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Sport pour tous : un rapport parlementaire pour (enfin) passer à l'action

L'idée de faire de la France une nation sportive, remise au goût du jour par le président de la République et portée dans un rapport tout juste remis par deux parlementaires, va-t-elle dépasser le stade du concept pour devenir réalité ? Conscients des freins qui jusque-là ont empêché la réalisation de ce qu'ils perçoivent comme une grande cause nationale, la sénatrice Françoise Gatel et le député François Cormier-Bouligeon préconisent une mobilisation générale passant par la mise en place d’un comité interministériel pour le sport et les activités physiques et sportives (Cisaps), une Agence nationale du sport et l’adoption d’un plan pluriannuel de développement de la pratique physique et sportive. Mais également une cohérence au niveau local impliquant une contractualisation entre les collectivités et les clubs sportifs. Face à un budget très serré, le plus petit de l'Etat, le ministère du Sport a-t-il les moyens de ces ambitions ?

Il est des discours politiques qui reviennent comme des antiennes sans être toujours suivis d'effet. En matière de sport, le cap a été fixé il y a maintenant cinq ans par Denis Masseglia, président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF). Son ambition d'alors ? "Passer d'une nation de sportifs à une nation sportive." Depuis, l'idée a fait florès. Après l'obtention de l'organisation des Jeux olympiques de 2024 par Paris, le président de la République Emmanuel Macron l'a reprise à son compte. Au-delà des discours, il fallait un plan. Ce plan, le Premier ministre Edouard Philippe a demandé à deux parlementaires – Françoise Gatel, sénatrice d’Ille-et-Vilaine, et François Cormier-Bouligeon, député du Cher et président du groupe d'études sur le sport de l'Assemblée nationale – de l'élaborer. Leur rapport a été remis ce jeudi 21 mars à la ministre des Sports Roxana Maracineanu.

Le budget le plus faible de l’Etat

Sans surprise, le document de cent pages est intitulé "Faire de la France une vraie nation sportive". Son sous-titre est un peu plus précis : "Développer la pratique d’activités physiques et sportives tout au long de la vie". Et lorsqu'il s'agit de chercher des moyens pour y parvenir, les collectivités territoriales sont au cœur des propositions mais également des préoccupations des rapporteurs.

Car des obstacles se dressent devant cette ambition. Tout d'abord, le budget du ministère des Sports est "le plus faible de l’Etat (0,13%) et les annonces récentes concernant l’organisation ainsi que les moyens, notamment humains du ministère, peuvent interroger". Ensuite, "le parc des équipements sportifs, dont 80% sont la propriété des communes, est souvent vétuste et insuffisant pour permettre une pratique sportive adaptée sur l’ensemble du territoire". A cela, il faut ajouter les freins qui existent dans le développement du sport en entreprise, du sport-santé, du sport à l'école, etc. D'où l'imprécation suivante : "Cette ambition relève véritablement d’une grande cause nationale exigeant une mobilisation générale." Une mobilisation qui se matérialisera, pour les auteurs du rapport, dans la création d’un comité interministériel pour le sport et les activités physiques et sportives (Cisaps) présidé par le Premier ministre, la mise en place de l'Agence nationale du sport et l’adoption d’un plan pluriannuel de développement de la pratique physique et sportive "qui permettra de renouer dans le temps la confiance entre l’Etat et les acteurs locaux".

Gratuité pour les publics éloignés

Parmi les mesures préconisées, on notera au chapitre de l’adaptation et de la diversification de l’offre sportive qu'il convient d'"encourager et soutenir financièrement l’offre pluridisciplinaire et l’accueil de publics divers par les associations", et donc "inscrire ces démarches dans un cadre de mutualisation et de contractualisation entre les collectivités et les clubs sportifs pour bâtir une offre cohérente au niveau local". Dans le même ordre d'idée, les auteurs préconisent de "généraliser la mise en place, dans un cadre partenarial (Etat/collectivités territoriales/mouvement sportif), de dispositifs permettant la pratique d’un ensemble d’activités physiques et sportives gratuites pour des publics éloignés (femmes isolées, jeunes en QPV, seniors en milieu rural, etc.)".

Au chapitre des équipements, le rapport balaye large et vise à moderniser "le registre [sic] des équipements", les cartographier en précisant leur taux de saturation ou leur vétusté, recenser les bâtiments et sites (zones industrielles et d’activités notamment) susceptibles d’être aménagés et reconvertis pour permettre la pratique d’activités physiques et sportives. Et bien entendu, il souhaite l'élaboration d'un plan pluriannuel de modernisation des équipements, l'optimisation de l’utilisation des installations scolaires ou encore la mise en place par les services de l’Etat d’une cellule d’ingénierie territoriale destinée à accompagner les collectivités locales.

Un échelon communal pour l'Agence du sport

Enfin, au chapitre de la gouvernance, on retiendra de ce rapport, outre la volonté d'élaborer une stratégie nationale pluriannuelle, l'idée de "soutenir l’élaboration de projets sportifs territoriaux concertés entre tous les acteurs locaux et par conséquent prévoir un troisième niveau 'bloc communal' aux côtés des niveaux nationaux et régionaux de la gouvernance de la future Agence du sport".

Ces mesures ne sont pas toutes nouvelles ni originales. Les auteurs reconnaissent d'ailleurs que le sport "a fait au cours des dernières années et des derniers mois l’objet de rapports nombreux, de grande qualité et d’origines diverses". Pourtant, ils en sont persuadés, "le temps de la volonté et de l’action est venu pour s’engager sur le chemin qui fera de la France une vraie nation sportive".