Face à la pénurie de conducteurs de bus scolaires, le gouvernement veut faire évoluer les marchés publics

Alors que le secteur connaît une pénurie de conducteurs depuis plusieurs années, le groupe de travail interministériel sur le transport scolaire vient d'émettre des recommandations portant sur les marchés publics.

Six mille, c'est le nombre de conducteurs de bus scolaires qui manquent à l'appel actuellement, selon la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV). Alors que la rentrée scolaire 2022 avait déjà été marquée par une pénurie dans un secteur qui assure quotidiennement le transport de 2,1 million d'élèves, la situation demeure tendue. À l'issue d'une réunion interministérielle (Emploi, Transports, Éducation nationale, Intérieur) tenue début juillet, Florence Blatrix Contat, présidente de l'Anateep (Association nationale pour les transports éducatifs de l'enseignement public), a fait part de ses "craintes persistantes", estimant que "des services risquent d'être impactés, notamment dans les ressorts territoriaux des autorités organisatrices de la mobilité (AOM)".

Après des mesures visant à faciliter la formation des conducteurs (lire notre article du 27 juillet 2022) ou à permettre aux agents publics de travailler comme conducteurs de bus scolaire à titre accessoire auprès d'une entreprise privée (voir notre article du 9 novembre 2022), la synthèse des travaux du groupe de travail met cette fois en avant des solutions touchant aux marchés publics. Objectif : "Offrir davantage de souplesse et de visibilité aux cocontractants quant aux moyens humains mobilisés et tenir compte davantage des coûts salariaux, en hausse."

Mutualisation des services et allotissements mixtes

Ainsi, alors que les demandes de transport scolaire, d'un côté, de transport périscolaire, de l'autre, représentent des volumes limités et concentrés en termes d'horaires, et "semblent pouvoir être complémentaires", en pratique, "la mutualisation des services se révèle compliquée, en partie du fait de l'éclatement des compétences des collectivités en matière scolaire, périscolaire et de mobilité".  Le groupe de travail recommande donc la mutualisation des services de transport scolaire avec d'autres services ou entre AOM : adoption de formes de contrats mixtes ou recours à des marchés passés pour l'exécution de prestations similaires, une pratique qui "n'est pas encore répandue au sein des services d'achats et de commande publique des collectivités", commente le groupe de travail.

Dans la même logique, il recommande de recourir au "sourçage" – recueillir l'avis des opérateurs sur les caractéristiques envisagées du marché : périmètre, allotissement, durée, prestation de base et supplémentaire, variantes, etc. – dans les stratégies pluriannuelles d'allotissements. Cette solution pourrait garantir une distribution des lots cohérente avec les besoins de transport scolaire, encourager les allotissements mixtes dans les appels d'offres et ainsi permettre les enchaînements entre services scolaires et réguliers, l'augmentation des taux d'occupation des véhicules, la réduction des temps partiels subis par les conducteurs, etc.

Augmenter la durée des marchés

Par ailleurs, étant donné l'impact des accords-cadres à bons de commande annuels d'une durée maximale de quatre ans, historiquement utilisés dans le transport scolaire, sur la visibilité des opérateurs de transport pour pérenniser les emplois et amortir leurs investissements, notamment sur le matériel roulant, le groupe de travail recommande de favoriser l'utilisation de marchés forfaitaires ou à prix unitaire, voire le recours à des marchés avec des appels d'offres négociés, pour les nouveaux contrats portant sur le transport scolaire et de négocier des durées supérieures à celles offertes par les accords-cadres à bons de commande.

Parmi les autres recommandations, notons la volonté d'expérimenter dans les marchés publics la valorisation de critères sociaux objectivables portant notamment sur l'aménagement des volumes horaires et sur l'amélioration des conditions de travail, et d'inciter dans les nouveaux contrats de transport scolaire des clauses de révision fréquentes, plus d'une fois par an, ou toutes autres clauses permettant une révision au plus près de l'évolution réelle des conditions économiques.

Pour un meilleur dialogue entre collectivités et Éducation nationale

Plus largement, le groupe de travail recommande de "structurer localement un dialogue régulier entre les AOM et l'Éducation nationale afin d'anticiper les contraintes d'organisation du transport scolaire". Une solution qui pourrait permettre de répondre au problème soulevé par Florence Blatrix Contat : "À Marseille, le président de la République a annoncé la généralisation de l'accueil garanti de 8 h à 18 h dans tous les collèges REP+ de France. Qu'en est-il des conséquences sur les rotations de cars et sur la disponibilité des conducteurs ?!"

Une nouvelle réunion interministérielle sur les transports scolaires devrait être organisée fin août.