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Le Cese relance l'idée de zones de revitalisation commerciale et de taxe sur les entrepôts

Dans un avis adopté le 9 février 2021, le Cese, saisi sur le sujet par le Premier ministre en octobre 2020, avance plusieurs propositions pour faire face aux évolutions subies par le commerce de proximité. Il relance l'idée de zones franches commerciales et de taxes sur les entrepôts.

Aider les collectivités territoriales à lutter contre la vacance commerciale et friches commerciales, développer des outils pour faciliter les restructurations et réhabilitations de locaux commerciaux et artisanaux, valoriser l'approche omnicanale du commerce et de l'artisanat de proximité, renforcer l'équité entre commerce physique et commerce en ligne… Dans un avis adopté le 9 février 2021, le Conseil économique, social et environnemental (Cese), saisi sur le sujet par le Premier ministre le 23 octobre 2020, avance plusieurs préconisations en faveur du commerce de proximité.

Transition numérique, écologique, impact de la crise covid-19… L'avis fait le point sur l'évolution du secteur depuis 2000 et ses mutations en cours. Le Cese cite notamment la fragilisation du commerce de centre-ville et de centre-bourg, l'essor du commerce en périphérie, le développement des réseaux, avec l'essor des galeries marchandes et des franchises, le développement des lotissements commerciaux de périphérie et l'augmentation des taux de vacances. Ces derniers sont passés de 4,8% en 2001 à 11,6% en 2018 dans les centres commerciaux de périphérie, avant même la crise actuelle... En centre-ville, il est passé de 7,2% en 2012 à 11,9% en 2018, justifiant la mise en place de programmes de revitalisation comme Action coeur de ville.

L'avis se penche aussi sur le poids, de plus en plus important du e-commerce, qui s'est fortement développé durant la crise covid : en 2010 le commerce en ligne représentait 3% des ventes totales du commerce. D'après la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad), la progression s'établit à plus de 32% sur la seule année 2020 pour les produits et 27% pour les places de marchés. Un domaine surtout exploité par les acteurs spécialisés que sont Amazon, Cdiscount, de plus en plus par les grandes enseignes, qui combinent vente traditionnelle, retrait en magasin et vente en ligne, mais encore peu par les commerçants indépendants, même si le gouvernement vient de mettre en place des aides incitatives (voir notre article).

Un mécanisme de compensation en contrepartie des autorisations des CDAC

Sur le volet du traitement des vacances et des friches commerciales, le Cese propose de "faciliter l'engagement des collectivités locales", en renforçant les aides financières spécifiques pour les communes de moins de 10.000 habitants qui s'engagent dans des opérations de restructuration/réhabilitation, en lien avec les programmes Petites villes de demain et Action cœur de ville. Il estime aussi qu'il faut faciliter la mise en œuvre du droit de préemption et accélérer le déploiement des infrastructures urbaines qui concourent aux transitions écologiques et numériques du commerce et de l'artisanat (mobilités douces, piétonisation, généralisation des bornes de recharge électrique, stationnement gratuit de courte durée, stationnement pour les livraisons).

Le Cese souhaite aussi agir sur les décisions des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC). Il propose d'introduire obligatoirement les conséquences économiques, sociales et environnementales et les impacts en matière d'emploi et d'aménagement du territoire parmi les critères pris en compte. Il imagine aussi, en contrepartie des autorisations accordées en CDAC, la mise en place d'un mécanisme de compensation financière pour les collectivités quand il existe dans la zone de chalandise du projet d'aménagement des friches/vacances en centre-ville/centre-bourg.

Des zones de revitalisation commerciale

Les rapporteurs relancent l'idée de zones de revitalisation commerciale, à l'échelle des bassins de vie de proximité, sur le modèle des zones franches. Ces zones donneraient des droits spécifiques aux investisseurs privés et publics porteurs de projets de développement de commerce de proximité. Dans ce domaine, le Cese estime qu'il faut promouvoir les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) et les sociétés coopératives d'intérêt collectif (Scic), car elles permettent aux acteurs publics et privés de travailler ensemble sur ces problématiques et ouvrent la possibilité d'une ingénierie collective.

Concernant l'équité concurrentielle entre commerce physique et commerce en ligne, le Cese s'attaque à la fiscalité. Il propose de faire évoluer la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) qui s'applique aux surfaces de vente de plus de 400 m2 avec notamment une taxation spécifique nationale sur les entrepôts qui échappent à cette imposition. La mesure a déjà fait l'objet de plusieurs tentatives parlementaires, notamment à l'initiative des sénateurs Rémy Pointereau (LR) et Martial Bourquin (PS), en vain (voir notre article). Le Cese s'intéresse aussi aux dynamiques "drive" et au retrait en magasin click&collet. La tenue d'Assises de la fiscalité permettrait "sans diminuer les recettes globales, de corriger les déséquilibres fiscaux existants entre commerce physique et numérique notamment par rapport aux Gafa", précise l'avis. Le Cese préconise qu'une part des bénéfices réinvestis dans la transition numérique ou écologique soit exonérée d'impôts sur le revenu et de cotisations sociales pour les entreprises relevant fiscalement du régime des BIC (entreprises individuelles et sociétés de personnes réalisant des bénéfices industriels et commerciaux).

Sur la transition écologique, le Cese propose de mettre en place des zones à faibles émissions (ZFE) pour promouvoir dans le centre-ville des mobilités décarbonées, et de renforcer et généraliser la mise en œuvre du Plan climat air énergie territorial (PCAET).

Enfin, le Cese s'intéresse à la formation des salariés et acteurs indépendants du commerce. Il estime qu'un financement supplémentaire de la formation pour les entreprises de moins de 50 salariés est nécessaire pour inciter les partenaires sociaux à négocier un programme de formation ambitieux. Il préconise d'encourager la création de groupements d'employeurs de centre-ville pour notamment favoriser l'embauche d'un salarié à temps partagé quand c'est possible.