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Former (en ligne) plutôt que licencier, un adage partagé par l’État et les régions

La crise sanitaire sans précédent que le pays traverse met au ralenti notre économie. Pour se préparer au rebond, la formation est l’une des solutions retenues par l’État comme les régions qui, fortes de leur compétence dans ce domaine ont toutes décidé de mesures exceptionnelles. Sauf qu'en période de confinement, la seule solution actuelle passe par les formations en ligne. Formations en chômage partiel, aides aux organismes de formation, maintien de la rémunération des stagiaires de la formation. Tour d’horizon des différents enjeux.

Former plutôt que licencier. C’est le mot d’ordre du gouvernement qui consacre quelque 8,5 milliards d’euros à un vaste plan d’activité partielle (ou chômage partiel) afin de permettre aux entreprises et à leurs salariés de maintenir leurs compétences malgré le confinement général imposé sine die sur l’ensemble du territoire en raison de l’épidémie de Covid-19. En application de la loi d’urgence du 23 mars, le gouvernement va publier une ordonnance le 27 mars afin d’adapter l’activité partielle à la crise sanitaire. Un décret réformant les règles d'indemnisation a également été publié ce 26 mars. En période de chômage partiel, les salariés peuvent suivre des actions de formation, d’apprentissage, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l’expérience. C’est d’ailleurs l’appel que lance la ministre du Travail : "Le chômage partiel, c’est un moment où il ne se passe rien alors que, la plupart du temps, ils n’ont pas le temps d’aller en formation. Pour les entreprises, notamment les PME, quand la relance sera là, pour repartir, ce sera très important de retrouver ses salariés avec toutes leurs compétences et savoir-faire maintenus sinon augmentés."

Dans la même logique, l'Occitanie lance son plan "Me former plutôt que licencier", doté de 4 millions d’euros. La région abondera son budget dédié aux opérateurs de compétences (Opco) afin de financer les coûts de formation des salariés. Les formations proposées dans ce cadre devront se dérouler à distance. Pour en bénéficier, les entreprises doivent se rapprocher de leur Opco ou contacter les services de la région au 0800 00 70 70 (numéro vert).

Activité partielle, FNE-Formation

Les entreprises vont aussi pouvoir bénéficier du dispositif d’État FNE-formation pour former massivement les salariés en activité partielle. "Les plans de formation des entreprises dont les salariés sont en chômage partiel, seront financés à 100% via le FNE-Formation", a indiqué Muriel Pénicaud. Dans un document "questions/réponses" consacré au Covid-19 en date du 19 mars, le ministère du Travail rappelle les conditions dans lesquelles le fonds national pour l’emploi peut intervenir pour prendre en charge les coûts de formation. Pour en bénéficier, les entreprises doivent se rapprocher de la Direccte.

Les dispositions sur la prise en charge par l’État doivent cependant prochainement évoluer dans le cadre de l’aménagement de l’activité partielle. Alors que la règle d’indemnisation à 100% dans la limite de 4,5 Smic entre en vigueur à la faveur du décret du 25 mars, le FNE-Formation n’interviendra plus que sur les coûts pédagogiques. Une prise en charge à 100% de ces coûts pédagogiques sans limitation budgétaire, a priori pour l’enveloppe du FNE consacrée à la formation est envisagée.

La mobilisation du FNE-Formation suscite cependant quelques inquiétudes du côté des organismes de formation. "Ce n’est pas un nouveau dispositif et nous en connaissons les limites, notamment dans la lourdeur administrative", souligne Pierre Courbebaisse, président de la Fédération de la formation professionnelle (FFP) qui fédère et représente plus de 900 entreprises de formation accueillant plus de 5,8 millions d'apprenants. "Si nous souhaitons réellement qu’il soit mobilisé, il faut parvenir à une vraie simplification et que toutes les entreprises y soient éligibles avec un financement à 100% des coûts pédagogiques."

Les organismes de formation en première ligne

Dans cette crise sanitaire, les organismes de formation sont en première ligne. "Le plus souvent, les entreprises annulent du jour au lendemain la formation sans la reporter, y compris les grandes entreprises. Actuellement, la formation des salariés n’est pas leur priorité", ajoute le président de la FFP qui trouverait cependant "normal que lorsqu’un organisme de formation a fait de lourds investissements en termes d’ingénierie pédagogique, l’entreprise cliente paie une partie de la formation qui n’aura pas lieu. Cela va être du cas par cas". Plusieurs régions déploient des moyens pour soutenir les organismes de formation. La Nouvelle-Aquitaine s’engage à "poursuivre le paiement des organismes sur la base des pièces justificatives disponibles". Même chose en Centre-Val de Loire : "Pour toutes les formations ayant démarré, nous maintenons l’aide prévue aux organismes."

