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Mal-Logement - Le HCLPD pose "cinq conditions nécessaires" à la réussite du Logement d'abord

Le Haut conseil pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD) publie un volumineux rapport intitulé "Cinq conditions nécessaires à la mise en œuvre du Logement d'abord". Selon sa présidente, Marie-Arlette Carlotti - ancienne ministre déléguée aux Personnes handicapées et à la Lutte contre l'exclusion dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault -, "le Logement d'abord n'est pas une nouvelle mode, un nouveau process technocratique, mais le retour à l'essence de ce que doit être le droit au logement". Cette publication intervient alors que les ministères des Solidarités, de l'Intérieur et du Logement viennent de mettre en ligne l'instruction interministérielle du 18 octobre 2018 relative à la prévention et la gestion des impacts sanitaires et sociaux liés aux vagues de froid 2018-2019. 

Respecter l'inconditionnalité de l'accueil

Les cinq conditions évoquées par le rapport du HCLPD sont en réalité des têtes de chapitres, qui s'assortissent chacune d'une série de propositions. La première condition est de "disposer d'une connaissance fine et opérationnelle des personnes sans abri et dépourvues de logement". Or les outils actuels, que le rapport passe en revue, sont à la fois "divers et peu fonctionnels". Le HCLPD propose donc de définir la population à étudier grâce à la typologie "Ethos" de catégorisation du sans-abrisme, élaborée par la Fédération européenne des associations nationales travaillant avec les sans-abri (Feantsa). Une meilleure connaissance suppose également d'autres mesures, comme la création d'un observatoire national des personnes sans logement, l'amélioration et la consolidation de la collecte des données ou encore la réalisation annuelle d'un dénombrement dans les 22 métropoles françaises.
La seconde condition évoquée par le rapport consiste à "respecter le principe d'accueil inconditionnel". Pour le HCLPD, cet accueil "est l'occasion de réaliser un diagnostic social afin de repérer les freins d'accès au logement, et de prévoir un accompagnement si nécessaire pour permettre le plus rapidement possible l'accès direct à un logement stable". Deux propositions principales sont avancées à ce titre : la consolidation juridique du principe d'inconditionnalité de l'accueil et la régularisation au cas par cas de la situation des personnes "bloquées" en centres d'hébergement (en clair, les personnes en situation irrégulière ou incomplète au regard des règles de séjour en France).

Pour un "choc de l'offre de logements abordables"

La troisième condition consiste à "opérer un réel choc de l'offre de logements abordables". Sur ce point, le HCLPD considère que "l'augmentation de la construction ne peut suffire à ramener les loyers et les prix à un niveau abordable". A ses yeux, la réponse passe par le retour à l'encadrement des loyers pour limiter les effets d'éviction du parc privé et par le développement d'une offre sociale dans le parc privé (grâce à l'intermédiation locative). Sur ce point, le rapport juge que l'objectif  du gouvernement de création de 40.000 places sur cinq ans "est ambitieux [mais] reste cependant en-deçà des besoins".
Le HCLPD juge également nécessaire de solvabiliser davantage et de garantir les locataires aux revenus modestes, dans le parc public comme dans le parc privé, mais aussi de préserver le modèle français du logement social comme "patrimoine de la Nation". Autres propositions formulées par le rapport : mobiliser l'ensemble du contingent réservataire, adapter le loyer des logements aux locataires entrants, favoriser la transformation des places d'hébergement en logements et, bien sûr, "produire massivement des logements locatifs sociaux et très sociaux sous les plafonds de l'APL dans les secteurs tendus" (avec un minimum de 50% de logements PLAI).

Soutien à l'accompagnement et aux associations

La quatrième condition vise à "faire de l'accompagnement dans le logement l'outil au service du rétablissement de la personne", l'accompagnement étant "à l'heure actuelle soumis à des injonctions contradictoires, voire déterminé par des facteurs qui le détournent de son objectif initial". Le HCLPD propose donc de sensibiliser et de former l'ensemble des acteurs au "Logement d'abord", d'instaurer un référent social unique (sans toutefois préciser qui il devrait être), de mettre en œuvre des plateformes d'accompagnement sur chaque territoire, ou encore de favoriser l'accompagnement par des "travailleurs pairs" (personnes ayant eu la même expérience) et de développer l'accompagnement social communautaire.
Dernière condition évoquée par le HCLPD : "renforcer les capacités d'initiative des associations de lutte contre le mal-logement et leur adaptation aux exigences du logement d'abord". Le rapport juge en effet le réseau de ces associations "en grande difficulté", en raison de la baisse des financements. Sans surprise, le HCLPD propose donc d'assurer un financement pérenne aux acteurs engagés dans une démarche de logement d'abord, de maintenir et développer un tissu associatif divers permettant l'innovation et la singularité des actions, mais aussi de ne pas conditionner l'obtention de subventions à l'arrêt des activités de plaidoyer et d'accès aux droits.