Les histoires sacrées d'une Sem culturelle atypique

Le 31 mai dernier s'achevait le 17e Festival international de musique baroque de Sarrebourg. L'événement culturel de la ville était conduit pour la première fois par la Sem Le Couvent, née de deux assocations et devenue en un an une entreprise culturelle à vocation internationale.

Dès le mois de septembre, la ville de Sarrebourg (57), dans le cadre de la Sem Le Couvent dont elle est l'actionnaire majoritaire, commencera les travaux de rénovation et de réhabilitation des bâtiments du couvent Saint-Ulrich, situé à quelques kilomètres de Sarrebourg. Le coût total de ces travaux, prévus jusqu'en 2005, se monte à près d'un million d'euros. Il est supporté par la ville de Sarrebourg et le conseil général de la Moselle, avec le soutien de fonds européens. Ces mêmes travaux n'auraient pas pu se faire, dans les mêmes conditions, il y a encore un an, dans le cadre d'une simple association et avec les traditionnelles subventions octroyées chaque années par la ville de Sarrebourg. La Sem Le Couvent a permis entre-temps de regrouper l'ensemble des activités menées autrefois par deux associations et une SARL. Elle est devenue en un an une véritable entreprise culturelle (1,5 million d'euros de CA annuel) qui mène des actions aussi bien au niveau régional, national qu'international : formation de jeunes chercheurs, sensibilisation à la musique baroque, échanges culturels avec l'Amérique latine, centre de documentaiton pour les centres polyphoniques français... Son capital lui permet aujourd'hui de poursuivre sereinement son développement puisque les actionnaires publics et privés se retrouvent désormais autour d'une même table. Une longue réflexion a permis la mise en place de cette Sem, devenue, avec le temps, nécessaire et indispensable.

A l'origine, trois structures devenues depuis ingérables

En 1987, Alain Pacquier, aujourd'hui directeur de la Sem Le Couvent, a carte blanche et une enveloppe de 220.000 francs pour créer un festival à Sarrebourg. A l'occasion d'un voyage en Amérique latine, il ramène dans ses bagages un patrimoine culturel et musical qu'il entend faire connaître à travers le Festival de musique baroque de Sarrebourg, association de loi 1908. Se crée parallèlement une SARL baptisée K617 dont la double vocation consiste à gérer un catalogue discographique de musique baroque et à mener des programmes de coopération culturelle en Amérique latine. "Nous étions alors bien loin de l'activité commerciale qui représente le but premier d'une SARL", se souvient Lionel Lissot, à l'origine de cette structure privée avec Alain Pacquier. D'où l'idée de monter une seconde association, le Centre international des chemins du baroque (CICB) pour gérer ces programmes de coopération. "Nous avions donc deux associations et une structure privée fonctionnant avec les mêmes personnes. Cette usine à gaz a tourné pendant trois ans jusqu'au moment où le ministère des Affaires étrangères a demandé un audit pour déceler d'éventuelles interactions financières entre les trois structures", poursuit Lionel Lissot. Si tout était clair dans les tableaux comptables, s'est posée la question de la pérennité des structures, devenues ingérables. Après l'hypothèse de tout abandonner, les initiateurs du Festival ont commencé à réfléchir à la création d'une structure juridique unique.

