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Le web des collectivités fête ses (presque) 30 ans

Le World Wide Web a fêté cette semaine ses trente ans, l'occasion de revenir sur une innovation qui a changé nos vies... et transformé profondément le service public. Si les collectivités y sont venues progressivement, le web est désormais l'un des principaux vecteurs de communication avec le citoyen-usager.

 Le 12 mars 1989, Tim Berners-Lee, chercheur au Cern de Genève, inventait un système de gestion décentralisée de l’information qui allait devenir le World Wide Web, marquant le début d’une révolution technologique au moins aussi importante que l’imprimerie. Aujourd’hui, plus de la moitié des Français n’imaginent plus pouvoir vivre sans internet, devenu un moyen essentiel pour s’informer et faciliter les échanges pour les deux tiers d’entre eux comme le révèle un sondage commandé par Cisco à l’occasion de cet anniversaire.

De la plaquette à la plateforme de services

Partie de quelques pionniers, dans un pays qui était alors dominé par le minitel, le web allait rapidement séduire les collectivités locales françaises pour devenir leur principal moyen de communication. Dans les années 90, le site de la collectivité est généralement géré par le service communication, internet étant perçu comme un moyen de promouvoir le territoire à l’échelle nationale voire mondiale. Le nombre d’internautes croissant, le public local s’élargissant, les "sites plaquettes" sont progressivement remplacés dans les années 2000 par des sites centrés sur le service à l'usager. L’heure est au développement des "téléprocédures" administratives et la dématérialisation connaît ses premiers développements. Le site internet devient celui de la collectivité dans son ensemble, les logiciels de gestion de contenu permettant aux agents des services de contribuer à sa mise à jour. Progressivement, le site internet se transforme en guichet, impliquant une réorganisation des services pour répondre aux mails et sollicitations des usagers. La gestion d’un site internet est cependant loin d’être un long fleuve tranquille tant les innovations technologiques se succèdent à un rythme soutenu depuis 30 ans.

L'arrivée de Google puis du smartphone

La première est liée au développement fulgurant des moteurs de recherche, où les requêtes sont écrites en langage naturel, qui viennent remplacer les annuaires de site tels que Yahoo ou Wanadoo. Rapidement Google (créé en 1998) s’impose face aux Altavista et autres Lycos : désormais il ne s’agit plus de créer un site internet mais de faire en sorte qu’il soit bien référencé pour que l’usager trouve le site de la collectivité (ce qui est simple) et soit "bien positionné " dans des requêtes plus complexes ou concurrentielles comme sur les questions d’attractivité économique ou touristique. La seconde découle de l’arrivée des smartphones à partir de juin 2007, date de sortie du premier IPhone d’Apple. Désormais, le smartphone équipe 75% des Français, ce taux montant jusqu’à plus de 98% pour les jeunes ados (Source Credoc/Arcep). Les smartphones génèrent la majorité du trafic internet et sont devenus en moins de 10 ans la principale interface d’accès aux sites et services numériques. Une évolution des pratiques qui impose aux collectivités de proposer des sites et services en "responsive design" c’est-à-dire compatible avec un affichage sur tous les écrans. Mais le mobile impacte aussi les services : l’usager, désormais géolocalisé, est en attente d’informations personnalisées et contextualisées (ici, maintenant).

Réseaux sociaux et nouveaux métiers

La troisième vague d'innovation est liée à l’adoption massive des réseaux sociaux : Facebook, Twitter, Instagram, YouTube, Snapchat ou encore LinkedIn. Créé en 2004, Facebook lance sa version francophone en 2008. Le réseau connaît alors une croissance phénoménale pour atteindre 33 millions d’utilisateurs français en 2018 (2,1 milliards dans le monde). Face à des internautes qui pour certains ne fréquentent plus le web mais exclusivement les réseaux sociaux, les collectivités doivent là encore s’adapter. Elles sont aujourd'hui selon l’Observatoire social media des territoires, 3.918 collectivités locales à être présente sur les médias sociaux, Facebook arrivant très loin en tête (92% du total) .Ces ruptures technologiques successives ont conduit les services communication à devoir s'adapter. Si le magazine papier – dont on avait un peu tôt annoncé la disparition – se maintient (voir notre article), les métiers se sont diversifiés au sein des services communication des collectivités. De nouveaux profils sont apparus tels que le " webmestre", le"community mangers " ou encore le responsable de la stratégie digitale chargé de veiller sur la "e-réputation" de la collectivité.
Avec le web est également né le concept de fracture numérique. 30 ans après son invention, internet est totalement intégré par la génération avec qui le réseau est né mais force est de constater que tout le monde ne peut y accéder. Si l'amplitude de la fracture a réduit avec le temps sous l'impulsion de la diminution des prix des matériels, des coûts de connexion et de l'amélioration des interfaces, elle est toujours bien présente et touche environ 20% des Français Une fracture qui a pris ces dernières années une dimension dramatique et excluante (voir notre article), certains services essentiels n'existant plus que dans leur version numérique. L'éradiquer sera sans aucun doute le grand défi des années à venir.

Redonner le pouvoir à l'utilisateur

Toute la force d'internet a été de reposer sur des technologies ouvertes, accessibles à tous, capables d'interconnecter tout type de machines partout dans le monde. Une approche qui est aujourd'hui menacée par la création "d'îlots" propriétaires - Facebook, Google, Amazon, Microsoft… - qui captent l'essentiel du trafic, imposent leurs standards et dont le modèle économique repose sur l'exploitation des données personnelles. À l'occasion des 30 ans du web, Tim Berners-Lee a insisté sur la nécessité de redonner le pouvoir à l'utilisateur. "La philosophie de la Fondation pour le web est que vous devez avoir un contrôle complet de vos données. Ce n’est pas du pétrole, ce n’est pas une matière première, ce n’est pas une substance", a déclaré le chercheur dans un entretien avec des journalistes rencontrés au Cern. Il a appelé à "séparer les applications du stockage des données de manière à ce que les usagers puissent décider où et comment ils pourraient partager leurs informations personnelles". 

 

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