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Engagement et proximité : de nouvelles modalités de transfert des compétences eau et assainissement

La loi Engagement et proximité a apporté de nouvelles retouches  à l’exercice des compétences eau et assainissement, en particulier par les communautés de communes. Un transfert qui ne coule pas nécessairement de source et sur lequel des éclairages sont les bienvenus.  C'est ce qu'a fait la Direction générale des collectivités locales (DGCL) dans une note rédigée le 28 décembre dernier, concomitamment à la promulgation de la loi.

Rédigée concomitamment à la promulgation de la loi Engagement et proximité, le 28 décembre dernier ((sur les autres dispositions, voir notre article d'ensemble "Engagement et proximité : tout ce que contient la loi"), une note de la DGCL décrypte opportunément les ultimes aménagements concédés par le texte à l’exercice des compétences eau et assainissement, dont certains portent des effets dès le 1er janvier 2020. Sans surprise, le document revient sur la minorité de blocage prévue par la loi Ferrand-Fesneau du 3 août 2018 permettant le report, au plus tard en 2026, du transfert obligatoire de compétences pour les communautés de communes imposé par la loi Notr de 2015. Un mécanisme que les communes membres pouvaient théoriquement actionner en délibérant jusqu' au 31 décembre 2019 (contre le 1er juillet 2019 initialement). Une faculté par ailleurs élargie à tous les cas d’exercice partiel de ces compétences, au sein des communautés de communes, et sur tout ou partie de leur territoire.

Ce jeu d'aller-retour fait l'objet de développements précis. Le cas échéant, la communauté de communes peut se prononcer "après le 1er janvier 2020 par un vote de son organe délibérant en faveur d’un exercice de plein droit des compétences eau et/ou assainissement", indique ainsi la note. Sachant que les communes membres conservent en retour "la possibilité de s’opposer à cette délibération, dans les trois mois, via la minorité de blocage", comme le prévoit là encore la loi du 3 août 2018. Et inversement l’activation du pouvoir d’opposition n’empêche en rien les communes de décider librement du transfert en tout ou partie des compétences eau et/ou assainissement à leur EPCI à fiscalité propre par délibérations concordantes - dans les conditions du droit commun, en application des dispositions de l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales (CGCT) -, et ce "sans que la minorité de blocage puisse y faire obstacle",  insiste la note. 

Un mécanisme de délégation souple

Principale nouveauté du texte, la loi permet, sans remettre en cause le caractère obligatoire du transfert aux communautés de communes ou d’agglomération, de déléguer, par convention, tout ou partie des compétences transférées à l’une de leurs communes membres ou à un syndicat (existant au 1er janvier 2019) qui en ferait la demande. Un dispositif particulièrement souple, laissant aux élus "une large marge de manoeuvre" de façon à coller "aux problématiques locales",  vante la note. Exit en particulier le plan pluriannuel d’investissement qui devait initialement accompagner la démarche.

Les collectivités intéressées  "sont libres du modèle de convention", sous réserve de respecter le cadre légal. Y compris sur la durée : "la convention de la délégation doit avoir une durée limitée mais elle reste renouvelable". Les modalités d’exercice des compétences déléguées (tout ou partie) sont elles aussi  "laissées à la liberté des parties à la délégation". Mais demeurent malgré tout "exercées au nom et pour le compte de l’autorité délégante", rappelle la note. L’exercice de la compétence déléguée ne doit pas nécessairement être uniforme d’une délégation à l’autre sur le territoire intercommunal. Ce choix est aussi "laissé à l’appréciation des parties ", sous le contrôle de l’EPCI de rattachement.
Sur les questions budgétaires, le traitement se fera en deux temps. Cela suppose d’abord de finaliser les mises à disposition et de clôturer les budgets annexes M49 des communes. Leur réintégration dans les budgets principaux des communes aura pour corollaire la dissolution de la régie ou le transfert du contrat de concession de délégation de service public à l’EPCI compétent. Une fois la délégation effective, il appartiendra au délégataire "d’ouvrir un budget annexe M49 sans autonomie financière afin d'isoler budgétairement la gestion de ces services publics industriels et commerciaux ‘au nom et pour le compte de’", indique la note.   

Prorogation des syndicats

Conséquence plus inattendue, le texte organise le maintien des syndicats existants, six mois suivant la prise de compétence, "soit jusqu'au 30 juin 2020 au maximum", pour permettre d’enclencher la délégation. Branle bas de combat dans les préfectures qui travaillaient depuis plusieurs mois à leur dissolution. Ce délai pourra être prorogé d’un an supplémentaire suite au positionnement du conseil communautaire sur le principe de la délégation durant cette transition. A défaut de délégation, en revanche, le syndicat sera bel et bien dissous ou verra ses missions réduites. Evidemment ceux qui n’entendraient pas bénéficier des dispositions de la loi ne seront pas maintenus contre leur volonté.

La note rappelle par ailleurs que le maintien des syndicats durant la période transitoire "ne s’assimile pas à une délégation de compétence et n’est pas encadré par un mécanisme conventionnel". Enfin, sur le fameux mécanisme de représentation-substitution - codifié au IV de l’article L. 5216-7 -, la note confirme son extension à la gestion des eaux pluviales urbaines pour les communautés d’agglomération "qui pourront ainsi se substituer à leurs communes membres au sein des syndicats exerçant cette compétence, au même titre que pour les compétences eau et assainissement des eaux usées".  

Transfert de l’état financier

Le transfert de compétence est désormais assorti de l’obligation pour la commune de transmettre (s'il existe) le schéma de distribution d’eau potable ainsi qu’un état financier de l’exercice de la compétence. Le texte prévoit également le transfert à l’EPCI du solde de trésorerie du budget annexe du service public d’eau, concomitamment au transfert de ces compétences, "si le schéma fait apparaître un taux de perte en eau supérieur au taux mentionné au deuxième alinéa du même article L. 2224-7-1". Jusqu'ici, la jurisprudence administrative (Conseil d’Etat, 25 mars 2016, "La Motte-Ternant") ne l'imposait pas. Un accord entre les représentants des communes et ceux de l'EPCI pouvait toutefois le prévoir. Une certaine souplesse de gestion subsiste néanmoins. La convention peut en effet prévoir "un transfert partiel de budget en fonction de l’état du réseau", souligne la note. 

Le dernier point abordé concerne  les indemnités des élus des syndicats. Ici pas de demi-mesure. Le texte revient purement et simplement sur les dispositions de la loi Notr (reportée une première fois par la loi du 23 mars 2016) en rétablissant le régime antérieur et en maintenant, au-delà de 2020, les indemnités de fonction des présidents et vice-présidents des syndicats de communes et des syndicats mixtes, dès lors que ces structures continuent d'exercer leurs compétences, y compris si leur périmètre est inférieur à celui d’un EPCI à fiscalité propre.