Accessibilité : le guichet du fonds territorial sera ouvert en novembre

L’État cofinancera les projets de mise en accessibilité des bâtiments des collectivités à hauteur de 100 millions d’euros par an, dans le cadre des dotations d’investissement. Les collectivités "les plus fragiles financièrement" seront priorisées en 2024 via le fonds territorial d’accessibilité́, qui bénéficiera surtout aux petits commerces, restaurants et cabinets médicaux du quotidien. Présidant un comité interministériel du handicap le 20 septembre 2023, la Première ministre a précisé à chaque ministre concerné sa feuille de route en matière de handicap et d’inclusion, avec une attention particulière sur les transports, à dix mois des Jeux olympiques et paralympiques. Une première répartition régionale des crédits relatives aux 50.000 nouvelles solutions médico-sociales a été indiquée. Est également annoncée l’arrivée prochaine d’équipes médicosociales dans les écoles de territoires préfigurateurs. 

Cinq mois après la Conférence nationale du handicap (voir notre article du 27 avril 2023), un comité interministériel du handicap (CIH) a été présidé le 20 septembre 2023 par la Première ministre dans les locaux de la SNCF à Saint-Denis, en conclusion des universités d’été du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Par ce choix, le but de l’exécutif était de marquer sa volonté de "coconstruire" les politiques avec cette instance qui porte la voix des personnes handicapées, de leurs familles et des acteurs du secteur et qui vient juste d’être renouvelée dans un nouveau format (voir notre encadré ci-dessous).

Ce CIH avait pour objectif de "traduire de façon opérationnelle" les annonces du chef de l’État, avec notamment des "feuilles de route" - qui figurent dans le dossier de presse - pour les ministères des Sports, des Collectivités territoriales et de la Ruralité, des Transports, du Logement, de l’Économie, des Petites et Moyennes Entreprises, de la Justice, de la Culture, de la Transformation et de la Fonction publiques, du Travail, de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur, de la Santé, de l’Égalité femmes-hommes et de la Lutte contre les discriminations, et, bien sûr, des Solidarités et des Personnes handicapées.

Paris 2024 : dix mois pour accélérer sur l’accessibilité

À moins d’un an des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 et malgré des retards importants, le gouvernement entend aussi afficher sa détermination sur le terrain de l’accessibilité. Élisabeth Borne a ainsi signé avec la RATP, la SNCF, le Groupe ADP (Aéroports de Paris) et Île-de-France mobilités un "plan d’actions pour renforcer l’accessibilité des transports" dans la perspective des Jeux, avec dix mesures prioritaires – portant sur le métro, l’information, l’assistance et la coordination des différents opérateurs, les équipements en gare, les aéroports, les taxis - à mettre en œuvre dans les dix prochains mois. "L'État renforcera la collecte des données sur l'accessibilité et accompagnera les collectivités au déploiement d'AccèsLibre Mobilité, afin que ces données puissent à terme être utilisables par les applications de navigation", peut-on lire dans le dossier de presse du gouvernement.  

L’accélération sur l’accessibilité passera également par le fléchage de 100 millions d’euros, en 2023 et 2024, vers les territoires qui accueilleront les Jeux olympiques et paralympiques. Soit Paris et une partie de l’Île-de-France, Lille, Bordeaux, Nantes, Lyon, Saint-Étienne, Nice, Marseille et Tahiti. Ces 100 millions seront issus du "fonds territorial pour soutenir l’accessibilité des petits commerces et des établissements de la vie quotidienne", doté en tout de 300 millions d’euros sur cinq ans et qui sera "opérationnel pour les entreprises dès novembre", selon la Première ministre. Cela se traduira par l’ouverture d’un "guichet FTA" (fonds territorial d’accessibilité).

Une cible de 100 millions par an pour co-financer les projets des collectivités

"Cet engagement s’inscrit dans la déclinaison opérationnelle de l’engagement du président de la République d’investir 1,5 milliard d’euros pour l’accessibilité", précise Matignon. Selon le dossier de presse, 500 millions d’euros, soit un tiers du total, serviront à "cofinancer les projets des collectivités" de mise en accessibilité des bâtiments – avec également sur les bâtiments, 210 millions d’euros pour l’État et les universités et, donc, les 300 millions pour les ERP (établissements recevant du public) privés de cinquième catégorie (petits commerces, cafés et restaurants, cabinets médicaux). Le reste de l’enveloppe est partagé entre 430 millions d’euros pour les transports et 60 millions d’euros "pour rattraper le déficit d'accessibilité des démarches et sites internet publics".  

Pour les collectivités, les dotations d’investissement seront donc débloquées à hauteur de 100 millions d’euros de co-financement par an, pendant cinq ans. Cela dans le cadre du droit commun – dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) –, "au sein des enveloppes prévues dans le projet de loi de finances". Annoncée pour février 2024, la prochaine circulaire annuelle relative aux dotations d’investissement "invitera les préfets à prioriser pour 2024 la mise en accessibilité des bâtiments publics des collectivités territoriales". Il est indiqué par ailleurs qu’une priorité sera donnée en 2024 à "la mise en accessibilité des bâtiments des collectivités les plus fragiles financièrement dans le cadre du fonds territorial d’accessibilité". Est-ce à dire que les collectivités pourront solliciter le "guichet FTA" qui ouvrira en novembre ?

