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Marchés publics - Délai de consultation : les candidats doivent disposer du temps nécessaire pour préparer leur offre

Dans un arrêt du 11 juillet 2018, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le délai de remise des offres. Même si ce délai, imposé par l’article 43 du décret Marchés publics, est respecté par le pouvoir adjudicateur, il doit nécessairement tenir compte de la complexité du marché et du temps nécessaire aux candidats pour présenter une offre.

En l’espèce, la communauté d’agglomération du Nord Grande-Terre avait lancé une procédure de passation pour l’attribution d’un marché de transports scolaires. Candidates évincées, les sociétés Transports du Centre (STC) et Compagnie guadeloupéenne de transports scolaires (CGTS) ont saisi le juge du référé précontractuel du tribunal administratif (TA) de la Guadeloupe. Ce dernier a fait droit à leur demande, annulant la procédure de passation pour les lots auxquels elles avaient respectivement candidaté (lots 1, 2, 3, 5 et 13 pour la STC et lots 4, 6, 7, 8 et 9 pour la CGTS). Suite à ces ordonnances, la communauté d’agglomération a saisi le Conseil d’État d’un pourvoi en cassation.
L’article 43 du décret Marchés publics prévoit que "l'acheteur fixe les délais de réception des candidatures et des offres en tenant compte de la complexité du marché public et du temps nécessaire aux opérateurs économiques pour préparer leur candidature et leur offre". L’article 67 de ce même texte fixe, pour les procédures d’appel d’offres ouvert, un délai minimal de consultation de 35 jours à compter de la date d’envoi de l’avis du marché et de 30 jours en cas de transmission des offres par voie dématérialisée. En l’espèce, la collectivité d’agglomération avait prévu un délai de 34 jours pour les offres remises par voie électronique. Ce délai était donc supérieur au délai légal minimum.
Malgré cela, le juge du TA avait annulé l’ensemble des lots en litiges. Il avait effectivement considéré que ce délai "était insuffisant pour permettre aux candidats de passer une commande de véhicules avec une date de livraison ferme en Guadeloupe" et que cela était donc de nature à "empêcher certains candidats d’obtenir la note maximale sur le critère de l’âge du véhicule".
En effet, le règlement de la consultation prévoyait que 20 points seraient attribués en fonction de l’âge des véhicules et "qu’une proposition ne comportant pas de véhicules neufs, ou de deux ans maximum, recevrait une note substantiellement inférieure à celle d’une proposition remplissant ce critère".
Toutefois, le Conseil d’État n’a pas suivi ce raisonnement et a annulé les ordonnances du TA, ce dernier ayant annulé la procédure de passation de tous les lots alors que le délai de consultation n’était pas toujours manifestement insuffisant.

L’influence du délai de consultation sur la qualification d’offre inappropriée

Sur le fond, les juges de cassation ont analysé les lots un par un. La collectivité avait considéré que les offres étaient inappropriées et le Conseil d’État a donc vérifié si cette qualification était liée au délai de consultation, jugé insuffisant par les sociétés évincées.
Pour rappel, une offre inappropriée est une offre qui n’est pas en mesure de répondre aux besoins de l’acheteur tels qu’exprimés dans le règlement de la consultation. Le besoin de la collectivité reposait ici sur la fourniture de véhicules scolaires. L’article 5.3.1 du règlement de consultation prévoyait à ce titre que les candidats justifient de leurs moyens en matériels roulants nécessaires et que, "dans le cas de véhicules en commande, cette justification doit être apportée par une facture ou un bon de commande".
Pour les lots 1 et 5, la collectivité avait jugé que les offres étaient inappropriées car le bon de commande comportait, à propos de la date de la livraison, la mention "sous réserve". Le Conseil d’État a pour sa part considéré que cette mention ne rendait pas à elle seule les offres inappropriées.
En revanche, pour le lot n°3, le bon de commande fourni ne comportait aucune date de livraison. Le Conseil d’État a ici jugé que, compte tenu que la société avait réussi à obtenir des dates de livraison pour les lots 1 et 5, le délai de consultation, bien que supérieur au délai minium légal, ne saurait être considéré comme manifestement inadapté à la présentation d’une offre en bonne et due forme.
Le Conseil d’État a donc annulé les ordonnances du TA ainsi que la procédure de passation au stade de l’examen des offres pour les lots 1 et 5.

Référence : CE, 11 juillet 2018, n° 418021
 

 

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