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Éviction des conjoints violents : la garde des Sceaux en appelle aux départements

La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, encourage l'éviction des maris violents dans une circulaire du 9 mai 2019. "Il m’apparaît indispensable que soit encouragé le développement, en lien avec les départements, des dispositifs d’accompagnement protégé qui permettent de sécuriser le contact entre la victime et l’agresseur", souligne-t-elle.

Le déploiement de nouveaux dispositifs ces dernières années ne parvient pas à endiguer le nombre de violences conjugales. Près 112.000 victimes (dont 88% de femmes) ont été enregistrées en 2017 (+1,5% par rapport à 2016) et 151 en sont mortes, d’après les dernières données de l’Observatoire nationale de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Face à ce constat, la ministre de la Justice Nicole Belloubet réaffirme le "caractère prioritaire de la lutte contre les violences conjugales" et appelle les parquets à renforcer "la protection de la victime et sa prise en charge globale". 
Dans une circulaire du 9 mai mise en ligne le 3 juin, elle entend en particulier s’assurer de "l’effectivité de l’éviction du conjoint violent", alors que de nombreux faits divers sont venus montrer que ce n’était pas toujours le cas. Début avril, une femme de 50 ans prénommée Dalila avait en effet été retrouvée abattue d'un coup de pistolet dans sa voiture garée devant son domicile, dans le Var, peu après une intervention des gendarmes venus la protéger de son mari. "On voit de plus en plus de cas de féminicides dans lesquels tous les dispositifs existants ont été déployés", avait alors réagi la secrétaire d’État à l’égalité entre les hommes et les femmes, Marlène Schiappa, demandant à la justice d’intensifier ses efforts.  

Privilégier l'éviction du mari violent

L’éviction doit être "privilégiée", insiste en retour Nicole Belloubet. "L’interdiction de paraître peut désormais être prononcée dans le cadre de la composition pénale, éventuellement accompagnée de soins psychologiques", conseille-t-elle aux procureurs. Certains parquets l’ont déjà mise en œuvre "en lien avec l’Etat, les collectivités locales et les partenaires associatifs, qui permettent l’hébergement du conjoint violent, le cas échéant, et incluent un accompagnement social et sanitaire". "Il m’apparaît indispensable que soit encouragé le développement, en lien avec les départements, des dispositifs d’accompagnement protégé qui permettent de sécuriser le contact entre la victime et l’agresseur", précise-t-elle. A noter que les actions de lutte contre les actions intrafamiliales conduites par les collectivités ou les associations sont éligibles au Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD).
Nicole Belloubet constate par ailleurs que depuis leur instauration en 2010, les ordonnances de protection prononcées par les juges aux affaires familiales (JAF) même sans dépôt de plainte, restent "peu utilisées". Ainsi en 2018, seules "3.332 décisions" ont été rendues par ces juges, "représentant environ 1% de leur activité", "malgré une augmentation régulière".
Un trop grand nombre des 800 terminaux de téléphones grave danger (TGD) restent non utilisés, déplore la ministre, qui recommande de ne pas le réserver aux situations "d’extrême danger ou de danger imminent". Ce dispositif expérimenté il y a quelques années à Bobigny et Strasbourg permet de doter les victimes d’un téléphone d’alerte les reliant directement aux services de police et de gendarmerie. Une fois activé, ces derniers interviennent systématiquement.

Les plaintes en ligne opérationnelles au premier semestre 2020

La ministre souhaite une "nouvelle expérimentation" du bracelet électronique pour les conjoints violents. Ce "dispositif électronique anti-rapprochement" (Depar) vise à "assortir le placement sous surveillance électronique mobile de l’auteur" d’un "périmètre d’exclusion".
La ministre se félicite en revanche de l’amélioration des dispositifs d’accueil des victimes. La plainte en ligne créée par la loi du 23 mars 2019 doit cibler "prioritairement" les situations de violences conjugales. Le dispositif nécessite quelques ajustements mais devrait être opérationnel "au premier semestre 2020".  Selon l’ONDRP, le nombre de signalements en main courante informatisée a diminué de 20% depuis 2013.  Cette baisse "peut révéler une meilleure prise en charge" des victimes ou "être en lien avec l’augmentation des plaintes ces dernières années". 86.331 signalements en main courante informatisée ont été enregistrés en 2017. 
Toujours selon l'ONDRP, si le nombre de victimes reste stable, celui des homicides au sein des couples dits "officiels" a diminué de 28% entre 2012 et 2017, passant de 174 à 125.
 

 

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