Conjuguer missions publiques et commerciales

Début 2002, à la demande du conseil général et de la ville de Sarrebourg, le cabinet Fidal de Besançon mène pendant un an une étude juridique et financière selon un cahier des charges très précis : trouver les moyens de réunir l'ensemble des activités des deux associations et de la SARL au sein d'une structure. "La Sem présentait l'avantage de pouvoir mener à la fois des missions publiques, parapubliques et commerciales sans oublier la possibilité de recevoir des financements publics", explique Lionel Lissot, aujourd'hui directeur administratif et financier de la Sem Le Couvent, créée le 10 janvier 2003. Dès cette date, un montage juridique complexe se met en place : la première association, le Festival de musique baroque de Sarrebourg, est dissoute et la SARL K617 devient filiale à 100% de la Sem Le Couvent par échange de parts des actionnaires. L'ensemble du patrimoine du CICB (bâtiments, instruments de musique, matériels) est par ailleurs cédé par dévolution universelle à la ville de Sarrebourg qui en devient propriétaire le 30 juin 2003. Dès le 1er juillet, la collectivité, dans le cadre d'un contrat d'affermage, délègue à la Sem Le Couvent ce même patrimoine acquis la veille. Depuis cette date, la Sem verse donc à la ville un droit d'exploitation, sous la forme d'un loyer de 10.000 euros par an, avec obligation de remplacement et réparation du matériel (matériel d'entretien et de fonctionnement, instruments de musique) et du maintien en état du couvent Saint-Ulrich.


Sandra Heiss / Innovapresse Metz pour Localtis


 "La Sem constitue un outil beaucoup plus souple que l'association"


 

Alain Marty, député-maire de Sarrebourg, est président de la Sem Le Couvent.

Quels intérêts la ville de Sarrebourg trouve-t-elle à faire partie d'une Sem culturelle comme celle du Couvent ?

Le statut de la Sem permet une implication légale de la collectivité qui non seulement a un contrôle sur les subventions mais s'implique également dans les actions à mener. La ville, propriétaire du couvent, peut également se féliciter de voir son patrimoine entretenu et valorisé. La Sem n'est pas une meilleure vitrine pour la ville, mais elle permet à un élu de s'y impliquer davantage et d'être plus responsable.

Quelles sont les politiques d'actions de la ville à travers cette Sem ?

Cette Sem n'est pas une fin en soi mais la conséquence d'un long cheminement associant plusieurs partenaires dont la ville et le conseil général. La structure permet d'associer à la fois des missions de service public et des actions commerciales. La Sem mène ainsi des activités culturelles hors du territoire, des missions de coopération à l'étranger, assure l'accueil de groupes au sein du couvent... Elle constitue de ce fait un outil beaucoup plus souple que l'association.

Ce statut juridique n'est-il pas trop complexe à gérer et est-il bien accepté par les conseillers ?

Le conseil municipal, dans sa majorité, a parfaitement accepté la création de cette Sem, notamment grâce à une présentation simple et limpide du cabinet de Besançon. La Sem constitue un outil remarquable, mais malheureusement pas suffisamment exploité dans le domaine culturel.

 

Quelques chiffres sur la Sem Le Couvent


Montant du capital : 260.000 euros

 

Actionnaires:
Ville de Sarrebourg : 27 %
Conseil général de la Moselle : 24 %
Caisse d'épargne de Lorraine : 15 %
Quatre personnes privées dont Lionel Lissot et Laurent Blaise : 34 %

Chiffre d'affaires : 1,5 million d'euros

Contrat d'affermage : 10.000 euros par an (la Sem est locataire du couvent dont la ville est propriétaire)


 

 La Sem pourrait se doter d'une structure communication


La SARL le Club des chemins du baroque, créée en 1995, appartient à 80% à K617 et à 20% à des particuliers, soit une trentaine d'actionnaires. La structure se charge d'informer ses 1.200 adhérents du monde entier des activités de la Sem Le Couvent à travers sa revue trimestrielle, Le Codex. "L'idée est d'intégrer la SARL à la Sem par fusion-absorption", indique Laurent Blaise, gérant du Club chargé du suivi de la production et de la fabrication des CD, et l'un des six salariés de la Sem. Pour avoir sa propre branche communication, la Sem Le Couvent devra racheter les parts des 30 actionnaires de la SARL. La procédure pourra être envisagée après un premier bilan de fonctionnement de la Sem.

SEM - Couvent de Saint Ulrich

Haut-Clocher
57400 Sarrebourg

Lionel Lissot

Directeur administratif et financier

Alain Paquier

Directeur de la Sem Le Couvent

Laurent Blaise

Gérant du Club des chemins du baroque

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