Il est fortement recommandé aux organismes, dans ce contexte, de digitaliser leur offre. Les Français restent cependant très attachés au présentiel… c’est en effet la modalité pédagogique la plus répandue (91%). Et tous les prestataires n’ont pas la même maturité numérique ! Grâce au programme d'investissements d'avenir (PIA), la FFP accompagne depuis plusieurs mois déjà les entreprises de formation dans leur digitalisation (www.pia-ffp.org). Elle va accélérer sa mobilisation et en faire la promotion auprès des organismes. Elle va aussi essayer localement de bénéficier de l’axe 3 du plan d'investissement dans les compétences-PIC ("Innover et transformer par l’expérimentation"). La région Île-de-France propose une offre de service gratuite permettant aux organismes de dématérialiser leur formation et ainsi de poursuivre leur activité.

Le coup de pouce des régions aux organismes non digitalisés

L’Occitanie offre la possibilité aux organismes de formation de la région qui ne seraient pas équipés d’outils numériques d’avoir accès à sa plateforme de formation à distance "Occitanie e-formation" et de permettre ainsi la poursuite des formations à distance. Depuis le 24 mars, "une quarantaine d’organismes en ont déjà fait la demande". La région précise qu’elle a "été sollicitée par le ministère du Travail afin d’ouvrir sa plateforme à d’autres régions françaises. Les discussions sont en cours notamment avec les régions Bretagne, Grand Est, Auvergne-Rhône-Alpes, Guadeloupe et la Réunion qui ont d’ores et déjà manifesté leur intérêt pour cette initiative". L’objectif est de permettre aux régions qui le souhaitent d’accéder à cet outil et d’y partager leur propre catalogue de formations à destination des demandeurs d’emploi de leur territoire et ainsi "laisser aux autres régions le soin de piloter le déploiement des formations à distance sur les prochaines semaines".

De son côté, le ministère du Travail a listé les outils et contenus pédagogiques mis à disposition gratuitement par plusieurs acteurs (Afpa, Cned, Educagri, Kokoroe, Nathan, Openclassroom, Pix…). Il s’agit à la fois de solutions techniques permettant de diffuser des contenus et des activités, d’animer des formations et d’assurer le lien pédagogique à distance, des ressources pédagogiques accessibles aux organismes de formation et des ressources pédagogiques accessibles aux CFA. "Pendant trois mois, nous mettons à disposition des CFA, des organismes de formation et du grand public son savoir-faire en matière de Mix-Learning", précise l’Afpa. Les prestataires pourront accéder à ses Mooc et à des modules pour animer des formations et assurer le lien pédagogique à distance sur https://mooc.afpa.fr. Les CFA qui mettent en œuvre les titres professionnels du ministère du Travail pourront également accéder aux contenus pédagogiques de 22 titres professionnels via la plateforme pédagogique Métis.

La rémunération des stagiaires maintenue

Que se passe-t-il pendant cette période pour les demandeurs d’emploi en formation et les stagiaires de la formation professionnelle ? "Les demandeurs d’emploi ne doivent pas se déplacer pour se rendre à un atelier ou à une formation. Ceux-ci peuvent être proposés à distance (via internet ou par des contacts téléphoniques)", répond Pôle emploi. Le formateur ou l’accompagnateur reviendra vers eux pour leur indiquer les solutions possibles (proposition de suivi à distance, report, etc.). Et la rémunération des demandeurs d’emploi dont la formation est suspendue est maintenue. Le conseil d’administration de Pôle emploi qui s’est tenu par téléphone le 18 mars a voté à l’unanimité le maintien de l’indemnité des demandeurs d’emploi en formation quand celle-ci est suspendue en raison de l'épidémie de Covid-19. En temps normal, au bout de 15 jours d’interruption d’un stage, le chômeur bascule en allocation de retour à l’emploi (ARE) moins favorable que l’ARE-F perçue lorsqu’il est en formation.

De leur côté, les régions maintiennent la rémunération des stagiaires, "que la formation ait lieu à distance ou qu’elle soit reportée" comme en Occitanie et en Centre-Val de Loire. L’Île-de-France s’est, elle, engagée à ce que tous les stagiaires ayant débuté une formation au plus tard le 13 mars 2020 voient leur rémunération maintenue "dès lors qu’ils auront pu assister à la formation dématérialisée (y compris à distance) et en cas d’absence justifiée (garde d’enfants…) ou de tout autre empêchement directement ou indirectement lié à l’épidémie du Covid-19".

 

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