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Mobilité européenne des alternants : "Mona" veut transformer l’exception en règle

En présence de Clément Beaune, ministre délégué à l’Europe et aux Affaires étrangères, et Olivier Dussopt, ministre du Travail, le projet "Mon apprentissage en Europe" a été lancé officiellement le 30 juin 2022 au Cnam de Paris. L’objectif est de permettre à 15.000 jeunes d’ici à 2026 de bénéficier du programme Erasmus+.

C’est la grande faiblesse de l’apprentissage français qui a par ailleurs connu un grand succès depuis deux ans. En effet, bien que le programme Erasmus+ soit accessible aux apprentis depuis 1995, ceux-ci en profitent beaucoup moins que les étudiants en universités et grandes écoles. En 2021, l’agence Erasmus+ France a financé 18.510 mobilités pour des apprenants de la voie professionnelle (et 8.432 pour des formateurs et enseignants du secteur), tandis que 44.575 mobilités étaient financées pour l’enseignement supérieur.

Les séjours de longue durée hors des frontières en cours de cursus restent en effet exceptionnels pour les alternants, freinés par des difficultés "académiques, juridiques et financières", comme l’ont souligné les participants au lancement du projet "Mona" le 30 juin au Cnam de Paris. Initié par l’association Europ App Mobility (EAM), créée en 2020 et présidée par Jean Arthuis, le projet "Mon apprentissage en Europe" vise justement à lever ces freins. "La mobilité des apprentis en Europe contribue à la fois à l’emploi des jeunes, à la compétitivité des entreprises et au développement des territoires", a fait valoir l’ancien député européen.

Créer "un espace européen de l’apprentissage"

L’une des mesures phares consiste à financer le poste d’un référent mobilité à temps plein dans chacun des 43 CFA partenaires du projet. Doté d’un budget de 25 millions d’euros pour 4 ans dont 17 millions apporté par le gouvernement dans le cadre du plan France 2030, un consortium réunit 31 organismes gestionnaires qui représentent ces centres de formation par apprentissage. "La finalité du projet mènera à la construction d’un nouveau parcours de formation en alternance", précisent les parties prenantes qui espèrent permettre à 15 000 jeunes supplémentaires de partir dans un des pays européens. À plus long terme, EAM ambitionne de créer "un espace européen de l’apprentissage, comme il existe un espace européen de l’enseignement supérieur".

"Eramus + soutient la mobilité des apprentis et le programme Europ App Mobility qui se présente comme une bonification dans l’allocation des fonds pour les organismes qui prévoient mobilité longue", a de son côté souligné Sébastien Thierry, directeur général adjoint d’Erasmus +, invitant à "créer des synergies avec d’autres financements afin de répondre à des ambitions collectives".

Surmonter le barrage de la langue

Reste aussi à motiver les jeunes français à larguer les amarres, car selon le restaurateur choletais Laurent Samson, le barrage de la langue serait au final l’un des principaux freins à leur mobilité. "Quand les Hongrois arrivent dans mon restaurant, ils parlent couramment l’anglais, ce n’est pas le cas des jeunes alternants français", a témoigné ce chef d’entreprise. "J’accueille des étrangers aussi pour montrer à mes apprentis que ces jeunes ont eu le courage de venir d’un autre pays et qu’ils maîtrisent l’anglais." Laurent Samson a également pointé la complexité des rouages administratifs français complexifiant l’accueil d’alternants étrangers, à l’instar de l’obtention d’un numéro de Sécurité sociale (6 mois) ou de l’accès à l’aide au logement (entre 6 mois et un an).

"Nous prenons acte de ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas", a répondu Clément Beaume soulignant la capacité de Mona "à faire bouger les lignes" en transmettant petit à petit l’envie de voyager à des jeunes". Si l’État a engagé des initiatives pour renforcer tant sur le plan budgétaire que juridique les actions de mobilité en Europe, le ministre délégué à l’Europe et aux affaires étrangères a estimé que pour accélérer la cadence, "il fallait une réelle mobilisation collective".

10 millions de jeunes bénéficiaires d’ici à 2027

Grâce à une augmentation de 80% des crédits européens alloués au programme Erasmus sur les 7 années de la programmation budgétaire en cours, 10 millions de jeunes devraient en bénéficier contre 12 millions depuis la création du programme en 1987. "C’est un changement d’échelle et de modèle", auquel Mona devrait contribuer, a également souligné Clément Beaume. "Mona est une excellente initiative", a renchéri Olivier Dussopt. Pour le ministre du Travail, soutenir l’initiative de Jean Arthuis était "une évidence, car elle permet d’ancrer l’apprentissage dans les questions de mobilités qui contribuent à l’amélioration de l’insertion et à la réussite professionnelle de ceux qui en bénéficient", a-t-il insisté, rappelant que "l’employabilité est supérieure de 86 % quand les candidats ont une expérience de mobilité".

Mais le successeur d’Élisabeth Borne a aussi admis qu’il restait "des chantiers de plusieurs natures à mener" telles que la simplification et la réduction des délais, ainsi que des questions de droit. "Je peux vous assurer de la mobilisation des services du ministère du Travail pour voir comment prolonger la période obligatoire de mise en veille du contrat pendant quatre semaines et comment accompagner le jeune juridiquement pendant cette période", a prévenu Olivier Dussopt qui compte également "sécuriser juridiquement la question de la réciprocité", c’est-à-dire garantir à un chef d’entreprise de pouvoir remplacer son alternant en mobilité par un autre alternant européen.

Référence : Europ App mobility.

 

 

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