L’action de la Banque des Territoires dans le programme Territoires d’industrie : quel premier bilan après 5 ans ?

Lancé en 2018, le programme Territoires d’industrie participe au renforcement de la politique industrielle en France. La Banque des Territoires est un des acteurs majeurs de ce programme. Après 5 ans, un premier bilan de son action vient d’être réalisé.

La France et l’industrie ont une longue histoire, mouvementée. L’emploi industriel connaît son apogée en 1974, avec près de 5,4 millions d’actifs(1) dans ce domaine, soit près du quart du total des emplois dans le pays. Mis à part quelques années d’embellie à la fin des décennies 1980, 1990 et 2010, le pays connaît une dynamique de désindustrialisation très forte. A tel point qu’entre 1974 et 2018, les filières industrielles ont perdu près de la moitié de leurs effectifs pour atteindre quelque 2,5 millions d’emplois sur le territoire. 

Dès les années 2010, l’État s’empare du sujet de l’industrie avec la volonté d’avoir une politique de filière industrielle, couplée à une politique territoriale pour redynamiser ce secteur. C’est dans ce cadre que le Premier Ministre présente en novembre 2018 le programme « Territoires d’industrie » dans le cadre de sa politique industrielle, avec l’objectif de renforcer la compétitivité industrielle, stimuler l’innovation et favoriser le développement des territoires.

La Banque des Territoires a décidé de s’impliquer, tout comme 6 autres opérateurs nationaux (l’ADEME, Action Logement, l’APEC, Bpifrance, Business France et Pôle Emploi), dans ce dispositif aux côtés de l’État et des collectivités. 

Dans le cadre de ce programme, la Banque des Territoires propose trois types de services : 

Initialement, la Banque des Territoires s'était engagée à hauteur de 26 millions d’euros de crédit d'ingénierie et 100 millions d’euros par an d’investissement en fonds propres sur 4 ans. La crise sanitaire apparue en 2020 ayant fragilisé le tissu industriel français, elle a renforcé et élargi son action dans le cadre de son plan de relance, en dédiant à la relance industrielle 1 milliard d’euros d’ici 2024. Le 11 mai 2023, elle s’est engagée à investir de nouveau 1 milliard d’euros sur les 5 prochaines années. 

En soutenant les collectivités, opérateurs, et industriels, la Banque des Territoires participe activement à la dynamique de redynamisation territoriale à travers des secteurs clés tels que l'aménagement foncier, l'immobilier industriel, la mobilité, l'efficacité énergétique, la couverture numérique, et l'adaptation des compétences.

 

Mesurer l’impact de l’action de la Banque des Territoires  

« Au sein de la Banque des Territoires, nous avons souhaité mesurer la pertinence de notre action sur le programme Territoires d’industrie, son efficacité et sa mise en œuvre, précise Julien Garnier, Directeur de projet évaluation extra-financière à la Caisse des Dépôts. Cette évaluation in itinere concordait avec la fin du premier temps du programme, nous avions besoin de ce moment de réflexion » précise Julien Garnier.

Cette évaluation, réalisée au cours de l’année 2022 par les cabinets Planète Publique et Roland Berger, s’est articulée autour de trois axes principaux :

  • évaluer la pertinence du programme Territoires d’Industrie ;
  • cibler l’efficacité du dispositif au sens de sa mise en œuvre et de ses réalisations ;
  • mesurer l’efficacité du dispositif entendu au sens de la mesure des impacts et dans le but de renforcer son utilité sociale. Ce dernier point prévoyait également la mesure de l’impact environnemental des projets. 

« Il est important de préciser que cette étude ne nous donne qu’une idée et qu’il est encore un peu tôt pour mesurer l’intégralité des retombées de nos actions, précise Benoît Lepesant, Responsable de projets Territoires d’industrie à la Banque des Territoires. Cependant, les enseignements que nous en tirons sont plutôt positifs, avec quelques axes d’amélioration tout de même. »

Parmi les points de satisfaction ? La pertinence de l’intervention de la Banque des Territoires, et le fait qu’elle soit bien identifiée en tant qu’acteur clé du programme de stratégie industrielle. La majorité des parties prenantes interrogées ont considéré que l’offre répondait aux besoins des territoires, notamment sur la question du foncier, des stratégies industrielles et de la formation. 

Le rôle facilitateur de la Banque des Territoires dans l’émergence des projets est également souligné. Ce fut notamment le cas sur le projet d’école de production qui a vu le jour à Cholet, dans la région des Pays de la Loire, avec le financement d’un établissement de formation industrielle.

 

Accompagner la création d’un pôle de formation technique

En février 2020, l’agglomération du Choletais a signé un protocole d’accord « Territoires d’industrie » avec plusieurs acteurs, dont le Conseil régional des Pays de la Loire, et la Banque des Territoires. L’objectif était de définir des actions pour le développement industriel du territoire, avec entre autres, la création d’une école de chaudronnerie. Ce projet répond à deux enjeux majeurs : proposer une formation industrielle de qualité aux jeunes en décrochage scolaire, et répondre aux besoins du secteur en termes de main-d’œuvre qualifiée.

