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Mobilités dans les quartiers de la politique de la ville : quelles pistes pour lever les freins ?

Environ 5 millions d’habitants de quartiers prioritaires ou de territoires concernés par la politique de la ville rencontrent des difficultés pour se déplacer. Conçue comme un guide destiné aux acteurs locaux et nationaux de la politique de la ville et des mobilités, une étude publiée ce 21 janvier par l'Assemblée des communautés de France (ADCF), France urbaine et Transdev présente les stratégies et pratiques d’une dizaine de territoires pour répondre à ces besoins de déplacements au croisement des politiques de cohésion sociale et urbaine, d’accès à l’emploi, et plus largement de "droit à la ville". 

Conçue comme un guide destiné aux acteurs locaux et nationaux de la politique de la ville et des mobilités en ce début de mandat local, l’étude "Quartiers populaires et politiques de mobilités : enjeux et retours d'expériences locales" publiée ce 21 janvier par l’AdCF-Intercommunalités de France, France urbaine et Transdev entend proposer une analyse illustrée de la place et du rôle des mobilités aujourd’hui dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Alors que la loi d’orientation des mobilités (LOM), promulguée en décembre 2019, affirme notamment "la mobilité partout, pour tous", quelque 5 millions d'habitants de ces quartiers rencontrent encore aujourd'hui des difficultés à se déplacer. Rédigée sur la base d’entretiens réalisés auprès de plus d’une centaine d'élus et cadres des communautés et métropoles, acteurs économiques et associatifs d'une dizaine de territoires* dont les stratégies et pratiques sont détaillées dans une deuxième partie, l'étude propose des repères et pistes de réflexion communes sur la poursuite du désenclavement des quartiers, les freins à la mobilité de leurs habitants, la mobilité et le parcours vers l’emploi et l’enjeu de coopération de l’ensemble des acteurs.

Au-delà du désenclavement par les lignes de transport collectif

Elle montre d'abord que les réponses aux besoins de mobilité se construisent et se concrétisent à plusieurs échelles - du quartier au bassin de mobilité, en considérant l’ensemble des besoins et des habitudes de déplacement des habitants - et que desservir par des lignes de transport collectif les quartiers prioritaires ne suffit plus à répondre aux enjeux de désenclavement. "Il faut aller plus loin et agir sur les freins physiques, cognitifs, psychologiques, culturels et financiers, l’apprentissage des possibilités offertes par les autres solutions de mobilité, l’intégration de la problématique des mobilités dans les parcours de vie des habitants, notamment l’emploi, l’éducation, la formation, l’accès aux services et loisirs", développent ses auteurs.

Préparer le terrain pour les mobilités actives

"Si la voiture reste encore un marqueur social fort et, dans certains territoires, un prérequis indispensable pour se déplacer, des actions pour proposer une alternative à l’auto-solisme et pour accompagner le changement de culture et de comportement sont attendues", soulignent-ils également. Les mobilités actives - marche et vélo - font partie de ces réponses mais, préviennent-ils, si elles sont " simples" en apparence, elles nécessitent "un engagement fort et dans la durée : aménagement de l’espace public, de la voirie, sécurisation des cheminements piétons et des pistes cyclables, réflexion sur les premier et dernier kilomètres, accès aux offres de libre-service mais aussi apprentissage du vélo et revalorisation sociale et culturelle des pratiques (particulièrement pour les femmes, les familles, les jeunes)".

La clé de l'accès à l'emploi et à la formation

Dans ces quartiers, l'une des questions clés en matière de mobilité reste l'accès à l'emploi et à la formation. Pour les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui travaillent souvent en horaires décalés et atypiques, se rendre dans les zones d’activité économique, qui se trouvent pour la plupart en périphérie des centres-villes et sont peu ou pas reliés en transports collectifs, relève du parcours du combattant. Les offres de co-voiturage sont encore en construction même si un grand nombre d’acteurs de l’économie sociale et solidaire, acteurs associatifs portent des initiatives oeuvrant pour la mobilité des habitants (auto-école sociale, garage solidaire…), relève l'étude. Mais leur modèle économique est fragile et reste à pérenniser. "Il s’agira également d’inscrire les mobilités dans les dispositifs d’accompagnement à l’emploi et à l’insertion, et sensibiliser dès le plus jeune âge aux voies et moyens à saisir pour se déplacer dans la ville, de manière la plus sobre possible", avance-t-elle. Le numérique offre aussi de nouvelles solutions, "à condition de veiller à leur appropriation par toutes et tous, sachant que les habitants des quartiers populaires souffrent souvent d’illectronisme et d’un manque de matériel disponible", met-elle en garde.

Coordination et coopération entre acteurs indispensables

Enfin à l’instar d’autres politiques publiques transversales, les mobilités nécessitent un "effort particulier de coordination et de coopération", souligne l'étude. La coopération entre un grand nombre d’acteurs est nécessaire, "pour éviter toute concurrence stérile" et permettre "une action plus efficace". "Plateformes de mobilité, acteurs de l’emploi et de l’insertion, associations doivent agir de concert et en bonne intelligence", insistent les auteurs de l'étude. La coordination entre collectivités locales doit se faire "autour du couple région – intercommunalité : la région cheffe de file et l’intercommunalité autorité organisatrice des mobilités." Enfin, rappelle l'étude, la LOM introduit plusieurs dispositions qu’il s’agit d’intégrer au projet de cohésion urbaine et sociale et, au-delà, au projet de territoire que communautés et métropoles engageront pour le mandat 2020-2026 : définition des bassins de mobilité, signature des contrats opérationnels de mobilité, mise en place des comités des partenaires à l’échelle de chaque autorité organisatrice des mobilités.


*Dracénie Provence Verdon Agglomération (Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur), Grand Verdun Agglomération (Grand Est), Limoges Métropole (Nouvelle-Aquitaine), Nantes Métropole (Pays de la Loire), Orléans Métropole (Centre-Val de Loire), communauté d’agglomération du Pays de Saint-Omer (Hauts-de-France), Saint-Étienne Métropole (Auvergne Rhône-Alpes), Seine Eure Agglomération (Normandie), communauté de communes du Sud Avesnois (Hauts-de-France), Toulouse Métropole (Occitanie).

 

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