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Réforme de la carte judiciaire : les élus de Villes de France rassurés "par la méthode"

Inquiète de la réforme en cours sur la carte judiciaire, une délégation de Villes de France a rencontré la ministre de la Justice le 20 février 2018. A l'issue de l'entrevue, les élus se disent rassurés par la méthode. Aucune décision n'a encore été prise et un deuxième cycle de concertation est prévu.

A l'issue de leur rencontre avec Nicole Belloubet, le 20 février 2018, les maires des villes moyennes se disent plutôt rassurés "par la méthode" employée par la ministre de la Justice pour réformer la carte judiciaire, l'un des cinq chantiers de la réforme de la justice lancée cet automne. "Il va y avoir un second tour de concertation après les orientations que devrait présenter d'ici quelques semaines Nicole Belloubet, détaille à Localtis Armand Pinoteau, conseiller à Villes de France, au lendemain de cette rencontre. Elle va donner la parole au niveau local, cette approche est plutôt rassurante ; aucune décision n'est encore prise." Une concertation nationale et locale est en effet prévue à l'occasion de laquelle le modèle d'organisation judiciaire sera présenté dans ses principes et dans ses déclinaisons. La ministre a assuré à la délégation de Villes de France qu'aucune décision ne remettra en cause l'implantation physique des juridictions de base actuelles, soit les cours d'appel, tribunaux de grande instance (TGI) et tribunaux d'instance (TI). En revanche, la réforme portera sur une nouvelle répartition des affaires, avec une base de compétences socle, pour toutes les cours d'appel, et des compétences spécialisées, qui seront quant à elles réservées aux cours d'appel régionales.

Regrouper certains contentieux techniques

L'idée est ainsi de regrouper certains contentieux techniques, que les magistrats n'ont à régler que deux à trois fois par an et qui représentent donc un faible volume, au sein de ces cours d'appel régionales. Reste que le périmètre exact des contentieux complexes ou techniques n'est pas encore totalement clair. "Nous avons encore du mal à cerner à quoi vont correspondre ces contentieux techniques ; il n'y a pas eu d'énumérations", précise ainsi Armand Pinoteau.
Pourtant, les rumeurs vont bon train depuis plusieurs semaines : disparition d'une dizaine de cours d'appel sur la trentaine existant actuellement sur le territoire, au profit de cours d'appel régionales (une par région), maintien d'un tribunal de grande instance par région... Dans de nombreuses villes, les professionnels du secteur, magistrats, greffiers et avocats se mobilisent. Et mercredi, le député LR des Côtes-d'Armor Marc Le Fur a lancé un mouvement transpartisan pour peser dans la réforme en cours.

"Meurtrissures des précédentes réformes"

La délégation de Villes de France a pour sa part rappelé à la ministre les "meurtrissures des précédentes réformes", notamment celle engagée en 2007 par Rachida Dati, alors garde des Sceaux. "Nous ne comprendrions pas cela à l'heure où le gouvernement et Jacques Mézard en particulier, s'attachent à revitaliser les cœurs de villes, et à redonner une impulsion dans nos territoires", a ainsi précisé Caroline Cayeux, maire de Beauvais et présidente de Villes de France, tel qu'indiqué dans le communiqué de l'association diffusé le 21 février. Une référence au plan national "Action cœur de ville" lancé par le ministre de la Cohésion des territoires en décembre 2017 en faveur des villes moyennes.
Si Nicole Belloubet a promis qu'il n'y aurait pas de grand soir de la carte judiciaire, elle a "concédé" que le redécoupage géographique des ressorts serait calqué le plus possible sur la carte administrative. Une façon de valider l'idée qu'il y aurait bien des cours d'appel chef de file qui concentreraient les fonctions administratives et budgétaires, permettant aux autres de se concentrer sur les affaires juridictionnelles... et certains territoires pourraient être davantage impactés. "En Nouvelle-Aquitaine, il y a cinq cours d'appel, trois en Occitanie, une seule en Provence-Alpes-Côte d'Azur, est-ce qu'il va y avoir un rééquilibrage ?", questionne ainsi Armand Pinoteau.
Nicole Belloubet a prévu de rencontrer à nouveau Villes de France à l'issue des premiers arbitrages interministériels.