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Projet de décret sur la qualité des organismes de formation : un seul critère ajouté

Présenté le 14 février 2019 à France Compétences, le projet de décret sur le "référentiel national de certification qualité des organismes de formation" - prévu par la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 - énonce des critères dans lesquels on peine à trouver des éléments réellement nouveaux.

Parmi les nombreux volets de la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018, un projet de décret a été soumis à l’agence France Compétences le 14 février 2019, pour établir un "référentiel national de certification qualité des organismes de formation". Il s'agit de la deuxième phase du renforcement du contrôle qualité des organismes de formation professionnelle près celle mise en oeuvre par la loi du 5 septembre 2014. Cette certification conditionne l'accès aux financements publics (État, région, Caisse des Dépôts, Pôle emploi) et autres (Opco, Agefiph, CPIR). Parmi les critères du projet de décret : l’information des publics sur les prestations, les délais d’accès et les résultats obtenus, l’identification précise des objectifs des prestations et leur adaptation aux publics bénéficiaires lors de la conception des actions ou encore l’adaptation des prestations et des modalités d’accueil, d’accompagnement, de suivi et d’évaluation aux publics bénéficiaires lors de la mise en œuvre des actions.
Au total, avec sept critères évalués par 32 indicateurs, le document a des airs d’exhaustivité. Mais comparé au cadre "qualité" déjà mis en place par les anciens organismes paritaires collecteurs agréés (Opca), rien de vraiment nouveau. Dans leur base de données Datadock, qui existe depuis plus de deux ans, on retrouve en effet six des sept critères dernièrement proposés : seule "l’inscription du prestataire dans son environnement socio-économique" est une réelle innovation. 

Une réforme qui favorise les grandes structures ?

Prévu pour entrer en vigueur le 1er janvier 2021, pour que les organismes aient le temps de s’adapter, le dispositif ne fait pas l’unanimité. Marie Gouttard, formatrice, dénonce dans une tribune au Monde du 13 février une avalanche de décrets techniques, d’obligations administratives, financières, environnementales, logistiques... qui ne sont guère à l’avantage des petites structures. Les grands organismes sont évidemment mieux armés pour faire face à cette technicité, même si "le ministre chargé de la Formation professionnelle publie sur son site des informations permettant de faciliter la lecture du référentiel mentionné à l’article", comme le mentionne le projet de décret, en forme d'un aveu de complexité. 
Dans une autre tribune du Monde du même jour, Guy Le Boterf, professeur de management, déplore dans cette réforme une absence de nouveauté dans le domaine non technique des formations : apprendre le savoir-être, une notion qui complète le savoir-faire, et qui est de plus en plus nécessaire dans le monde du travail, toujours plus communicatif et collectif. Un savoir qui pourrait paraître impalpable, mais qui s’enseigne tout de même, qui est nécessaire dans tous les métiers et à tous les niveaux, et qui aurait mérité une place dans les critères d’évaluation.
Pour Muriel Pénicaud, ministre du Travail, il s’agit davantage de faire de la régulation, non de l’opérationnel. Aux formateurs donc d’innover en matière de formation ; les pouvoirs publics se mêlent d’évaluer, pas de fixer le contenu.

La nouveauté est dans l’outil

Annoncée en avril 2018, créée par la loi du 5 septembre dernier, l’agence France Compétences est en activité depuis le 1er janvier 2019. Elle est l’unique instance de gouvernance de la formation professionnelle et de l’apprentissage, et a pour mission d’assurer le financement, la régulation, le contrôle et l’évaluation. Une centralisation jugée nécessaire pour mieux réguler, entre autres, les prix des formations et éviter des dérives constatées : des prix allant de 1 à 6 pour une même formation (un CAP cuisine de 2.500 à 14.000 euros). Le référentiel national procède également de cette volonté centralisatrice, pour plus de clarté. Une étude d’impact accompagnant le projet de loi Avenir professionnel avait en effet souligné que la multiplicité des labels et certifications rendait difficile l’évaluation par le public. La réforme impose donc pour la première fois un référentiel national unique pour l’évaluation des formations financées sur fonds publics. Outre le caractère unique du référentiel d’évaluation, le projet de décret impose un transfert d’obligation : là où il incombe aux financeurs de vérifier la capacité d’un organisme à dispenser une formation de qualité, ce sont les organismes de formation qui auront l’obligation d’être certifiés.

 

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