Gœulzin gagne son autonomie énergétique avec sa microcentrale hydroélectrique (59)

Après avoir réduit sa consommation électrique en rénovant l'intégralité de son éclairage public, le petit village de Gœulzin a équipé sa chute d'eau d'une roue à aubes. Trois ans après la mise en service de cette microcentrale hydroélectrique, la mairie dresse le bilan : près de 70 000 euros sont économisés chaque année et une énergie renouvelable locale valorisée. L'expérience pourrait être dupliquée dans de nombreuses communes, qui disposaient toutes autrefois de moulins à eau !

« La microcentrale – nous l'appelons la picocentrale ou le moulin - est devenue l'emblème de notre commune », se réjouit Francis Fustin, maire depuis 2014 de la petite commune de Gœulzin, en périphérie de Douai, dans le département du Nord. Retraité du secteur bancaire, l'élu a tout naturellement commencé par analyser l'équilibre de son budget communal à son arrivée. « Hormis les frais de personnel, notre principale dépense concernait l'énergie. » C'est la lecture d'un rapport du Sénat et de la commission de régulation de l'énergie qui a achevé de le convaincre qu'il devait agir sur ce plan : « Ce rapport parlait d'un doublement entre 2011 et 2023 du prix du kWh. Il voyait juste sur la tendance, sauf que le prix a finalement été multiplié par six ! »

Limiter la consommation avant de produire

Sur les 158 000 kWh consommés en 2014 par la petite mairie du Nord, 70 % étaient utilisés pour l'éclairage public, le solde alimentant les équipements municipaux : cantine, école, mairie. De 2016 à 2018, la mairie entreprend un programme de rénovation complète de son éclairage. Elle parvient ainsi à réduire la consommation de 60 %. C'est à la même époque que le maire lance les premières études sur la réalisation d'une microcentrale électrique. « Les calculs nous disaient que notre chute de 3 mètres pouvait produire 96 000 kWh par an, soit l'équivalent de nos besoins, une fois notre éclairage public rénové. Le retour sur investissement se faisait en six ans : le conseil municipal a voté le projet, même s'il représentait alors 37 % de notre budget annuel ! »

Une roue à aubes plutôt qu'une turbine

Le choix de la commune s'est porté sur une roue à aubes plutôt qu'une turbine, « plus productive mais plus fragile ». Le « droit d'eau » (voir encadré) étant acquis pour utiliser la force motrice de la rivière, il ne restait plus qu'à obtenir le permis de réaliser l'aménagement, permis qui n’est délivré qu'au cas par cas par la préfecture. « Ça nous a pris 3 ans ! Ça a finalement été la plus grosse difficulté rencontrée dans ce projet », rapporte le maire. Le projet de microcentrale hydroélectrique en autoconsommation collective était alors une première en France et l'administration, engagée pour restaurer la continuité écologique des cours d’eau, a tardé à accorder son autorisation. La mairie a finalement obtenu le permis et installé son équipement en février 2021. « Au départ, nous l'éteignions le week-end pour des raisons acoustiques : en 2021, nous avons ainsi produit 61 MWh, couvert la moitié de nos besoins et produit 20 % de surplus reversé dans le réseau électrique. »

Perfectionnement du dispositif pour atteindre l'autonomie énergétique

En 2022, la mairie a isolé sa microcentrale en posant un caisson acoustique qui limite l'impact sonore subi par trois maisons proches de l'installation. Dès 2023, la microcentrale, qui fonctionne désormais en permanence, a produit 75 MWh, couvert 80 % des besoins communaux et produit 35 % de surplus. « Cependant, nous constations toujours une forte baisse de la production sur le dernier trimestre de l'année, au moment de la chute des feuilles des arbres qui bordent notre rivière », explique le maire. En novembre 2023, la mairie a donc équipé l'installation d'un dégrilleur : un laser repère l'encombrement éventuel par les feuilles et une griffe vient automatiquement les retirer en cas de présence. « Désormais, comme une horloge parfaitement réglée, nous produisons 250 kWh par 24 heures, soit les 96 000 kWh annuels promis par les calculs initiaux. » Si la mairie a signé un contrat électrique assurant le relais automatique en cas de besoin, elle ne l'a pas utilisé sur la dernière année. « Nous avons atteint l'autonomie et économisons ainsi 66 000 euros par an ! » Le retour sur investissement aura finalement été de trois ans au lieu des six initialement prévus, compte tenu de la hausse du prix de l'électricité !

30 000 chutes d'eau aptes à être équipées

La réalisation pionnière de Gœulzin a reçu en 2022 le Grand Prix des maires dans la catégorie Environnement et énergie. Francis Fustin ne cesse désormais de répondre aux demandes d'information : une cinquantaine de maires l'ont sollicité, il est aussi intervenu auprès des maires ruraux du Nord. « On sent que ça démarre, deux communes proches ont des projets bien avancés. Et le potentiel est énorme : chaque commune avait son moulin il y a cent ans et la plupart des chutes pourraient être équipées. » S'il a essuyé les plâtres, l'édile conseille aujourd'hui à tous de tenter l'aventure : « Il faut d'abord arrêter les calculs techniques qui sont relativement simples, puis surtout ne rien lâcher en cas de difficulté à obtenir les autorisations administratives. On finit par gagner, pour le bien de nos administrés et de notre territoire ! »

Le droit d'eau

Le droit d'eau, c'est la capacité à dériver l'eau d'un cours d'eau pour user de sa force motrice. Accordé depuis 1789 aux moulins et installations hydroélectriques, le droit d'eau est attaché au génie civil du bien. À partir du moment où il est aujourd'hui physiquement encore possible sur le site d'utiliser la force motrice de l'eau, le droit d'eau persiste généralement. (En savoir plus : Services de l'État dans le Pas-de-Calais).

 

En quelques chiffres

  • 162 000 euros : coût de la rénovation totale de l'éclairage public menée de 2016 à 2018, subventionnée à 50 % par l’État (TEPCV) et 25 % par les fonds de concours de Douaisis Agglo
  • 408 000 euros HT : coût global de la microcentrale hydroélectrique + structure acoustique + dégrilleur
  • Le projet global de microcentrale a été subventionné à hauteur de 290 000 euros, soit 71 % du coût total. Le Fonds régional d'amplification de la troisième révolution industrielle a apporté 40 % de ce montant, les fonds de concours de Douaisis Agglo 56 % et le département du Nord 5 %. La mairie a autofinancé 26,5 % du projet, soit 118 000 euros
  • 96 000 MW sont produits par an, ce qui couvre les besoins électriques municipaux
  • 66 000 euros sont ainsi économisés annuellement sur le budget municipal
  • 3 tonnes équivalent CO2 d'effet de serre sont évitées chaque année grâce à l'installation

Commune de Gœulzin

Nombre d'habitants :

1042
rue Marteloy
59 169 Gœulzin
secretariat@mairie-goeulzin.fr

Francis Fustin

maire@mairie-goeulzin.fr

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