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Habitat - Ventes de logements HLM : les bailleurs ne sont pas chauds

Dans son rapport d'activité 2013, la Miilos (Mission interministérielle d'inspection du logement social) consacre un développement de son chapitre sur la stratégie patrimoniale des organismes à un sujet sensible s'il en est : celui de la politique de vente les logements aux locataires. Cet aspect du rôle des bailleurs sociaux fait l'objet d'un objectif à atteindre, fixé par la convention d'utilité sociale (CUS) de chaque organisme. En outre, les articles L.443-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation font obligation aux organismes de délibérer chaque année sur leur politique de vente de logements. L'objectif de cette dernière est double : d'une part, permettre aux ménages modestes du parc social d'accéder à la propriété ; d'autre part, utiliser le produit de ces ventes pour reconstituer les fonds propres des organismes afin d'améliorer la capacité d'investissement dans les opérations neuves ou la réhabilitation.

La "forte réticence" des bailleurs persiste

Voilà pour la théorie. Mais la Miilos constate que la pratique est quelque peu différente. Son rapport relève en effet que "la forte réticence des bailleurs à s'engager dans cette politique persiste". Sur un échantillon de 98 établissements contrôlés en 2013 - pour lesquels une politique de vente est possible -, la moitié à fait le choix de ne procéder à aucune vente. Les raisons avancées sont constantes d'une année sur l'autre : position de principe du conseil d'administration ou de la collectivité de rattachement, difficultés liées au marché (tendu ou détendu), "conservatisme patrimonial", refus de vendre des logements collectifs (ce qui nécessite une gestion des copropriétés)...
A l'inverse, un organisme sur deux réalise des ventes à l'unité (proportion inchangée depuis trois ans), un sur trois vend plus de 10 logements par an et huit organismes de l'échantillon vendent plus de 50 logements par an. Ces derniers sont des ESH (entreprises sociales de l'habitat) filiales de groupes nationaux ou des offices détenant plus de 10.000 logements. Au final, sur les 22.000 logements commercialisables des 98 organismes de l'échantillon, moins de 1.700 ont été effectivement vendus en moyenne annuelle.

L'objectif de 1% de ventes annuelles "s'éloigne de plus en plus"

Conclusion de la Miilos : "l'objectif initial de vente de 1% du patrimoine locatif social par an, signé par les pouvoirs publics avec les fédérations professionnelles les 18 décembre 2007 et 20 février 2008, s'éloigne de plus en plus".
L'Union sociale pour l'habitat (USH), signataire de ces accords, n'a jamais caché ses réticences. Dans ses "Dix propositions pour sortir de la crise", publiées avant les présidentielles de 2012, l'USH affirmait n'être pas opposée au principe de la vente, mais réaffirmait "son refus strict et unanime du droit à l'achat de son logement social, en substitution d'un financement public des politiques du logement abordable" (voir notre article ci-contre du 20 janvier 2012). Une allusion à la volonté du gouvernement Fillon de promouvoir une autre politique économique du logement social.
Au-delà des débats idéologiques, la question est posée de l'intérêt économique, pour les organismes, de la vente de logements HLM. Sans apporter de réponse généralisable, le rapport de la Miilos fournit néanmoins un exemple intéressant. Celui d'un OPH du Nord, qui mène une politique de vente à l'unité - environ 150 ventes par an - en s'appuyant sur "une équipe dédiée professionnalisée". Avec une plus-value financière de 14 millions d'euros en 2012, ces ventes "constituent un apport significatif de fonds propres", permettant de financer des opérations d'investissement.

Attention aux dérapages !

Une politique de vente de logements, telle que prévue par le CUS, suppose toutefois de respecter toutes les obligations réglementaires en la matière. Sur ce point, la Miilos reprend sa casquette de contrôleur pour constater un certain nombre de manquements. La plupart sont relativement bénins et relèvent plutôt de négligences de gestion. Mais le rapport relève aussi "une irrégularité grave [...] dans un office de taille moyenne de l'Ouest Sud-Ouest". Sans saisine du conseil d'administration sur un risque de conflit d'intérêt, ni respect des règles de publicité, "trois ventes ont été réalisées au profit de salariés de l'organisme, dont un est membre de la famille du directeur général"...

 

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