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Permanence des soins ambulatoires : le recul s'est poursuivi en 2021

Le conseil de l'Ordre des médecins publie son enquête annuelle sur la permanence des soins ambulatoires. Le taux de médecins participants aux "gardes" est de 38,5% - avec de forts écarts entre départements -, contre 67% en 2014. Autre chiffre, parmi les nombreuses informations de l'étude : dans 35 départements (6 de plus qu'en 2020), il n'y a plus un seul médecin de garde après minuit.

Comme chaque année, le conseil national de l'Ordre des médecins publie les résultats de son enquête sur la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Cette publication, qui constitue la 19e édition de l'enquête, porte sur les résultats au 31 décembre 2021. Après une année 2020 forcément atypique compte tenu à la fois de la mobilisation autour de la crise sanitaire et des perturbations induites par les confinements, les résultats de l'an dernier témoignent d'une persistance des difficultés de la permanence.

Moins de 40% de médecins participants

Le rapport constate ainsi qu'"après une évolution favorable de la participation des médecins à la PDSA impulsée par la crise sanitaire en 2020, le taux de participation global des médecins généralistes à la PDSA est reparti à la baisse, malgré la poursuite de la hausse du nombre de participants à la régulation médicale, qu'il s'agisse de médecins libéraux installés ou de médecins salariés, remplaçants ou étudiants".

Après les modifications dans l'organisation des permanences apportées en 2020 pour faire face à la pandémie, la situation en la matière s'est relativement stabilisée l'an dernier. Seuls 46% des conseils départementaux de l'Ordre des médecins (CDOM) déclarent avoir connu des modifications de l'organisation de la PDSA, contre 70% un an plus tôt. De même, seuls 15% des CDOM indiquent que l'organisation de la permanence telle que formalisée dans le cahier des charges n'était pas réellement mise en œuvre dans leur département l'an dernier, contre 29% en 2020. Autre point positif : l'impact de la crise sanitaire s'est quelque peu atténué. Seuls 27% des CDOM déclarent avoir subi en 2021 des difficultés organisationnelles et/ou opérationnelles de la PDSA engendrées par la pandémie, contre 62% qui disent de pas avoir connu d'impact particulier.

Cette relative stabilisation de l'organisation n'empêche pas la poursuite de l'érosion de la permanence des soins. Avec 24.472 médecins participants volontaires, sur un total potentiel de 63.231, le taux de participation est de 38,5%, ce qui correspond à une "légère baisse du taux de volontariat national". Ce recul de 0,8% annule la légère hausse de 0,5% constatée en 2020. Même si le recul est limité, il n'en reste pas moins que le taux national de participation à la PDSA était encore de 67% en 2014 et que la participation aux gardes était obligatoire jusqu'en 2002...

Participation aux gardes : 6% à Paris et 82% dans les Vosges... mais il y a des raisons

Cette moyenne de 38,5% recouvre toutefois d'importants écarts entre départements, puisque les taux de participation vont de 6% à Paris à 82% dans les Vosges. Entre 2020 et 2021, le taux de participation a augmenté pour 25% des départements, a diminué pour 52% et est resté stable pour 19% d'entre eux. Ces résultats doivent toutefois être interprétés avec une certaine prudence. D'une part, certains départements, comme Paris, sont couverts par des structures spécifiques du type SOS Médecins ou autres. D'autre part, certains départements ont fait l'objet de réquisitions préfectorales récurrentes qui ont accru la participation. C'est notamment le cas des Vosges, de la Charente ou de l'Eure-et-Loir. Plus globalement, 23 départements ont connu l'an dernier des réquisitions préfectorales (ponctuelles dans 18 départements, récurrentes dans les autres). Le rapport précise qu'"il est également important de noter qu'un taux de participation départemental peut masquer des disparités entre les territoires ruraux et urbains". Cette hétérogénéité se retrouve également dans le nombre moyen de gardes par médecins participants. Pour une moyenne nationale de 29 gardes (identique à 2020), les écarts vont de 6 gardes annuelles dans l'Orne à 153 en Seine-et-Marne. Là aussi, les écarts sont à nuancer, car ils intègrent "les médecins travaillant en associations de type SOS Médecins, dont les prises en charge en horaires de PDSA représentent le cœur de métier".

En termes de couverture, 36% des secteurs de PDSA (en prenant pour base le nombre de secteurs en week-ends et jours fériés) étaient couverts par 10 médecins volontaires ou moins en 2021, et 20% par 5 volontaires ou moins (contre respectivement 35% et 19% en 2020). En termes de profils, les médecins participant à la PDSA sont majoritairement des hommes (66% pour les régulateurs et 55% pour les effecteurs). Toutefois, la part des femmes effectuant des gardes a augmenté de 7 points en 3 ans. Les généralistes libéraux représentent 88% des effecteurs (-1%), les remplaçants exclusifs 6% et les médecins de centres de santé exclusifs 2%.

Rétablir les gardes obligatoires ?

L'enquête met également en évidence un autre élément : une "tendance affirmée" à la réduction du nombre de territoires de PDSA, qui s'accélère en 2021. Le nombre de territoires diminue en effet de 7,7% en soirée, de 2,6% durant les week-ends et jours fériés, et même de 13% en nuit profonde. Conséquence : il existe des "zones blanches" dans 14 départements en soirée et durant les weekends et dans 87% des départements en nuit profonde. Et dans 35 départements (soit 6 de plus qu'en 2020), il n'y a plus aucun médecin de garde après minuit. Parmi les raisons avancées pour expliquer le désengagement des médecins volontaires pour assurer notamment la permanence des soins les soirées de semaine figurent notamment l'âge avancé des praticiens, un "burn-out" des médecins effecteurs, dont l'activité est très intense en journée, la faible activité en soirée, l'extension des secteurs et l'éloignement consécutif du domicile, la faible valorisation des actes et leur fiscalité...

Face à cette situation, le conseil de l'Ordre évoque différentes pistes : l'extension de la PDSA au samedi matin (qui n'a pas fonctionné l'an dernier), la mise en place de sites dédiés à l'exercice de la garde, le déploiement de services de transports des patients et des médecins mobiles pour les patients non-mobilisables, l'instauration de dispositifs spécifiques pour les prises en charge en Ehpad...

D'autres acteurs préconisent toutefois des solutions plus radicales. Dans son Livre blanc "Ambition santé 2022", publié à l'occasion de la campagne de l'élection présidentielle, la FHF (Fédération hospitalière de France) pointait ainsi les conséquences de l'affaiblissement de la PDSA sur l'engorgement des urgences. Et appelait donc clairement à "rétablir l'obligation de la participation à la permanence des soins ambulatoires".

 

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