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L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi Économie circulaire

L'Assemblée nationale a achevé plus tôt que prévu, dans la nuit du 19 au 20 décembre, l'examen en séance du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Après les passes d'armes de la veille sur la consigne des bouteilles en plastique, les débats sur les autres mesures du texte ont été beaucoup plus sereins. Les députés ont notamment voté contre l'interdiction progressive des microplastiques dans les cosmétiques ou les produits d'entretien, et ils ont entériné la création d'une amende forfaitaire de 1.500 euros pour les dépôts sauvages de déchets.

Clap de fin pour l'examen en séance en première lecture du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Après deux semaines de débats qui se sont déroulés dans le contexte très particulier du mouvement social sur les retraites, les députés ont mis les bouchées doubles pour apporter les dernières retouches à un texte qui compte désormais 130 articles. Alors que trois séances étaient prévues initialement ce vendredi, ils ont voté le projet de loi dans la nuit du 19 au 20 décembre. Le texte a été approuvé par 49 voix - socialistes et LR sont venus apporter leurs voix à la majorité -, face à cinq abstentions des élus communistes et Libertés et Territoires et un vote contre de la France Insoumise.
Députés et sénateurs se pencheront à nouveau sur ce texte en commission mixte paritaire (CMP) à la rentrée, avant une éventuelle nouvelle lecture au palais Bourbon à partir du 21 janvier.

Interdiction progressive des microplastiques

Au cours de la dernière ligne droite d'examen du projet de loi, les députés ont voté jeudi soir en faveur de l'interdiction progressive des microplastiques "intentionnellement ajoutés" dans les cosmétiques, les détergents, les produits d'entretien ou les dispositifs médicaux d'ici à 2027, afin de lutter contre ces particules de moins de cinq millimètres particulièrement polluantes pour les océans ou les cours d'eau.  Ces microplastiques peuvent en effet relarguer leurs additifs dans l'eau ou absorber des polluants, ce qui pose problème quand ils sont ensuite ingérés par des poissons, dont certains sont consommés par les humains.
"Les microplastiques naturels qui n'ont pas été modifiés chimiquement ou biodégradables ne sont pas concernés", précise l'amendement de la rapporteure Stéphanie Kerbarh (LREM). Un décret en Conseil d'État devra préciser cette mesure. "La trajectoire proposée laisse le temps aux industriels de trouver des alternatives", a-t-elle souligné.

Services de repas à domicile : vers la récupération des contenants

D'autres retouches ont été apportées au texte pour restreindre la mise à disposition de produits en plastique à usage unique. La rapporteure a précisé une disposition déjà adoptée, consistant à rendre obligatoire l’accès du public à au moins une fontaine d’eau potable dans les établissements recevant du public, à compter du 1er janvier 2022. "Cette fontaine est raccordée au réseau d’eau potable lorsque l’établissement est raccordé à un réseau d’eau potable. Un décret précise les catégories d’établissements soumis à cette obligation et les modalités d’application", ajoute-t-elle.
"Les dispositions envisagées semblent tout à fait proportionnées pour des établissements pouvant recevoir un public de 300 personnes ou plus (catégories 1 à 3), mais semblent disproportionnées pour les tout petits établissements (catégorie 5 notamment)", a-t-elle expliqué dans son exposé des motifs.
Un autre amendement met en place à compter du 1er janvier 2022 pour les prestations de portage de repas à domicile pour les personnes âgées ou en difficulté un système de récupération des contenants alimentaires pour qu'ils soient réemployés ou recyclés.

Limitation de la consommation d'eau dans les bâtiments neufs

Les députés ont aussi introduit dans le code de la construction et de l'habitat une exigence de limitation de la consommation d'eau potable à prendre en compte dès 2023 dans la réglementation portant sur les performances énergétiques, environnementales et sanitaires des bâtiments neufs. Il pourra s'agir notamment de dispositifs de récupération des eaux de pluie.

L'Ademe, régulateur des filières REP

Contre l’avis du gouvernement, les députés ont en outre décidé de confier à l’Ademe le rôle de régulateur des filières de responsabilité élargie des producteurs (REP). "Les missions de l’Ademe en matière de responsabilité élargie du producteur sont indispensables pour assurer la régulation des filières REP, le suivi de leur activité et l’atteinte des objectifs des éco-organismes, établir des propositions de barèmes de soutiens aux collectivités en fonction des coûts qu’elles supportent pour assurer certaines opérations de gestion des déchets", a justifié Stéphanie Kerbarh dans l'exposé des motifs de son amendement.

Dépôt sauvage de déchets : feu vert à l'amende forfaitaire de 1.500 euros

Autre mesure très attendue : le renforcement de la lutte contre les dépôts sauvages de déchets. Le sujet s'est retrouvé au coeur d'un drame en août dernier, avec le décès du maire de Signes (Var), renversé par une camionnette dont les occupants, qu'il voulait verbaliser, avaient jeté des gravats en bord de route. Selon l'étude d'impact du projet de loi, ces dépôts illégaux de déchets sont en augmentation. À titre d'exemple, les routes de l'Essonne ont vu les tonnages de déchets sauvages multipliés par deux entre 2013 et 2014 et les espaces verts d'Île-de-France ont constaté une augmentation des dépôts sauvages de +30% entre 2014 et 2015. Les députés ont donc entériné la création d'une amende forfaitaire de 1.500 euros pour le dépôt sauvage de déchets, prévue par le projet de loi. La disposition avait été introduite en commission par un amendement de la rapporteure Stéphanie Kerbarh (LREM), contre l'avis du gouvernement. Les députés ont également adopté des mesures permettant la confiscation et la mise en fourrière d'un véhicule utilisé pour commettre l'infraction, ou encore la vidéo-verbalisation de ces infractions.

