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Evaluation environnementale : l’introduction d’une "clause filet" se précise 

Plus question de tergiverser, sous la contrainte d’une injonction du Conseil d’Etat, un projet de décret, en consultation jusqu’au 10 février, introduit dans la nomenclature des études d'impact une "clause filet" permettant de s’assurer que les projets y compris de petite taille ayant un impact notable sur l’environnement soient bien évalués.

Epinglée à plusieurs reprises sur sa transposition du cadre de l’évaluation environnementale des projets, la France procède à une adaptation par à-coups. Le ministère de la Transition écologique vient d’écrire un nouveau chapitre à ce feuilleton juridique débuté il y a une dizaine années, à travers un projet de décret, soumis à consultation publique prochain jusqu’au 10 février prochain, dont l’objet est de mettre en place un dispositif, généralement appelé "clause filet", permettant de soumettre à évaluation environnementale des projets d’aménagement (bâtiments, infrastructures, routes, etc.) situés en deçà des seuils de la nomenclature des études d’impact (annexée à l’article R.122-2 du code de l’environnement) mais susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine.
Le gouvernement s’y était refusé jusqu’ici, limitant l'existence d'une telle clause de rattrapage aux plans et programmes. La piste avait pourtant été sérieusement évoquée dans le rapport établi en 2015 par Jacques Verdier président du groupe de travail relatif à la "Modernisation de l’évaluation environnementale", qui la considérait "indispensable au regard des exigences du droit européen". Finalement la justice administrative a mis un point final au débat. Ce projet de texte répond en effet à l’injonction prononcée, à la demande de l'association France Nature Environnement, par le Conseil d’Etat dans le cadre de sa décision n°425424 du 15 avril 2021 (lire notre article du 16 avril 2021). La Haute juridiction a retenu le grief relatif à l’absence de "clause filet" contraignant le gouvernement à revoir sa copie dans le délai de neuf mois. Le Conseil d’État a ainsi jugé que le décret nomenclature (n°2018-435 du 4 juin 2018), en ne soumettant à l’évaluation environnementale que les projets au-dessus des seuils, c’est-à-dire à raison de leur seule dimension (taille, capacité de l’installation), écarte des projets de petite taille qui pourraient pourtant avoir un impact notable sur l’environnement, à cause de leurs spécificités ou de leur lieu d’implantation. 

Procédure complexe

Le projet de décret crée un article R.122-2-1 prévoyant que l’autorité compétente pour autoriser ou recevoir la déclaration d’un projet soumet à examen au cas par cas tout projet situé en-deçà des seuils de la nomenclature qui "lui apparaît" toutefois susceptible d’avoir des incidences sur l’environnement. La décision de soumettre à examen au cas par cas revient à l’autorité compétente en charge de la première procédure d’autorisation ou de déclaration. Cette décision intervient dans un délai de 15 jours à compter du dépôt du dossier d’autorisation ou de déclaration. Lorsque l’autorité compétente informe le maître d’ouvrage de sa décision de soumettre le projet à examen au cas par cas, celui-ci saisit l’autorité en charge de cet examen dans les conditions prévues par les articles R.122-3 et R.122-3-1. 
Pour ces mêmes projets, le décret prévoit également la faculté pour le porteur de projet de saisir, de sa propre initiative, l’autorité chargée de l’examen au cas par cas. Diverses dispositions d’articulation avec certaines procédures d’autorisation ou de déclaration sont également ajustées pour permettre d’activer ce dispositif.
Ce projet de décret "ne rompt pas avec le choix de classer les projets ayant une incidence notable sur l'environnement à l'aide de seuils", remarque l’avocat spécialisé en droit de l’environnement, Arnaud Gossement, soulignant que ce choix "pourrait être aujourd'hui questionné". "Le fait de prévoir deux cas d'ouverture de la procédure d'examen au cas par cas selon que l'autorité compétente pour instruire la demande d'autorisation a l'obligation ou la faculté de saisir l'autorité chargée de l'examen au cas par cas" est également, selon le juriste, "un facteur de complexité de la procédure d'évaluation environnementale dans son ensemble".  

 

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