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Deux ans après, quel bilan pour l'ANCT ?

Si en deux ans, l'Agence nationale de la cohésion des territoires est parvenue à dissiper les principaux doutes à son encontre, sa déconcentration ne serait pas aboutie, indique un rapport de l'Inspection générale de l'administration qui recommande de faire du préfet de département le "véritable pilote". Sans oublier l'échelon régional (où sont concentrées les principales sources de financement), qui serait encore trop peu impliqué.

Deux ans après son lancement officiel le 1er janvier 2020, les doutes concernant l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) se sont en grande partie dissipés. C’est le constat de l’Inspection générale de l’administration (IGA) dans un rapport intitulé "L’ANCT : l’État déconcentré au service de la cohésion des territoires", remis à la ministre de la Cohésion des territoires en décembre et récemment mis en ligne. Ayant parcouru seize départements de dix régions, l’IGA observe que les collectivités n’ont pas encore une "connaissance précise" de l’agence née de la fusion entre le CGET, Epareca et l'Agence du numérique, mais qu'elles la perçoivent comme un "retour de l’État sur les questions d’aménagement du territoire" et "apprécient le repositionnement de son action sur des fonctions d’appui et de conseil aux projets de territoires". Ce qui constituait à l’origine "un véritable défi". Les nouveaux programmes proposés (Action cœur de ville, Petites villes de demain, France services…) ont montré leur "pertinence" dans des intercommunalités et communes "qui avaient du mal à dégager des moyens pour élaborer un projet de territoire". Le rapport loue aussi une "gouvernance locale mieux structurée", à travers les comités locaux de cohésion du territoire, une "simplification du paysage contractuel" avec les contrats de relance et de transition écologique (CRTE).

Une déconcentration non aboutie

L’organisation territoriale de l’agence repose sur deux niveaux : le siège, sorte de guichet unique entre l’État et ses opérateurs sur les besoins d’ingénierie, et le préfet de département délégué territorial en "tiers de confiance" au niveau local. Mais selon l'IGA, elle n’est "pas aboutie" : le processus de déconcentration "n’a pas été mené jusqu’à son terme". L’IGA relève plusieurs imperfections et paradoxes. Par exemple, le lien direct entre le siège et les départements conduit à contourner l’échelon régional "alors que c’est celui où sont coordonnées les différentes sources de financement des projets de territoire et l’action des grands opérateurs nationaux, partenaires de l’ANCT (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, Banque des Territoires, Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement...)". C’est aujourd’hui l'une des principales difficultés des CRTE.

Des trois missions de l’agence, la mise en place d’une ingénierie technique "sur mesure" en serait aujourd’hui au stade le moins avancé, le calendrier contraint ayant conduit à privilégier la contractualisation (CRTE) et les programmes nationaux, estime l'IGA. Ce retard s’explique aussi par la concentration des crédits d’étude au niveau du siège. Le rapport pointe aussi le "sur mesure" qui n'a pas permis de mettre fin à la logique d'appels à projets et d'appels à manifestation d'intérêt.

Le préfet de département "doit être le véritable pilote"

"Il s’agit de rappeler en premier lieu que l’ANCT, c’est d’abord l’État déconcentré sur les territoires, et de proposer les mesures de nature à conforter un processus de déconcentration au niveau départemental qui n’a pas été jusqu’à son terme et de redonner une place au niveau régional", plaident ainsi les inspecteurs qui formulent 19 recommandations. Le préfet de département "doit être le véritable pilote" et disposer des moyens adéquats. Le rapport demande de pérenniser les emplois de "sous-préfets à la relance" en leur confiant l’accompagnement du développement local et de la transition écologique. Il suggère de déconcentrer les crédits d’appui à l’ingénierie de l’ANCT au délégué territorial, à l’instar des autres crédits de l’État consacrés au développement local (DETR, DSIL, DSID et FNADT) et de ceux de l’Anah et de l’Anru. Le délégué territorial devrait être amené à gérer le marché à bons de commande de l’ANCT en matière d’ingénierie, en lieu et place du siège. Il doit devenir le "relai incontournable de la mise en œuvre des programmes nationaux vis-à-vis des collectivités locales sur son territoire". À cet égard, l’ANCT doit proposer une "boîte à outils" et éviter d’imposer des cahiers des charges trop précis, poursuit l'IGA.

Réintégrer l'échelon régional

Mais à côté du département, l’organisation territoriale de l’agence doit aussi pleinement réintégrer l’échelon régional qui a été "progressivement perdu de vue". "C’est avec le conseil régional que sont négociées les contractualisations les plus structurantes (contrat de plan, contrats interrégionaux de bassins et massifs)", rappelle le rapport, alors que les conseils régionaux ne disposent que d'un siège au conseil d'administration de l'agence. À l’exception des Territoires d’industrie, les régions ont été peu impliquées dans les différents programmes nationaux. Le rapport recommande la création d’un "comité régional des financeurs" qui aurait un rôle clé dans le financement de projets des CRTE, et de "confier au niveau régional le suivi territorial des conventions signées entre l’ANCT et les grands opérateurs et partenaires". L'IGA invite à renforcer les moyens du Sgar (secrétariat général aux affaires régionales) "pour apporter un appui aux préfectures de département dans l’élaboration d’une stratégie de cohésion territoriale".

 

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