Le plan national de prévention des déchets 2021-2027 enfin publié

La nouvelle édition du plan national de prévention des déchets (PNPD) pour la période 2021-2027 officialisée ce 27 mars, au terme d’un très long processus de gestation, fera-t-elle mieux que la précédente qui s’était avérée assez décevante ? Pas si sûr, analyse Amorce, faute pour ce document de synthèse d’intégrer des mesures d’accompagnement, de suivi, ou de monitoring des objectifs permettant d’en identifier les progrès.

Mis en consultation début janvier, le troisième plan national de la prévention des déchets (PNPD) pour la période 2021-2027 a été officialisé ce 27 mars par le biais d’un arrêté, avant sa présentation à la Commission européenne. Ce plan censé traduire les avancées de la loi Agec et de ses décrets d’application concernant en particulier le rôle des filières à responsabilité élargie du producteur (REP), et plus récemment de la loi Climat et Résilience, accuse au final un retard conséquent de deux ans sur le calendrier prévu.

Il constitue "un document de synthèse et de suivi" décliné en cinq axes et 47 mesures visant à réduire les flux de déchets ménagers et des entreprises. Le parti pris du ministère de la Transition écologique pour cette nouvelle édition est clair : orienter vers la prévention amont (éco-conception, intégration par les REP de la prévention et de la réparation, etc.) et l’éco-consommation (développement du réemploi et des opérateurs de réparation, etc.).

Les axes 1, 2, 3 s’attachent ainsi aux leviers de la prévention que sont l’écoconception des produits et des services et l’allongement de la durée de vie des produits à travers d’une part la réparation, d’autre part le réemploi et la réutilisation.

L’axe 4 cible la réduction de certains usages et pratiques de consommation générateurs de déchets et de gaspillages de ressources. Il comporte plusieurs actions visant à réduire l’usage unique et complète les mesures visant à favoriser le réemploi et la réutilisation de l’axe 3.

L’axe 5 concerne les actions de prévention à engager par les acteurs publics, s’agissant d’exemplarité de l’État, des collectivités territoriales, et d’accompagnement des politiques territoriales en faveur de la réduction des déchets. Chaque mesure est en outre assortie d’un ou plusieurs indicateurs permettant d’assurer le suivi de leur mise en œuvre. 

Des ajouts au fil de l’eau

Une concertation publique organisée, il y a un an et demi (du 31 juillet au 30 octobre 2021) sous l’égide de la Commission nationale du débat public (CNDP), a amorcé le processus de gestation également ponctué par des ateliers participatifs en région.

L’Autorité environnementale (Ae) a de son côté rendu, le 8 septembre dernier, un avis très critique sur l'évaluation environnementale de ce document au stade de projet. La version finale du PNPD y répond en partie, laissant toutefois subsister un certain flou notamment sur sa déclinaison et sa territorialisation. Certes, l'axe 5 valorise désormais les contrats de plan État-région (CPER) comme outils de mise en oeuvre de l’économie circulaire dans les régions. L’articulation du plan avec les autres outils de planification - et notamment les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) et les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) qui leur sont dorénavant intégrés - est aussi évoquée dans un paragraphe au sein de l’introduction. Un autre mentionne de nouveaux outils de suivi (Observatoire du réemploi et de la réutilisation, registre national des producteurs Syderep, etc.). Des précisions y sont de surcroît fournies sur la prévention des déchets dans les territoires d’outre-mer, volet jusqu’ici absent.

Pour faire suite aux contributions reçues dans le cadre de la consultation publique, l’axe 4 intègre un volet dédié aux biodéchets - sujet qui faisait là aussi défaut dans le projet de plan - articulé autour de deux mesures : le déploiement du compostage de proximité des biodéchets et l'accompagnement des collectivités. On relève l'ajout de quelques indicateurs de suivi supplémentaires concernant les imprimés publicitaires (nombre de sanctions appliquées pour non-respect du "Stop pub") ou la réduction de la consommation de bouteilles de boissons en plastique à usage unique mises sur le marché chaque année.  Et une clarification a été apportée concernant la contribution du PNPD à l’atteinte des objectifs de réduction de la pollution plastique des milieux marins. 

Zones d’ombre sur les objectifs et le suivi

Même si le PNPD 2021-2027 s’est largement enrichi des nouveaux dispositifs visant à collecter davantage de données sur l’économie circulaire, "son impact reste difficile à évaluer", estime Amorce qui appelle à organiser un groupe de travail ministériel pour partager les étapes de suivi et d'évaluation du nouveau PNPD.

"Le plan n'explicite pas les moyens mis en œuvre pour chaque mesure et ne donne pas de cibles en termes de calendrier ou de résultats à atteindre", souligne-t-elle. Autrement dit, les bénéfices en termes de réduction des déchets "s'annoncent difficiles à suivre et à mesurer". Le PNPD se résumerait ainsi à un catalogue de mesures pour la plupart reprises de la loi Agec, sans approfondissement pour la compléter ou l’abonder.

"Aucune mesure d’accompagnement, ni de suivi, ou de monitoring des objectifs mentionnés ne sont intégrées, alors que ces compléments sont nécessaires à l’instauration d’une économie circulaire efficace", déplore Amorce. C’est notamment le cas pour les filières et circuits de réemploi des emballages, "dont aucune proposition d’accompagnement des acteurs n’est intégrée, alors que les objectifs de développement de la mise en marché d’emballages réemployables, issus de la loi Agec, sont clairs et nécessitent des moyens".

Sur le fonds dédié au réemploi, il serait nécessaire, selon elle, "d’associer les collectivités dans la mesure où certaines financent des actions de réemploi efficaces sur leur territoire". Une communication nationale autour de la reprise "un pour un" serait là aussi bienvenue pour détourner une partie des gisements de déchets ménagers apportés en déchèteries ou pire abandonnés sur la voie publique (dépôts sauvages). 

 
Référence : arrêté du 2 mars 2023 relatif au plan national de prévention des déchets 2021-2027, JO du 25 mars 2023, texte n° 23.