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Marchés publics - La garantie décennale ne concerne pas tous les désordres !

Dans un arrêt du 9 novembre 2018, le Conseil d’État a refusé de faire jouer la garantie décennale du constructeur, estimant que les désordres apparus ne rendaient pas l’ouvrage impropre à sa destination. L’occasion de rappeler les limites de la garantie décennale. 

En l’espèce,  la commune de Saint-Germain-le-Chatelêt avait conclu un marché pour la construction d’une salle multi-activités comprenant un centre de loisirs sans hébergement et une salle communale. Titulaire du lot n°14, la société Beyler était chargée des travaux de chauffage et de ventilation. La maîtrise d’œuvre avait quant à elle été attribuée à deux entreprises, dont la société Blondeau Ingénierie. Suite à l’apparition de désordres affectant le système de chauffage de la salle, la commune a demandé au tribunal administratif (TA) de Besançon de déclencher la responsabilité décennale à l’encontre de la société Blondeau Ingénierie et de l’entreprise titulaire du lot. Si le TA a fait droit à cette demande, prononçant une condamnation solidaire à hauteur de 35.000 euros, la cour administrative d’appel (CAA) de Nancy a annulé ce jugement. La commune a alors saisi le Conseil d’État d’un pourvoi en cassation.

La haute juridiction administrative a confirmé le raisonnement de la CAA. En effet, bien que désordres ait été constatés, cela n’était pas suffisant pour engager la responsabilité décennale du constructeur et du maître d’œuvre. Dans les faits, la chaudière présentait des dysfonctionnements et une usure prématurée du système. En conséquence, la fréquence des livraisons de combustibles avait augmenté et l’intervention d’un technicien était devenue systématique pour remplir le silo, ce qui devait initialement être automatique. Le Conseil d’État comme la CAA ont tout d’abord estimé que la chaudière était "un élément d’équipement dissociable de l’ouvrage". À cet égard, les juges de cassation ont rappelé "que la responsabilité décennale du constructeur peut être recherchée pour des dommages survenus sur des éléments d’équipements dissociables de l’ouvrage s’ils le rendent impropre à sa destination". À la question de savoir si les désordres avaient rendu l’ouvrage impropre à sa destination, les juges ont répondu par la négative. Bien que la chaudière ne fonctionne pas conformément à ce qu’il était prévu au contrat, les juges d’appel et de cassation ont estimé que "les dysfonctionnements [...] n’affectaient pas le chauffage de la salle communale dans des conditions qui devraient conduire à les regarder comme rendant l’ouvrage impropre à sa destination".
Le Conseil d’Etat a donc rejeté le pourvoi de la commune.

Référence : CE, 9 novembre 2018, n°412916
 

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