Pour que l’école puisse voir le jour, la Banque des Territoires a apporté un prêt subordonné à 2 % sans intérêt participatif à hauteur de 100 000 euros. Contractualisée en juin 2020, l’école de production a ouvert ses portes en septembre 2022 dans les locaux de la CCI à Cholet. L’établissement propose un CAP en chaudronnerie en deux ans, et un Bac Pro dans la continuité de ce premier temps de formation.

« Le financement de la Banque des Territoires est absolument indispensable, parce que c’est elle aujourd’hui qui me permet de faire tourner l’école de production. Elle a été présente à toutes les étapes du projet, et a toujours été force de proposition. »

Antoine BEAUSSANT, Président de l’Institut de Formation Technique de l’Ouest, Cholet

Une étude co-financée pour maintenir la filière automobile des Hauts-de-France

L’évaluation de l’action de la Banque des Territoires a également permis de mettre en avant le rôle d’accélérateur joué par l’institution dans la mise en œuvre de projets du programme. Son implication dans la réalisation d’une étude sur la filière automobile dans les Hauts-de-France en est un exemple concret. Elle a en effet cofinancé une étude avec le Conseil Régional portant sur la filière automobile et a permis de définir une feuille de route stratégique pour ce secteur industriel. 

Avec 30 % de la production nationale réalisée dans la région, et la présence de trois constructeurs mondiaux (Renault, Toyota et Stellantis), les Hauts-de-France sont le leader national de l’industrie automobile : la filière emploie actuellement plus de 55 000 personnes. Au regard de ces chiffres, ce secteur revêt une importance considérable dans le tissu industriel régional. 

Mais, face aux mutations technologiques et économiques auxquelles est confrontée l’industrie automobile, la Région a souhaité réaliser une étude pour définir de nouvelles orientations stratégiques, afin de conserver sa position pour les années à venir. 
Les exigences de réduction des émissions, liées notamment aux objectifs de transition écologique et aux nouveaux modes de consommation de la mobilité, ont mis à l’épreuve le modèle économique des principaux acteurs, tout en les poussant à réaliser de lourds investissements. Il était indispensable de faire un état des lieux des bouleversements de l’industrie automobile, notamment liés à l'électrification du marché. 

La Direction régionale des Hauts-de-France de la Banque des Territoires a ainsi conclu un partenariat avec le Conseil Régional pour financer la moitié de cette étude à hauteur de 60 000 euros.

« La région des Hauts-de-France est la première région de France en matière d’automobile, et nous devons toutes et tous continuer à travailler pour qu’elle reste demain encore la première région de France. Grâce à cette étude co-financée par la Banque des Territoires, nous avons à disposition les clés pour relever ce challenge. »

Rodolphe DELAUNAY, Président de l’ARIA Hauts-de-France

Territoires d’industrie : lancement du “Temps II”

Annoncé en mai dernier par Emmanuel Macron, le temps II du programme Territoires d’industrie poursuit les avancées du premier volet et renouvelle son offre de services, en mettant l'accent sur l'ingénierie pour accompagner plus de 2 000 projets identifiés en faveur du développement industriel. En parallèle, la Banque des Territoires souhaite renforcer son action, sur les sujets tels que le foncier, l’industrie verte, et la formation. « Nous avons pris en compte les recommandations de l’évaluation, qui encouragent la poursuite de l’accompagnement et du financement dans le domaine du foncier. Nous avons ainsi élaboré une doctrine sur les exigences environnementales liées à l’immobilier. Globalement, il y a une réelle prise en compte de ces recommandations, qui sont traduites par de nouvelles orientations stratégiques », poursuit Benoît Lepesant. 

Par exemple, la Banque des Territoires financera à hauteur de 200 millions d’euros chaque année pendant 5 ans le soutien à la réindustrialisation du pays à travers la transition vers une industrie décarbonée, en s’inscrivant dans le cadre du projet de loi Industrie Verte. 

« Au-delà de l’évaluation et du premier bilan que nous avons pu tirer de notre action, il est important de souligner que la thématique industrielle est de plus en plus stratégique. C’est pourquoi la volonté de la Banque des Territoires est de poursuivre son engagement dans ce domaine », conclut Julien Garnier.

Julien Garnier 

Directeur de projet évaluation extra-financière 

Julien Garnier est titulaire d'un doctorat (IUE à Florence) et a enseigné l’économie dans diverses écoles et universités. Après une première expérience à la DG Trésor, il rejoint la Caisse des Dépôts en 2009. Il travaille depuis 2018 dans le département des finances de la Banque des Territoires. 

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Benoit Lepesant 

Responsable de projets Territoires d’industrie 

Benoît Lepesant est diplômé de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, de l’École d’Urbanisme de Paris et de l’École Nationale des Ponts et Chaussées. Il a travaillé 8 ans à l’ADEME principalement sur le secteur du transport et de la mobilité, avant de rejoindre la Caisse des Dépôts, où il a occupé le poste de directeur de projets transition écologique et énergétique. Il est désormais responsable de projets Territoires d’industrie au sein de la Direction de l’investissement de la Banque des Territoires. 

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(1) Source : Rapport parlementaire - Les politiques industrielles en France (nov. 2020) https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2020-rapport-politique_industrielle-novembre.pdf