Dispositions diverses

À noter encore, parmi les ultimes amendements votés, une dispositions visant à favoriser les installations de valorisation énergétique de déchets de bois pour la production de chaleur, la possibilité d'installer une dispositif de contrôle vidéo du déchargement des déchets non dangereux non inertes dans les installations de stockage ou d’incinération pour permettre le contrôle du respect des dispositions du code de l'environnement ou encore  une demande adressée au gouvernement pour la réalisation d'un rapport "visant à expérimenter une généralisation possible en Corse de la redevance spéciale sur les déchets non ménagers".

Trier, réutiliser, recycler : les principales mesures du projet de loi

Objectifs chiffrés
• Le texte inscrit dans la loi l'objectif de 100% de plastique recyclé d'ici au 1er janvier 2025.
• Il vise l'interdiction de mise sur le marché des emballages plastiques à usage unique d'ici 2040.
• Il ambitionne une réduction de 50% d'ici à 2030 du nombre de bouteilles en plastique à usage unique vendues.
Filières REP
• Création de nouvelles filières à responsabilité élargie des producteurs (REP), qui exigent des professionnels qu'ils financent la gestion des déchets liés à leurs produits. A compter de 2022 pour les matériaux de construction (BTP), les jouets, les articles de sports et de loisirs, les articles de bricolage et de jardinage, dès 2021 pour les mégots, et en 2024 pour les lingettes pré-imbibées pour usages corporels et domestiques.
Dépôts sauvages
• Création d'une amende forfaitaire de 1.500 euros pour le dépôt sauvage de déchets.
Chasse au plastique
• Fin du plastique ou des contenants à usage unique pour les repas servis sur place dans les fast-foods, au plus tard le 1er janvier 2023. Fini aussi le plastique pour les jouets offerts avec les menus enfants. 
• Interdiction de tous les produits fabriqués à base de plastique "oxodégradable" qui, en se fragmentant, participe à la pollution des océans.
• Interdiction à compter du 1er janvier 2021 de la distribution gratuite de bouteilles en plastique dans les établissements recevant du public (plus de 300 personnes).
• Interdiction progressive des microplastiques "intentionnellement ajoutés" dans les cosmétiques, les détergents, les produits d'entretien ou les dispositifs médicaux d'ici à 2027, afin de lutter contre ces particules qui polluent les océans.
Information du consommateur
• Indice de "réparabilité" pour les équipements électriques et électroniques, sur le modèle de l'étiquette énergie. Il permettra au consommateur de savoir si le produit est facilement réparable ou non.
• Obligation d'informer sur la disponibilité des pièces détachées nécessaires à la réparation des équipements électriques, électroniques et des biens d'ameublement.
Invendus et réemploi
• Le texte interdit la destruction d'invendus non alimentaires neufs et crée une obligation de réemploi (incluant le don), de réutilisation ou recyclage. Pour les produits de première nécessité, notamment d'hygiène, le recyclage est même interdit et le don obligatoire.
• Création d'un fonds de réemploi à hauteur de 30 millions d'euros destinés aux recycleries, ressourceries et autres structures de l'économie solidaire, voire aux entreprises privées, sous condition.
Développement du vrac
• Le projet de loi favorise la vente en vrac et prévoit que tout consommateur "peut demander à être servi dans un contenant apporté par ses soins, dans la mesure où ce dernier est visiblement propre et adapté à la nature du produit acheté".
Consigne... en pointillé
• Alors que le gouvernement souhaitait mettre en place initialement une consigne pour les bouteilles plastique, il laisse finalement aux collectivités jusqu'en 2023 pour tenter de montrer qu'elles peuvent améliorer la collecte des bouteilles, sans passer par la consigne. Dans le cas contraire, le gouvernement "définira la mise en oeuvre" d'une consigne après concertation. En attendant, des expérimentations sont possibles dans les territoires volontaires.
 Tri
• Le texte veut généraliser la signalétique sur le geste de tri, via le logo "Triman". Avec des règles écrites expliquant clairement dans quelle poubelle l'emballage ou le produit doit être jeté.
• Il vise à harmoniser la couleur des poubelles sur l'ensemble du territoire d'ici le 31 décembre 2022 : jaune pour les plastiques, métaux et tous les autres matériaux ; bleu pour le papier-carton si la collectivité le collecte à part ; vert pour le verre ; marron pour les déchets naturels comme les épluchures et biodéchets ; gris pour les ordures ménagères.
Médicaments à l'unité
• Le projet de loi ouvre la voie à la délivrance de certains médicaments à l'unité dans les pharmacies à partir du 1er janvier 2022, laissant toutefois la liberté aux pharmaciens de le faire ou non. Engagement de campagne d'Emmanuel Macron, cette mesure sera précisée lors de décrets d'application.
Perturbateurs endocriniens
• Les fabricants devront mettre en ligne et en "open data" (exploitable sur le net) des informations sur la présence éventuelle de perturbateurs endocriniens dans leurs produits.
• Contre l'avis du gouvernement, l'Assemblée a voté un amendement LR pour que les fabricants apposent un pictogramme "déconseillé aux femmes enceintes" si leurs produits contiennent des perturbateurs endocriniens présentant des risques.
Tickets de caisse
• Fin de l'impression systématique des tickets de caisse, sauf demande expresse du client. Seront concernées les transactions en dessous de 10 euros à partir du 1er septembre 2020, de 20 euros au 1er janvier 2021, puis en dessous de 30 euros à l'horizon du 1er janvier 2022.
AFP

 

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