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Une offre de formation plus large dans les collèges de l'éducation prioritaire

Une étude de la direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance (Depp) du ministère de l'Éducation nationale analyse les offres de formation dans les collèges. Classes Ulis, Segpa ou encore sections linguistiques et sportives sont passées au crible. Les collèges de l'éducation prioritaire et urbains sont mieux pourvus que les établissements ruraux.

Dis-moi où tu habites, je te dirai quel enseignement tu recevras. Tel pourrait être le résumé de l'article "L’offre de formation des collèges dans les territoires", paru dans l'étude intitulée "Les territoires de l’éducation : des approches nouvelles, des enjeux renouvelés" et publiée le 30 juin par la direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance (Depp) du ministère de l'Éducation nationale. Où l'on apprend qu'il y a davantage d’offres de formation dans les collèges de l’éducation prioritaire que dans les autres.
Quand on parle d'offres de formation au collège, on distingue deux catégories. D'abord, les offres pour élèves à besoin particulier : dispositifs Segpa (section d’enseignement général et professionnel adapté, pour les élèves présentant des difficultés d'apprentissage importantes), Ulis (unité localisée pour l'inclusion scolaire, pour les élèves en situation de handicap) et UPE2A (unité pédagogique pour élèves allophones arrivants). Ensuite, les offres visant l'ensemble des élèves et proposant un enseignement bonifié via des options : section sportive ou linguistique, classe à horaires aménagés pour des enseignements artistiques, latin et grec ancien, etc.. Selon que l'on évoque l'une ou l'autre catégorie, la distribution sociale et géographique de l'offre diffère.

Élèves à besoin particulier

Segpa, Ulis et UPE2A sont plus fréquentes en éducation prioritaire. Les Segpa sont plus présentes dans les collèges urbains défavorisés et en outre-mer : 49,5% des collèges REP+ avaient une Segpa en 2019-2020, contre 21,1% des collèges publics hors éducation prioritaire. Seuls 2,8% se trouvent dans les 10% des collèges ayant un indice d’éloignement le plus élevé. En termes géographiques, la part des collèges avec Segpa par académie oscille de 9% à Paris à plus de 30% à Lille et en Corse.
Les Ulis sont présentes dans 63,5% des collèges REP+ et 50,5% des collèges publics hors éducation prioritaire. Une part en forte augmentation : en 2013-2014, seuls 25,3% des collèges publics hors éducation prioritaire avaient une Ulis. Ici encore, l'implantation urbaine domine : 2,9% des Ulis seulement se situent dans les 10% des collèges ayant un indice d’éloignement le plus élevé. On retrouve 30,2% de collèges avec Ulis dans l’académie de Rennes et 60,2% dans l’académie de Strasbourg.
Les collèges avec UPE2A présentent une situation plus marquée. Ils sont d'abord plus rares : seuls 14,9% des collèges sont concernés. Ils sont inégalement répartis sur le territoire : la part des collèges avec UPE2A est de moins de 10% dans huit académies situées dans l’ouest. Et comme les Segpa et les Ulis, on les retrouve dans les collèges les plus défavorisés : 30,7% des collèges avec UPE2A figurent parmi les 10% des collèges ayant l'IPS (indice de position sociale) le plus faible. Ils sont également plus urbains : 28,8% se situent dans les 10% des collèges ayant un indice d’éloignement le plus faible. On note enfin une évolution importante des classes pour élèves allophones : on est passé de 27,2% des collèges REP+ avec UPE2A en 2008-2009 à 58% en 2019-2020.

Options valorisantes

L'analyse des options valorisantes amène à la même constatation que pour les offres destinées aux élèves à besoin particulier : les collèges de l'éducation prioritaire sont mieux pourvus, ainsi que les établissements urbains. 
L'offre la plus répandue est ici la section linguistique, qui ne présente pas de clivage marqué sur un point : près de sept collèges publics sur dix ont une section linguistique, qu'ils se trouvent en REP+ ou hors éducation prioritaire. Le taux le plus élevé se situe en REP, avec une offre dans trois collèges sur quatre. En revanche, seuls 5,9% des 10% des collèges ayant un indice d’éloignement le plus élevé ont une section linguistique. 
Les sections sportives sont très présentes en éducation prioritaire : 47% des collèges REP+ et quatre collèges REP sur dix en proposent contre un tiers des collèges publics hors éducation prioritaire. Un constat que l'on retrouve pour les classes à horaires aménagés pour les enseignements artistiques, même si le nombre des établissements concernés est moins important : un collège de l’éducation prioritaire sur dix dispose d'une telle offre, contre 6,4% des collèges publics hors éducation prioritaire.

Aux collèges "favorisés" les langues rares

Assez répandue, la section bilangue présente elle aussi une distribution à l'avantage de l'éducation prioritaire : deux collèges sur trois en REP+ et 68,5% des collèges REP en possèdent, contre une moyenne nationale de 57,5%. Quant aux sections européennes, elles offrent un paysage très contrasté géographiquement : plus de six collèges sur dix de l’académie de Strasbourg en ont une, contre 1,1% des collèges dans l’académie de Limoges.
Cependant, les sections linguistiques et de langues et cultures de l’Antiquité se distinguent. Seuls trois collèges REP+ sur quatre en proposent, contre plus de neuf collèges publics sur dix hors éducation prioritaire. Les collèges dits "favorisés" et urbains sont surreprésentés parmi les 104 collèges proposant une section internationale et parmi les huit offrant une section orientale.
Alors, à qui profite cette course aux options ? Incontestablement, les collèges des territoires urbains dits "défavorisés" tirent leur épingle du jeu. La tentation du contournement de la carte scolaire chez certaines familles les incite à proposer des emplois du temps aussi attractifs que possible pour retenir les élèves. À l'inverse, l'absence de concurrence entre établissements dans les zones à indice d'éloignement fort explique sans doute qu'il soit moins nécessaire d'y proposer des options variées, les élèves étant "captifs" du seul collège de leur secteur. Le manque de moyens humains (enseignants spécialisés dans une spécialité rare) et matériels (équipements sportifs ou artistiques spécialisés) peuvent également expliquer l'offre moins importante dans les territoires ruraux.