Suite à la signature de la charte d’engagement sur l’accessibilité signée entre l’État, l'Association des maires de France, Départements de France, Régions de France et France urbaine, une programmation permettant de décliner les engagements était prévue, avait présenté Emmanuel Macron le 26 avril dernier lors de la CIH. Matignon renvoie aux contrats de plan État-régions sur le volet transports mais ne mentionne pas d’outil plus global de programmation. "Les bâtiments de l’État, des opérateurs publics et de la Sécurité sociale seront rendus accessibles d'ici 2027", s’engage pourtant le gouvernement dans le dossier de presse. On trouve dans ce dernier un point d’étape en ce qui concerne les engagements de l’État.    

Solutions médicosociales : "Toutes les régions verront leurs crédits augmenter d’au moins 7%" 

Dans le cadre de ce CIH, des précisions ont également été apportées sur les "50.000 solutions médico-sociales" nouvelles qui avaient été annoncées par le président de la République. Destinées à "réduire les tensions sur les territoires les moins dotés (comme les départements d’Outre-Mer ou ceux de la
région Île-de-France)
", ces solutions permettront d’accompagner notamment des personnes polyhandicapées, des personnes avec trouble du spectre de l'autisme, des enfants relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE), des personnes handicapées vieillissantes, de jeunes adultes vivant en établissement pour enfants et des personnes avec un handicap psychique.

Figure dans le dossier de presse une carte présentant une première projection de la répartition des moyens, évalués à 1,5 milliard d’euros d’ici 2030. "Toutes les régions verront leurs crédits augmenter d’au moins 7%" et la hausse "sera de plus de 10% pour les régions Île-de-France, Hauts-de-France et Occitanie, et jusqu'à plus de 20% pour les outre-mer", est-il indiqué. Annoncée pour l’automne 2023, "une circulaire ministérielle précisera les crédits alloués par région et les conditions de déploiement de ces solutions".

Déployer des équipes médicosociales dans les écoles

Concernant l’école inclusive, l’une des "prochaines étapes" du gouvernement est de permettre à des équipes médicosociales – 3.000, selon l’objectif annoncé – de se déployer dans des écoles pour faciliter le quotidien des enfants ayant des besoins d’accompagnement et des familles. "On a besoin de professionnels, d'experts au sein de l'école pour venir en appui des équipes éducatives et pédagogiques", a expliqué Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées, lors d’une conférence des universités d’été du CNCPH. "Dix territoires volontaires" n’ayant pas de problème d’attractivité des métiers vont préfigurer cette réforme, selon l’ancienne présidente de la commission des affaires sociales de l’Assemblée. 

C’est en partie l’objet de la mission Haussoulier-Carrasco qui doit identifier "100 sites pilotes" sur ce sujet, mais qui porte également sur la coordination des interventions pour les enfants handicapés relevant de l’ASE et sur le transport scolaire des enfants handicapés. Le rapport doit être rendu en février 2024.

Le dossier de presse mentionne également la création d’un "nouveau métier d'assistant à la réussite éducative". Ce dernier permettrait "aux accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) qui le souhaitent d'avoir un emploi à temps plein à 35 heures, en complétant leur temps de travail par de nouvelles missions".

  • Un nouveau CNCPH portant davantage la voix des personnes handicapées dans leur diversité

Sous l’impulsion de son président Jérémie Boroy, qui a été renouvelé le 31 août dernier pour un second mandat par Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes handicapées, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) a vu sa composition évoluer. Les associations représentant les personnes handicapées composent désormais 60% du Conseil, d’où la désignation de nombreuses associations très diverses – par exemple Dyslexiques de France, France Acouphènes et Éloquence de la différence. 39 membres ont été désignés dans ce premier collège et 39 autres membres le seront après un deuxième appel à candidatures. Le collège des associations de familles représente 20% du Conseil (26 sièges, pourvus). Il reste donc 20% pour le collège des "parties prenantes", soit 26 sièges dont trois sièges pour l’Assemblée nationale, le Sénat et le Conseil économique, social et environnemental (Cese), trois sièges pour l’AMF, Départements de France et Régions de France, 10 pour les organisations syndicales et 10 pour les "organisations professionnelles intervenant dans le champ du handicap". Ces dernières – dont l’Uniopss, l’Unccas, l’Union nationale ADMR, la Fehap, la Croix-Rouge française, des associations et fédérations spécialisées du handicap… – étant nombreuses, 20 ont été désignées pour le moment, avec une répartition "à venir" entre 10 titulaires et 10 suppléants… Une répartition qui donne, semble-t-il, du fil à retordre au nouveau CNCPH.

Au moment de l’annonce de son maintien à la présidence de l’instance consultative, Jérémie Boroy, qui lui-même est sourd, avait commenté : "Le CNCPH doit être à l’image de notre société, c’est-à-dire : divers et diversement représenté. Je salue donc la volonté des membres du Conseil de se conformer aux recommandations de l’ONU en donnant une plus forte place aux personnes en situation de handicap."

 

 

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