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Pass sanitaire et vaccination : ce que prévoit finalement la loi

Au final, le projet de loi "gestion de la crise sanitaire" aura relativement peu évolué entre la version présentée en conseil des ministres et celle définitivement adoptée par le Parlement dans la nuit de dimanche à lundi au terme d'un weekend complet de débats et d'une commission mixte paritaire conclusive. En résumé :

  • Régime transitoire jusqu'au 15 novembre

Le projet de loi repose sur la prorogation jusqu'au 15 novembre du régime transitoire de sortie progressive de l'état d'urgence, et non jusqu'au 31 décembre comme le souhaitait initialement l'exécutif. Ce régime permet d'ordonner des mesures de restrictions (circulation des personnes, accès aux établissements recevant du public...), dont le pass sanitaire.

  • Outre-Mer

L'état d'urgence sanitaire est par ailleurs prorogé à La Réunion et en Martinique jusqu'au 30 septembre, où un couvre-feu a été mis en place. Guadeloupe, Saint-Barthélemy et Saint-Martin seront sous état d'urgence également, au lendemain de la promulgation de la loi. Le texte ouvre en outre la porte à l'application de ce régime à Mayotte.

  • Extension du pass sanitaire

Où ? L'usage du pass sanitaire - test Covid négatif, attestation de vaccination ou certificat de rétablissement – déjà en vigueur dans les "lieux de loisirs et de culture" rassemblant plus de 50 personnes, sera bien étendu aux :

  • cafés, restaurants ("activités de restauration commerciale ou de débit de boissons, à l’exception de la restauration collective, de la vente à emporter de plats préparés et de la restauration professionnelle routière et ferroviaire"). Y compris en terrasse, contrairement à ce qu'avait proposé le Sénat ;
  • foires et salons professionnels ;
  • "déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux" (que ce soit en train, car ou avion) ;
  • établissements médicaux sauf urgence ("sauf en cas d’urgence, les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, pour les seules personnes accompagnant ou rendant visite aux personnes accueillies dans ces services et établissements ainsi que pour celles qui y sont accueillies pour des soins programmés") ;
  • centres commerciaux si le préfet en décide ainsi (le Sénat avait demandé l'exclusion des centres commerciaux. En vertu d'un amendement gouvernemental de dernière minute, la présentation d'un pass pour l'accès aux centres commerciaux et grands magasins pourra finalement être exigée mais uniquement sur décision préfectorale lorsque la situation sanitaire du territoire en question le justifie et "dans des conditions garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité").

Quand ? Il faudra attendre la publication de la loi. Et du décret qui suivra. Or bien que définitivement adopté, le projet de loi ne pourra être promulguée qu'après passage devant le Conseil constitutionnel.
Celui-ci doit rendre sa décision le 5 août. Donc a priori, pas d'entrée en vigueur avant le 6 août.
Sauf pour les 12-17 ans, qui ne seront concernés qu'à partir du 30 septembre, selon l'accord trouvé en CMP (en notant en outre que : l'autorisation d'un seul parent est nécessaire pour la vaccination d'un mineur ; et que les plus de 16 ans n'ont pas besoin de cette autorisation et peuvent en décider seuls).
Quant aux salariés des établissements ou services concernés, l'obligation de disposer d'un pass sanitaire leur incombera à compter du 30 août.

Quels contrôles, quelles sanctions ? - La présentation du pass "ne s’accompagne d’une présentation de documents officiels d’identité que lorsque ceux-ci sont exigés par des agents des forces de l’ordre", confirme la loi, comme l'avait fait savoir le gouvernement.
L'utilisation d'un pass frauduleux sera sanctionné par une amende de 135 euros (six mois d'emprisonnement et 3.750 euros d'amende si cela se produit plus de trois fois en 30 jours).
L'absence de contrôle dans un transport sera passible pour son gestionnaire d'une amende de 1.500 euros (jusqu'à un an d'emprisonnement et 9.000 euros d'amende en cas de verbalisation à plus de trois reprises en 30 jours).
Pour les autres lieux concernés par le pass, leurs gestionnaires qui ne feraient pas de contrôle seront mis en demeure par l'autorité administrative, puis le lieu pourra être fermé pour sept jours maximum. En cas de manquement à plus de trois reprises sur 45 jours, le gestionnaire encourra un an d'emprisonnement et 9.000 euros d'amende.
Les salariés risquent, faute de pass à partir du 30 août, d'être suspendus, sans salaire. Si la situation perdure plus de trois jours, la personne sera convoquée pour un entretien afin d'examiner "les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d'affectation" sur un poste non soumis à l'obligation du pass (la loi prévoit en effet que ce ne seront pas nécessairement tous les salariés d'un même établissement qui seront concernés par le pass mais uniquement les "personnes qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou évènements lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l’exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie, au regard notamment de la densité de population observée ou prévue"). Comme l'avait demandé le Sénat, la non-présentation d'un pass ne pourra donner lieu à licenciement.

  • Vaccination obligatoire

Le projet de loi rend obligatoire la vaccination des personnels des hôpitaux, cliniques, Ehpad et maisons de retraite, sapeurs-pompiers, de certains militaires, ainsi que pour les professionnels et bénévoles auprès des personnes âgées, y compris à domicile. La longue liste des établissements concernés, dont beaucoup dépendent des collectivités (centres de santé par exemple) figure à l'article 5.
Cette obligation de vaccination (ou de présentation d'une attestation de rétablissement) prendra plein effet le 15 septembre. Il a toutefois été décidé que les professionnels ayant reçu une première injection au 15 septembre auront un mois de plus, jusqu'au 15 octobre, pour achever leurs parcours vaccinal.
Les salariés et agents publics bénéficient d'une autorisation d'absence pour se rendre aux rendez-vous médicaux liés aux vaccinations.
Des exemptions sont possibles pour les personnes qui justifient d'une contre-indication médicale à la vaccination. Les professionnels qui refusent la vaccination seront interdits d'exercer, avec suspension du salaire. Là encore, le licenciement n'est plus prévu.

  • Isolement des cas positifs

Les personnes dépistées positives au Covid-19 devront se placer à l'isolement pour une durée non renouvelable de dix jours dans le lieu d'hébergement qu'elles déterminent. L'isolement pourra s'achever plus tôt en cas de test négatif. Un recours sera possible devant le juge des libertés et de la détention. Les personnes ne pourront sortir qu'entre 10h00 et 12h00 ainsi qu'en cas d'urgence.  Elles pourront en outre "demander au représentant de l’État dans le département d’aménager ces heures de sortie en raison des contraintes familiales ou personnelles dont elles justifient".
C'est l'assurance maladie (et non les forces de l'ordre, comme initialement envisagé) qui veillera au respect de l'isolement mais en cas de suspicion de non-respect, elle saisira le préfet qui pourra diligenter des contrôles sur place, en dehors de la nuit de 23h00 à 8h00 et de la plage 10h00-12h00.
Les personnes qui ne respectent pas l'isolement seront passibles d'une amende de 1.500 euros.