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Levée de bouclier des élus contre la proposition du Medef de remplacer le versement mobilité par une" indemnité essence ou véhicule"

Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a proposé ce 25 janvier de remplacer le versement mobilité par une indemnité pour aider les salariés à faire le plein, au grand dam des associations d'élus qui estiment qu'une telle mesure "mettrait les transports publics à l’arrêt" et "contredirait totalement les objectifs écologiques" en entraînant la "congestion totale" des villes.

Interrogé ce 25 janvier sur France 2 sur la hausse des prix de l'énergie, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a proposé de remplacer le versement mobilité, payé par les entreprises d'au moins 11 personnes pour financer les transports en commun, "par une indemnité essence ou véhicule".  "Cela ferait environ 300 euros par salarié et par an", a soutenu le patron des patrons.

45% des transports en commun en France financés par le versement mobilité

Cette suggestion pour le moins iconoclaste, dans le contexte de lutte contre le réchauffement climatique, n'a pas manqué de faire bondir les associations d'élus. "Remplacer les transports publics par un chèque permettant de faire le plein d'essence est une proposition qui mettrait les transports publics à l'arrêt, entraînerait la congestion totale de nos villes et contredirait totalement les objectifs écologiques", ont protesté France urbaine, Intercommunalités de France et le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) dans un communiqué commun.
Les élus rappellent que le versement mobilité finance en temps normal 45% des transports en commun en France en complément des concours publics et des recettes des usagers. "Collectivités et autorités organisatrices de la mobilité utilisent leurs capacités de financement pour des mobilités collectives peu polluantes, d’intérêt général et qui bénéficient directement aux salariés", soulignent-ils. "Sans nier la nécessité d’accompagner les citoyens face à la hausse des prix du carburant", France urbaine, Intercommunalités de France et le Gart insistent sur " la nécessité (…) de développer les transports collectifs dans l’intérêt majeur des entreprises et de la lutte contre le changement climatique."

Besoin d'"accompagner la transition écologique"

Bruno Bernard, président (EELV) de la métropole de Lyon et du syndicat des transports du Rhône et de l'agglomération lyonnaise (Sytral) - le deuxième réseau de France après celui de l'Île-de-France -, et par ailleurs premier vice-président du Gart, a été plus direct. "En plein pic de pollution, le Medef propose de supprimer le versement mobilité qui finance les transports en commun par un chèque essence. C'est totalement contre-productif : pour (le) climat, pour la baisse de la pollution, pour le pouvoir d'achat", a-t-il tweeté. "Au contraire, on a besoin de développer les transports en commun, les alternatives à la voiture thermique, d'accompagner les ménages vers des alternatives bas carbone. En bref, aider accompagner la transition écologique. Pas de subventionner les énergies fossiles", a-t-il ajouté.
Geoffroy Roux de Bézieux est allé plus loin que les propositions du Medef en vue de la présidentielle, publiées ce même 25 janvier. Le mouvement patronal demande une baisse des impôts, citant nomment cette contribution reversée aux collectivités pour financer les transports en commun. Le Medef veut aussi "conditionner le versement mobilité à l'existence d'un service de transport effectif délivré et financé par la collectivité, afin qu'il ne devienne pas une variable d'ajustement des budgets locaux". Il réclame sur sa lancée une exonération proportionnelle à la part d'employés en télétravail qui prennent moins les transports en commun.

Mise au point du ministère des Transports

"Des outils sont déjà à disposition des employeurs, et font l'objet d'exonérations d'impôts et de cotisations", a rappelé le ministère des Transports à l'AFP. "Les employeurs peuvent recourir au forfait mobilités durables, pour soutenir le recours au covoiturage ou aux modes actifs comme le vélo", a précisé un porte-parole. Ils peuvent aussi prendre en charge, au titre des déplacements entre la résidence habituelle et le lieu de travail, tout ou partie des frais de carburant et des frais pour l'alimentation de véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène engagés par les salariés.
En complément, le Premier ministre Jean Castex a annoncé ce 25 janvier que le barème de l'indemnité kilométrique serait rehaussé de 10%, afin de "mieux tenir compte de la hausse réelle des prix supportés par ces ménages" (voir notre article du 25 janvier 2022). 
"L'effet sera rapide et direct, dès la déclaration d'impôt sur les revenus 2021 ou des bénéfices de l'année dernière", a relevé le porte-parole du ministère, notant que cette revalorisation avait également vocation à servir de référence et donc à se répercuter sur les indemnités kilométriques - défiscalisées - directement versées par les employeurs à leurs salariés qui utilisent leur véhicule personnel. 
Dans un contexte de crise du financement des transports collectifs, l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP), qui réunit les exploitants, a de son côté rappelé son attachement au versement mobilité. Elle le juge notamment "vertueux car fléché vers la mobilité alternative au véhicule individuel".