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Territoires zéro chômeur de longue durée : la mise en œuvre d'un droit à l'emploi est un "objectif réaliste"

Près de 800 salariés et plus de 1.000 personnes remises sur les rails de l'emploi, deux territoires qui parviennent à faire du droit à l'emploi une réalité, une attention soutenue à la "supplémentarité" de l'activité créée… même si les défis sont encore nombreux, le deuxième bilan des dix "Territoires zéro chômeur de longue durée" est positif. Le fonds d'expérimentation espère un élargissement rapide du dispositif à de nouveaux territoires.

L’association gestionnaire du fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée (ETCLD) vient de publier le deuxième bilan intermédiaire de l’expérimentation "Territoires zéro chômeur de longue durée", après de premiers enseignements diffusés en novembre dernier (voir ci-dessous notre article du 23 novembre 2018) et avant la remise d’un rapport final annoncée pour la fin de l’année.

Alors que 89 autres projets émergents sont actuellement soutenus par l’association TZCLD, le gouvernement n’a pas encore clarifié ses intentions quant à son projet d’extension de l’expérimentation. "La volonté du gouvernement est d'étendre ce dispositif afin qu'il atteigne une taille suffisante pour permettre de l'évaluer de façon rigoureuse, dans une logique coût-bénéfice, conformément à l'esprit du législateur", peut-on lire dans une réponse du ministère du Travail du 16 juillet 2019 à une question écrite qui portait sur l’élargissement de l’expérimentation à de nouveaux territoires. À ce stade, l’augmentation du nombre de bénéficiaires dans les dix territoires est donc encouragée, mais l’élargissement à de nouveaux territoires ne semble pas garanti. Parce que la capacité de mobilisation du dispositif est grande, il est pourtant "essentiel qu'une deuxième loi permette d'engager cette deuxième étape aussi rapidement que possible", estime Louis Gallois, président de ETCLD.

Une dynamique territoriale à consolider

Dans les dix territoires de l’expérimentation, 838 personnes étaient passées par une entreprise à but d’emploi (EBE) au 31 mai 2019. Le dispositif permettrait à 60% des volontaires de retrouver un emploi, soit dans l’EBE (770 personnes parmi les 1.849 volontaires, selon les chiffres de fin 2018), "soit de manière indirecte par la méthode de mobilisation du projet, avant même d’entrer en EBE" (278 personnes). Deux territoires, Mauléon (Deux-Sèvres) et Pipriac-Saint-Ganton (Ille-et-Vilaine), sont désormais dans une situation de quasi "exhaustivité" : ils sont arrivés "à l’étape où se matérialise le droit d’obtenir un emploi". Donner une solution à chaque chômeur de longue durée volontaire, c’est donc bien un "objectif réaliste, même s’il paraît plus rapidement atteignable en zone rurale ou semi-rurale qu’en zone urbaine", commente Louis Gallois.

"La dynamique territoriale apparaît toujours essentielle pour le succès de l’expérimentation ; il convient de rester vigilants sur sa robustesse et sa qualité", alerte-t-il encore. "Il apparaît sur certains territoires qu’elle doit être renforcée sinon relancée et, qu’elle doit sans doute, mieux associer les acteurs économiques (entreprises, artisans, agriculteurs)", peut-on lire dans la synthèse du bilan. Des crédits d’ingénierie supplémentaires seraient ainsi nécessaires pour assurer l’animation des comités locaux pour l’emploi (CLE).

"Supplémentarité" et accélération de politiques émergentes

Le bilan valide de façon détaillée et illustrée les trois convictions à l’origine du projet : "Nul n’est inemployable, lorsque l’emploi est adapté aux personnes", "Ce n’est pas le travail qui manque", "Ce n’est pas l’argent qui manque". Les activités réalisées dans le cadre des EBE contribuent pour 39% d’entre elles à la transition écologique (économie circulaire, agriculture durable...), pour 36% à la cohésion sociale à la lutte contre l’exclusion (services aux habitants et aux collectivités, lien social, mobilité…) et pour 24% au développement du tissu économique local (services aux entreprises, commerce, patrimoine...). L’association ETCLD travaille actuellement au calcul d’un "taux de supplémentarité de l’emploi" créé dans le cadre de l’expérimentation, la "supplémentarité" étant gage de non-concurrence entre les EBE et les entreprises locales (1).

Le fonds d’expérimentation cite également des exemples démontrant que les "territoires zéro chômeur de longue durée" viennent en soutien de politiques émergentes, notamment en faveur des personnes âgées – conciergerie solidaire, accompagnement à la marche – et de l’écologie – démantèlement d’ouvrants, diagnostic socio-technique.

Pour consolider les EBE et l’expérimentation, le bilan met en avant trois sujets clé : la formation des salariés, le management du dispositif avec souvent la nécessité d’une clarification entre les rôles du CLE, du conseil d’administration et de la direction de l’EBE et la pérennisation des modèles économiques avec l’impératif d’augmenter le chiffre d’affaires pour pouvoir poursuivre les recrutements.

 

(1) L’EBE s’inscrit en "supplémentarité" dans trois cas de figure : elle développe une activité qui n’existe pas sur le territoire, elle intervient en complémentarité alors que l’activité existe mais que la demande n’est pas entièrement satisfaite, elle propose sur une activité qui existe une offre à des prix réduits au bénéfice de personnes qui n'auraient pas pu accéder à l'offre existante.