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Réseaux de chaleur et de froid renouvelables : "un levier pour assurer l'indépendance énergétique des territoires", selon l'Ademe

L'Ademe a publié ce 18 novembre une étude dressant le bilan du développement de la filière réseaux de chaleur et de froid et explorant pour la première fois le potentiel socio-économique ainsi que les bénéfices environnementaux liés à un développement accru de la filière à l'horizon 2050. Ce travail vise notamment à éclairer le choix des collectivités qui souhaitent accélérer leur transition énergétique, alors qu'il est prévu de multiplier par trois le rythme de croissance des énergies renouvelables dans les réseaux de chaleur pour atteindre les objectifs des politiques publiques d'ici à 2030.

"Dans la perspective de l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 (…), les réseaux de chaleur et de froid constituent un levier puissant, cohérent et pérenne d’activités économiques et de réduction de la facture énergétique territoriale" avec un impact "significatif" sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), assure l'Ademe dans son étude "Développement des filières réseaux de chaleur et de froid renouvelables en France à horizon 2050 : impacts socio-économiques et environnementaux, stratégie et plan d’actions" publiée ce 18 novembre.
Les réseaux sont aujourd’hui alimentés à plus de 50% par les énergies renouvelables (EnR), et leur développement permet de déployer massivement ces énergies dans les territoires urbains, souligne l'Agence qui a réalisé ce travail en partenariat avec Amorce, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) et le Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine (SNCU) et organisé une large concertation avec les acteurs de la filière (autorités organisatrices de la distribution d'énergie, concessionnaires et exploitants de réseaux, représentants des clients des réseaux et des principales filières de production d'énergies renouvelables, aménageurs, services de l'Etat en charge de l'énergie et de l'urbanisme…).

Contribuer à améliorer l'indépendance énergétique des territoires

Pour l’Ademe, la multiplication par 3 du nombre de km de réseaux de chaleur alimentés en majorité par des EnR permettrait de décarboner l’énergie consommée pour les besoins de chaleur de 9 millions d’équivalents logements à l’horizon 2050. Ce développement permettrait notamment de "contribuer à améliorer l’indépendance énergétique des territoires en limitant l’importation d’énergie fossile et en réalisant des économies (…) dans un contexte où la crise sanitaire a soulevé la question de l’autonomie de certains secteurs", relève l'étude. En 2050, l’atteinte d’un objectif de développement ambitieux des filières réseaux de chaleur et de froid permettrait de réduire la facture énergétique de la France de 2,6 milliards d’euros grâce aux importations évitées de l’équivalent de 44 millions de barils de pétrole, avance-t-elle. 

Limiter les gaz à effet de serre sur le long terme

Autre avantage du développement des réseaux à base d'EnR, selon l'étude : "assurer la décarbonation du mix énergétique français avec un coût public d’abattement de la tonne de carbone émise dans l’atmosphère très favorable". Alimenter 9 millions d’équivalents logement par les réseaux de chaleur et de froid représenterait une réduction des émissions annuelles de gaz à effet de serre d’environ 15 millions de teqCO2/an en 2050 soit 12% des émissions actuelles du secteur du bâtiment résidentiel et tertiaire, estime-t-elle. L'Ademe voit dans le soutien au développement des réseaux de chaleur EnR "une action efficiente pour les politiques publiques dans l’objectif de limiter les émissions de gaz à effet de serre sur le long terme". En effet, aujourd’hui le coût public d’abattement de la tonne de CO2 se situe entre 27 et 46 euros/teqCO2 évitée pour les opérations de récupération de chaleur fatale, de géothermie profonde et de chaufferies biomasse reliées à un réseau de chaleur en zone dense, poursuit-elle. A titre de comparaison, ce ratio a été estimé à 59 euros/teqCO2 pour l’éolien terrestre et à 71 euros/teqCO2 pour le photovoltaïque au sol.

Entre 41.000 et 57.000 emplois pérennes dans les territoires

L'étude insiste aussi sur le rôle des réseaux de chaleur dans la création d'emplois "pérennes qualifiés et non délocalisables". "Entre 2016 et 2019, 1 euro apporté par le Fonds Chaleur de l’Ademe à un projet de réseau de chaleur a généré en moyenne 4 euros d’investissements sur les territoires, note-t-elle. Au-delà du bénéfice environnemental, le développement de la filière réseaux de chaleur et de froid constitue donc un atout pour l’économie des territoires. En effet, l’activité économique générée par cette filière pourrait représenter entre 4,2 et 5,2 milliards d’euros en 2050, soit en moyenne 4 fois plus qu’en 2017". Le nombre d'emplois créés sur les territoires grâce à ce développement pourrait tripler d’ici à 2050, poursuit-elle. Cette croissance pourrait soutenir entre 41.000 et 57.000 emplois (directs et indirects) soit 4 à 5 fois plus qu’en 2017.

Lutte contre les effets d'îlots de chaleur urbains

L'étude considère aussi que la baisse tendancielle de la demande de chaleur induite par les actions d’efficacité énergétique dans le bâtiment et par l’augmentation progressive des températures provoquée par le changement climatique représente une "opportunité" pour atteindre des taux d’EnR élevés dans les réseaux de chaleur et de froid. Cela permet selon elle de valoriser des sources d’énergie basse température comme la chaleur fatale ou la géothermie superficielle ou de développer des boucles d’eau tempérée pour répondre à des besoins simultanés de chaleur et de froid. "En zone urbaine, la problématique du rafraichissement s’accentue notamment dans le secteur tertiaire, souligne-t-elle. Grâce à leurs performances environnementales et à leur potentiel de lutte contre les effets d’îlots de chaleur urbains, les réseaux de froid représentent une solution pertinente à associer avec une démarche urbanistique plus globale (favoriser la végétation, les matériaux réfléchissants, la mobilité douce…)".

Un plan d'actions élaboré par les parties prenantes

L'étude se conclut par la présentation d'un plan d'actions pour atteindre les objectifs énergétiques fixés dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Structuré en cinq axes - améliorer la visibilité de la filière et sa gouvernance globale, de même que la gouvernance opérationnelle entre acteurs, augmenter le taux de consommation en énergie finale issue des réseaux de chaleur et de froid, optimiser les performances énergétiques et environnementales de la filière, maximiser les retombées sociales et économiques sur le territoire national -, ce plan nécessite selon l'étude d'actionner plusieurs leviers. Les principaux concernent les soutiens financiers aux projets d'EnR et la taxation des énergies fossiles, la gestion des réseaux et les montages juridiques, le cadre législatif et celui de la planification urbaine, la recherche et le développement et, enfin, la "sensibilisation", la communication et la formation.
 

 

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