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Les drones pour lutter contre les rodéos motorisés ?

La mission parlementaire sur l'impact de la loi de 2018 sur les rodéos motorisés a présenté son rapport le 8 septembre. Elle formule 18 propositions pour renforcer l'arsenal actuel.

Après un été meurtrier (Amiens, Toulouse), les députés Natalia Pouzyreff (LREM, Yvelines) et Robin Reda (LR, Essonne) ont présenté, mercredi 8 septembre, leur rapport sur l’impact de la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les "rodéos motorisés". Une pratique qui revient chaque été avec les beaux jours depuis plusieurs années et empoisonne la vie des riverains.

En créant de nouveaux délits (participation à un rodéo motorisé, incitation, organisation, promotion de cette pratique), cette loi s’est avérée "utile" en donnant aux forces de l’ordre et aux parquets "les moyens de poursuivre et de sanctionner lourdement les délinquants". Mais elle n’est toujours pas parvenue à enrayer le phénomène, comme en témoignent les nombreux faits divers de l’été. Les rapporteurs formulent 18 recommandations pour compléter cet arsenal. Ils préconisent tout particulièrement d’autoriser, à titre expérimental, "le recours aux drones comme alternative à la poursuite des véhicules par les forces de l’ordre et moyen de preuve utile à la qualification du délit". "Les images filmées depuis le ciel permettraient aux forces de l’ordre de suivre les deux-roues et leur conducteur jusqu’à l’arrêt du véhicule, ce qui favoriserait alors une interpellation en limitant considérablement les risques liés à la poursuite du véhicule au sol, tout en représentant un moyen de preuve utile au succès des enquêtes judiciaires", développement-ils. Une solution qui, selon eux, serait "plébiscitée" par plusieurs élus, comme à Rillieux-la-Pape et dans le 2e arrondissement de Lyon. D’autant que les forces de l’ordre ont souvent pour instruction de ne pas poursuivre les délinquants (une instruction de commandement du directeur central de la sécurité publique datant d’août 2020 limite en effet les poursuites de véhicules aux "cas graves"). L’examen prochain du projet de loi relatif à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, qui comporte plusieurs dispositions sur les drones (voir notre article du 20 juillet 2021), pourrait être le moyen d’introduire cette disposition. Mais l’évolution législative doit se doubler d’une "évolution technologique", estiment les députés, les caméras actuelles n’ayant pas suffisamment d’autonomie.

Mieux former les policiers municipaux

La mission préconise aussi de laisser plus de marge de manoeuvre aux policiers ou gendarmes quant à la nécessité d’intercepter les contrevenants. Elle propose d’étudier la possibilité pour des policiers ou gendarmes spécialement formés d’appliquer la méthode dite de "contact tactique" mise en place par la police britannique, dans les cas les plus graves, méthode consistant à faire tomber sans le blesser le pilote du scooter…

Un autre aspect soulevé par le rapport est la frilosité de certains magistrats à caractériser l’infraction. Une difficulté qui peut être renforcée par le "caractère lacunaire de certains procès-verbaux", notamment ceux dressés par les policiers municipaux. Le rapport invite donc à renforcer la formation des policiers municipaux en matière de collecte d’éléments de preuve et de respect des procédures. Il recommande aussi aux collectivités d’étoffer leur parc de caméras de vidéosurveillance. L’accès direct des policiers municipaux au Dicem (le fichier de déclaration des véhicules non homologués de type quads, mini-motos, etc.), leur permettra "d’apporter une aide aux forces de l’ordre étatiques dans l’identification des engins motorisés volés et déplaqué". Une nouvelle version doit entrer en vigueur à la fin de l’année.

Cellules anti-rodéos

Le rapport, qui fourmille d’initiatives locales, préconise de généraliser les cellules anti-rodéos saisonnières dans les villes les plus touchées par le phénomène. Ces cellules seraient placées l’égide des directions départementales de la sécurité civile, avec du personnel spécialement formé. De telles cellules ont pu être mises en place avec succès au Havre (54 véhicules saisis en 2020) ou dans le Rhône, à Lyon, Vénissieux, Bron, Vaulx-en-Velin et Villeurbanne. À Compiègne, la municipalité a mis en place un autre dispositif baptisé "Stop Rodéos" qui permet aux habitants de "transmettre à la police municipale, par le biais d’une adresse e-mail, des renseignements pratiques, des heures de passage des véhicules et des numéros de plaque d’immatriculation de véhicules ayant causé ou permis la commission de rodéos".

Autre constat : la confiscation et la destruction des véhicules permise par la loi n’est pas suffisamment utilisée. Or il s’agit pour la mission de "la mesure la plus efficace" de la loi de 2018. Le principal frein est le coût de gardiennage et de mise en fourrière. La mission se félicite à cet égard de l’expérimentation en cours dans quelques grandes villes reposant sur un gardiennage gratuit (voir notre article du 16 juin 2021), tout en regrettant "que la charge relative à la mise en fourrière incombe in fine aux collectivités". En outre, elle ne permettra de résoudre le problème qu’à l’échelle des collectivités dotées de fourrières municipales, "laissant de côté les collectivités plus petites" qui n’en comptent pas sur leur territoire. Les parlementaires se félicitent des nouvelles dispositions du projet de loi relatif à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure ramenant notamment de 15 à 7 jours le délai à partir duquel les véhicules placés en fourrières seront réputés abandonnés et pourront donc être détruits.

Ils préconisent enfin de généraliser le recours aux peines de travaux d’intérêt général, notamment dans les services de rééducation fonctionnelle hospitaliers.

 

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