A Gouvieux (60), les jeunes se mettent au service des aînés

Ils ont 16 ans et donnent un peu de leur temps pour aider les personnes âgées. A Gouvieux, dans l'Oise, le service civique de solidarité proposé aux ados par la mairie fait un tabac. L'initiative fait coup double en renforçant le bénévolat et les liens entre les générations.

A Gouvieux (Oise, 9.400 habitants), les jeunes sont invités à consacrer deux semaines de leurs vacances pour venir en aide aux personnes âgées. Et cela marche. Le maire, Patrice Marchand, et son adjointe, Josette Dellis, sont fiers de leur initiative. Pendant dix ans, les services de la ville ont organisé des chantiers de jeunes, qui ont permis par exemple de restaurer un mur ou de créer un local destiné aux boulistes de la commune. Mais le bilan est en demi-teinte : "Huit jeunes sur dix regardaient les autres travailler", constate amèrement la mairie. Obligée de revoir sa copie, l'équipe municipale invente le "service civique de solidarité". Et cette fois, elle voit juste. Au mois de juillet 2003, elle lance une opération baptisée Eté Service Santé, au profit des personnes âgées en établissement. Elle implique quarante garçons et filles de 16 ans, qui sont prêts à rendre service à leurs aînés. Leur mission n'est pas de remplacer le personnel soignant, mais d'utiliser leurs seuls atouts, disponibilité et sourire. Ils sont là pour écouter, dialoguer, prendre la main d'une personne qui a des difficultés à marcher, jouer avec les résidents. Mais aussi apporter un plus : des animations nouvelles, une revue de presse, des intermèdes musicaux... Ils travaillent par groupes de deux dans un des cinq établissements de la commune. Après deux semaines, ils sont relayés par un nouveau tandem...

Epanouissement

Bien involontairement, la ville de Gouvieux a lancé son initiative à un moment opportun. Avec la canicule qui frappe la France au mois d'août 2003, les jeunes se montrent irremplaçables. Les personnes âgées se souviennent encore qu'ils leur apportaient de l'eau aux heures les plus chaudes. De leur côté, les jeunes s'initient aux valeurs de "solidarité" et de "civisme", souligne la mairie. "L'expérience du contact avec des personnes convalescentes ou diminuées psychologiquement ou physiquement peut être riche d'enseignements pour un jeune et contribuer ainsi à sa maturité, à son épanouissement." Des miracles sont même possibles. A la mairie, on témoigne : "Par son indiscipline, un jeune posait problème à ses éducateurs. Nous avons retenu sa candidature, mais nous avions très peur. Le premier jour, on ne l'a pas vu. Il est finalement venu le second jour et, de lui-même, a récupéré les heures qu'il n'avait pas faites. Au cours de ces deux semaines, il s'est totalement révélé et compte aujourd'hui s'orienter vers le métier d'aide-soignant." Même si la mairie ne veut pas entendre parler de "stage", ces jeunes bénévoles ont ainsi également acquis une première expérience professionnelle validée par un certificat. En cas d'assiduité, ils ont obtenu une gratification de 290 euros.

Solidarité à domicile

Partie sur les chapeaux de roues, l'opération Eté Service Santé a été reconduite cet été, "avec 150 candidats de 16 ans pour 40 places seulement", témoigne la mairie qui se réjouit de ce succès. L'année prochaine, les candidats refusés auront peut-être plus de chance, puisque la mairie réfléchit à une extension de la formule à toutes les périodes de vacances scolaires. Ils pourront aussi postuler au service de solidarité à domicile, lancé en mars par la municipalité. Sur une durée de 70 heures réparties sur l'année, les jeunes rendent service à une personne âgée, handicapée ou malade. Ni auxiliaire de vie ni aide-ménagère, le jeune est plutôt une présence bienveillante. Une dame de compagnie des temps modernes, en quelque sorte. La personne bénéficiaire du service à domicile se sent moins seule chez elle et peut demander au jeune de l'accompagner pour faire ses courses ou se promener. La mairie compte sur l'engagement de 80 jeunes jusqu'en juin prochain. Au final, il s'avère plus difficile de recruter des personnes en situation d'isolement que de trouver des bénévoles. Les personnes âgées seraient-elles réticentes ? Le service offre pourtant des garanties de sérieux. Le jeune signe une charte de bonne conduite et reçoit une formation de sept heures. Enfin, un tuteur assure le suivi du service et sert de référent au jeune et à la personne aidée.


Thomas Beurey / EVS Conseil pour Localtis


 


"Permettre aux jeunes de rendre un service"


 

Patrice Marchand est le maire de Gouvieux.

Quels sont les objectifs du service civique de solidarité ?

Le fait d'être reconnu est essentiel pour l'insertion sociale d'un jeune. C'est pourquoi nous avons souhaité créer un point de passage qui permette d'identifier les jeunes Godviciens et de créer une relation étroite avec la mairie. Nous souhaitions aussi permettre aux jeunes de rendre un service porteur des valeurs de solidarité, de civisme et de responsabilité. Les mettre en situation professionnelle, c'était aussi un moyen de leur apprendre les vertus du travail, du respect d'une consigne, de la hiérarchie et des contraintes professionnelles.
Pourquoi le service civique s'adresse-t-il aux Godviciens de 16 ans ?
C'est l'âge auquel les jeunes sont les plus mûrs. Et pour autant, ils ne peuvent pas encore exercer une activité professionnelle. Pour des raisons d'assurance, le service civique ne s'adresse qu'aux jeunes de Gouvieux, même si on aimerait pouvoir répondre aux attentes des jeunes des alentours.

Quelles sont les motivations des jeunes ?

Elles sont variées. Les uns déclarent dans leur dossier de candidature qu'ils veulent exercer plus tard un métier dans le domaine du social. Les autres se cherchent et se disent : "Pourquoi ne pas essayer ?". D'autres encore veulent acquérir une expérience professionnelle. La part de ceux qui s'engagent pour obtenir l'indemnité est vraiment minoritaire.

 


 Une initiative très remarquée


 

En créant le service civique de solidarité, Gouvieux se savait pionnière. Mais elle ignorait que l'opération allait recevoir une consécration nationale.

En s'engageant, les jeunes Godviciens n'avaient pas deviné qu'ils recevraient les félicitations d'un ministre. C'est pourtant Christian Jacob, ministre délégué à la Famille, qui les a accueillis en janvier 2004 dans son ministère, afin de leur remettre un diplôme en main propre. Une façon de récompenser le bénévolat et de valoriser une initiative exemplaire. A la mairie de Gouvieux, on reconnaît que la canicule de l'été 2003 a été un "coup de chance" fortuit pour l'opération. Sans ces circonstances malheureuses, les caméras de TF1 ne seraient sans doute pas venues jusqu'à cette commune de l'Oise. Le succès du service civique de solidarité n'a pas tardé à faire des émules. Selon la mairie, un conseil général et des communes auraient déjà appliqué chez eux les recettes testées à Gouvieux. La mairie de Gouvieux n'ignore pas non plus l'influence de son expérience dans les récentes propositions parlementaires en faveur d'un service civique pour les jeunes, en remplacement du service national des armées (lire notre article ci-dessous : "Service civique : députés PS et UMP avancent leurs propositions").

Mairie de Gouvieux

Nombre d'habitants :

9398
48, rue de la mairie
60270 Gouvieux

Josette Dellis

Adjointe déléguée aux affaires sociales

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