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PLF 2021 et énergies renouvelables : le gouvernement s’attaque à la bulle photovoltaïque

Le gouvernement compte amender le projet de loi de finances pour 2021 pour renégocier d’anciens contrats d’énergie solaire qui bénéficient d’une "surrentabilité" et pèsent sur les finances publiques.

Le problème était connu mais toujours pas résolu. Dans les années 2010, le gouvernement d’alors félicitait la filière de l’énergie solaire photovoltaïque d’avoir atteint les objectifs de développement fixés par le Grenelle de l'environnement tout en pointant le revers de la médaille : des projets d’un côté "formidables" mais d'autres "supports d'une intense spéculation financière" (voir notre article en 2011). Les débats sur le projet de loi de finances furent ainsi marqués par de vives critiques à l'encontre d’une "bulle" du solaire qui s’était formée et conduisit fin 2010 à un moratoire, suivi d’une nouvelle architecture de soutien redonnant au ministère chargé de l'environnement une capacité de pilotage de la filière. 

Où en est-on dix ans après ? Dans son rapport remis il y a deux ans sur les politiques publiques de soutien au développement des énergies renouvelables, la Cour des comptes dénonçait le poids de ces engagements antérieurs au moratoire, "qui aura encore pendant de longues années un impact majeur sur les dépenses de soutien au photovoltaïque". Les "Sages" reprenaient le chiffre de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), faisant état d’une charge pour les finances publiques, jusqu’alors peu anticipée ni mesurée, de deux milliards d’euros par an jusqu’en 2030. 

800 contrats ciblés

L’administration cherche depuis à corriger ces écueils passés. Une source gouvernementale explique qu’"avant ce moratoire, entre 2006 et 2010, des producteurs ont bénéficié pour leurs installations d'un dispositif de soutien excessif et d'un tarif de rachat de l'électricité produite qui continue de peser lourdement sur les charges budgétaires de l’État : il est temps de corriger cette anomalie et cette situation de rente sur des contrats antérieurs à 2011 qui ont été amplement rentabilisés". La totalité des 230.000 contrats d’achat photovoltaïque pré-2011, bénéficiant d’une avantageuse tarification qui accompagna alors la nécessaire croissance du parc de centrales solaires, ne sont évidemment pas concernés. Le gouvernement cible 0,3% d’entre eux, soit 800 contrats passés pour l’essentiel par des développeurs et professionnels dont les installations bénéficient d’une "surrentabilité qui se maintient et mobilisent une charge annuelle de 600 à 800 millions d’euros pour l’État". 

Particuliers, agriculteurs, collectifs citoyens, "les plus petits seront épargnés, il ne s’agit pas de les léser", poursuit-on au gouvernement, en précisant qu’un traitement au cas par cas, tenant compte de divers critères (date d’entrée en service, environnement juridique, localisation géographique), va être opéré, sachant que "seules sont concernées des installations d’une certaine taille et d’une puissance supérieure à 250 kilowatt crête (kWc)".

Un amendement sensible

Pour revoir les conditions de ces contrats d'achat photovoltaïques, un amendement au projet de loi de finances pour 2021 sera déposé dans les jours à venir par le gouvernement. Un amendement initial a été retiré pour laisser du temps à la concertation avec la filière. Laquelle voit la manoeuvre d’un mauvais œil. Elle estime que cette mesure de rétroactivité va porter un coup à l’ensemble des acteurs de la transition énergétique et éroder la confiance accordée à la parole de l’État.

Le tout à un moment fort mal choisi, déplore le syndicat des professionnels du solaire Enerplan, puisqu’il ne peut justement "y avoir de plan de relance sans confiance". Si elle est adoptée par le Parlement, cette mesure devrait entrer en vigueur dans le courant de l'année 2021. Consistera-t-elle à raccourcir la durée des contrats ? Ou bien à revoir leur tarification ? Tout n’est pas tranché mais le gain attendu est connu : le gouvernement espère récupérer de 300 à 400 millions d’euros par an. Des textes d'application devront préciser par la suite les modalités de mise en œuvre d’une telle décision.

 

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