Archives

Ligue de basket recherche nouvelles arénas désespérément

Cela fait des années que la France pâtit du manque de salles modernes pour accueillir les sports collectifs au plus haut niveau. En imaginant un concept d'aréna clés en main à petit prix, la Ligue nationale de basket pense avoir fait un pas dans la bonne direction. Les clubs et les collectivités semblent toutefois difficiles à convaincre.

Il y a six ans, le rapport Aréna 2015 établissait un triste état des lieux. La France se classait au huitième rang européen des pays selon le nombre d'enceintes sportives couvertes d’une capacité de 5.000 à 10.000 places. Pour remédier à cette carence et accroître la viabilité des trois grands sports de salle que sont le basket-ball, le handball et le volleyball, dont les clubs professionnels figurent parmi les plus subventionnés par les collectivités territoriales, chacun y est allé de sa recette. 
Quand la volonté politique, d'un côté, et les nécessités sportives, de l'autre, ont rencontré des moyens financiers, des projets ont vu le jour. Aix-en-Provence et Bordeaux se sont dotées récemment d'équipements dignes de grandes métropoles pour des montants conséquents : plus de 50 millions d'euros. Dans l'agglomération de Saint-Étienne, c'est une salle à 31 millions d'euros qui doit sortir de terre au printemps 2022. Au même moment, devrait être inaugurée l'Aréna Futuroscope de Poitiers, pour un montant de 46 millions d'euros cette fois. Les projets ne manquent donc pas, mais les niveaux d'investissements refroidissent certaines villes moyennes, par ailleurs plus enclines à investir dans les sports de salle que dans le football ou le rugby, précisément pour des raisons budgétaires (lire notre article du 21 septembre 2018).

"Nous donnons une arme au club"

Pour étoffer le parc français d'arénas modernes d'une capacité de 4 à 5.000 places, la Ligue nationale de basket (LNB) s'est associée à la branche construction du géant de l'événementiel sportif GL Events. L'idée germe dès 2012, après que l'entreprise lyonnaise a réalisé une salle éphémère pour les Jeux olympiques de Londres. La LNB se rapproche alors du constructeur. Ensemble, ils partent d'un constat : depuis les années 2000, beaucoup de projets, souvent surdimensionnés, n'ont jamais vu le jour pour des raisons budgétaires. L'idée est aussi de faire accélérer les projets. Naît alors un concept d'aréna clés en main présenté aux clubs professionnels en 2018. "Plusieurs choses rendent le dossier d'une aréna complexe et long, explique Michel Mimran, directeur général de la LNB. Il y a l'aspect économico-politique, il faut trouver le lieu, impliquer la collectivité, partager avec d'autres sports et des spectacles. Il y a aussi le temps de réalisation en raison du grand nombre d'intervenants. Le plus souvent, le club de basket n'est pas le seul ayant droit sur l'aréna."
Les deux partenaires, auxquels s'est associé le bureau d'étude spécialiste des ouvrages sportifs Chabanne, entendent donc simplifier les questions chronophages que sont le budget, le plan, les devis, etc. "Nous donnons une arme au club et nous le plaçons au centre du jeu. Cela lui permet d'être porteur d'un projet et de dire à la collectivité : 'Voilà on a le plan, on connaît le budget.' On gagne énormément de temps pour la discussion", souligne Michel Mimran. 

Le prix d'une "bonne aréna"

Parmi le temps de négociation gagné, figure tout d'abord celui consacré au budget. Car le prix de l'équipement est, lui aussi, clés en main. Le coût d'une "bonne aréna" de 4 à 5.000 places pour un sport comme le basket, comprenant les hospitalités, la billetterie, l'accès, l'éclairage, etc., s'établit pour ce projet à environ 20 millions d'euros (estimation 2018). Une somme qui est cependant variable selon le cahier des charges final du maître d'ouvrage ou encore les difficultés particulières du chantier (dépollution du sol, etc.). C'est donc un prix défiant toute concurrence qui est proposé en comparaison aux ouvrages sortis de terre ces dernières années. Même si Rennes métropole avait réussi, en 2019, à offrir une salle de 4.500 places à son club de handball de Cesson-Sévigné pour 18,9 millions d'euros HT grâce à un partenariat public-privé.
Comment parvenir à ce prix ? "Les coûts augmentent quand vous avez un projet spécifique, argumente Michel Mimran. Là, le prestataire vous dit : 'Ce sera tels matériaux, telle configuration, telles dimensions'. Le projet est fait, c'est cela qui fait baisser le prix. La marge de négociation est donc relativement faible sur les choix très structurants." Cette absence de marge de négociation ne se fait toutefois pas au détriment de la qualité. Le projet est bâti pour être compatible avec tous les sports collectifs et l'accueil de spectacles. Côté conception, il a l'avantage de sortir du "tout béton". Le principe constructif – métal ou bois – étant déterminé selon le contexte et le besoin du maître d’ouvrage. La collectivité qui souhaite prioriser telle ou telle filière peut donc le faire sans alourdir la facture. Enfin, les délais de réalisation ont eux aussi été pris en compte pour séduire les investisseurs. "Entre le 'go' et le moment où la salle sort, cela peut se faire dans un délai d'une saison. On n'est plus sur des projets qui vont durer des années interminables", se réjouit Michel Mimran.

Adapté aux villes moyennes

Séduisant sur le papier, le projet d'aréna clés en main tarde toutefois à attirer clubs et collectivités. Si, bien entendu, la crise sanitaire n'a pas arrangé les choses, des problèmes de fond demeurent. "Parce qu'elle est clés en main, notre solution a quelques inconvénients, tempère Michel Mimran. Il y aura toujours quelque chose qui rendra particulier un projet de niveau-là : l'emplacement, l'ambition d'un des partenaires, la spécificité locale, le nombre de sports qui peuvent être impliqués, le nombre de places. Il y a toujours quelque chose qui justifie que finalement on fasse un projet ad hoc. Et en fonction de la puissance de la collectivité, c'est plutôt elle qui va mener le projet et finalement ce ne sera par un projet clés en main mais un projet réfléchi localement avec des appels d'offres locaux." Pour donner raison au directeur général de la LNB, deux chiffres : 2, comme le nombre des études poussées réalisées par GL Events avant la crise sanitaire, pour un club de Pro A et un club de Pro B ; 1, comme le nombre de procédure de marché public qui devrait finalement aboutir.
L'aréna clés en main a-t-elle encore un avenir ? Michel Mimran reste optimiste: "Je le pense car malgré tout, le concept est très adapté aux villes moyennes ou aux grandes villes qui auraient un club en Pro B." Il reste que, pour le dirigeant, même si tout a été fait pour rendre les choses le moins théorique possible, "ce qui va animer tout le projet va être le jeu de négociation et la répartition des responsabilités entre les collectivités et les différents clubs. Et cet aspect, il n'est pas livré clés en mains".