui un "déficit d'équipements mais surtout un déficit de recours", ce qui justifie des efforts pour "améliorer singulièrement" l'accès à l'information. La stratégie devra s'appuyer fortement sur la territorialisation, avec des schémas départementaux des services aux familles "modernisés", mais également sur l'évaluation. La doctrine, enfin, est bien celle d'une "universalité" et d'une "action proportionnée", soit "des services pour tous", mais un "renforcement pour les situations qui signalent la plus grande fragilité".

 

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