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Achat public et sous-traitance : l'OECP publie une étude complète

L’observatoire économique de la commande publique (OECP) vient de publier les résultats de son étude sur la sous-traitance. Commandée par la direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy, cette étude vise à donner une vision complète du recours à la sous-traitance dans la commande publique.

Si la sous-traitance dans les marchés publics n’avait encore jamais fait l’objet d’une étude complète, c’est désormais chose faite grâce au travail de l’OECP. Ce dernier a effectivement rendu publics les résultats de son enquête sur le sujet le 9 juillet 2020. Deux objectifs ont motivé la mise en place d’une telle étude : d’une part, la volonté de mieux apprécier la part des actes de sous-traitance conclus avec des TPE/PME, et d’autre part, "d’appréhender les réalités du terrain, surtout quand elles ne correspondent pas à l’application de la réglementation, en permettant aux acteurs de faire part de leurs ressentis dans le respect de la plus stricte confidentialité". 

Grâce à un questionnaire en ligne, qui a généré plus de 1.300 réponses, et des entretiens avec des acheteurs, des entreprises et des fédérations professionnelles, l’OECP a ainsi réuni de nombreuses données statistiques et pratiques.

Données statistiques

Après avoir rappelé en détail le régime juridique applicable à la sous-traitance dans la commande publique, l’étude expose les données statistiques récoltées. La base des travaux de cette étude porte sur la période 2015-2018 et concerne 395.000 marchés initiaux pour lesquels 57.200 actes spéciaux de sous-traitance ont été recensés.

Sans surprise, les marchés de travaux sont ceux qui recourent le plus à la sous-traitance, avec une moyenne de 26,2% d’actes déclarés, contre 9,8% pour les marchés de service et 3,7% pour les marchés de fournitures.

Concernant les attributaires des actes de sous-traitance, l’étude expose que plus de 75% de ces actes ont été conclus avec des PME, preuve que la sous-traitance est un véritable levier d’accès des petites et moyennes structures à la commande publique. Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises se voient respectivement attribuer 10,6% et 13,6% des actes de sous-traitance. La répartition de la sous-traitance par typologie d’acheteurs a également été traitée dans cette étude. Les collectivités territoriales apparaissent ainsi comme la catégorie d’acheteurs qui sous-traite le plus avec des PME (80,4%), suivi de près par l’Etat (76,1%).

Cette étude a aussi permis d’en savoir davantage sur certaines pratiques, comme le moment de déclaration de la sous-traitance. À ce titre, les données récoltées sont très variables selon le type de marchés. Tous marchés confondus, 25,6% des actes de sous-traitance sont déclarés au moment de la passation. Toutefois, ces actes de sous-traitance sont déclarés au moment de la passation dans 79,9% des cas pour les marchés de fournitures, contre 18,2% pour les marchés de travaux et 40% pour les marchés de services. La tendance s’inverse totalement pour les actes de sous-traitance déclarés au moment de l’exécution du marché : 74,4% des marchés tous secteur confondus et 81,8% des marchés de travaux.

Concernant l’impact des groupements momentanés d’entreprises (GME) sur la sous-traitance, l’étude démontre, assez étrangement compte tenu du niveau de spécialisation censé être atteint par la formation de GME, un taux de recours à la sous-traitance quasiment identique (environ 14%), que le marché soit attribué à un titulaire unique ou un GME.

Enfin, l’étude s’est attachée à étudier l’impact de la taille et de la durée du marché sur le recours à la sous-traitance. Concernant la taille, la tendance est que plus le montant du marché est important, plus le recours à la sous-traitance est fréquent. Ainsi, le taux de sous-traitance pour les marchés de moins de 25.000 euros est de 0%, contre 12% pour les marchés compris entre 90.000 et 500.000 euros et 28,5% pour les marchés entre 2 et 10 millions d’euros.

Concernant la durée du marché, l’étude démontre que les marchés les plus courts et ceux les plus longs ont moins recours à la sous-traitance : près de 10% d’actes spéciaux dans les marchés de moins de six mois et dans ceux de plus de deux ans. Les marchés compris entre six mois et deux ans totalisent quant à eux plus de 16%.

Données qualitatives

La deuxième partie de cette étude se concentre sur la perception de la sous-traitance par les acteurs de la commande publique. Les acheteurs, les fédérations professionnelles et les entreprises ont ainsi donné leur ressenti, plutôt positif, sur la loi de 1975 sur la sous-traitance, désormais codifiée dans le code de la commande publique. Les fédérations professionnelles ont toutefois relevé certaines problématiques, relatives notamment à la distinction entre sous-traitance, cotraitance et "location de chose avec intervention d’opérateur". Des soucis relatifs aux délais de paiement et plus globalement à la trésorerie des entreprises ont également été soulevés.

La question de l’adéquation du régime juridique de la sous-traitance avec les tendances actuelles (concurrence européenne accrue, massification des achats, augmentation du recours aux contrats globaux, etc.) a aussi été traitée.

D’un point de vue général, 53% des acheteurs, 31% des sous-traitants et 45% des entreprises titulaires estiment que la réglementation de la sous-traitance est aujourd’hui "suffisamment protectrice ou adaptée".

Les participants à l’étude ont également été interrogés sur leur perception de l’équilibre des relations entre les parties. Si 22,4% des acheteurs estiment que les relations sont équilibrées, 41,8% des sous-traitants considèrent qu’elles sont déséquilibrées, voire très déséquilibrées (22,4%).

Préconisations

Pour conclure cette étude, l’OECP a formulé plusieurs recommandations visant à une meilleure utilisation de la sous-traitance. Les participants à cette étude ont notamment demandé un meilleur encadrement de la sous-traitance, notamment sur la lutte contre la sous-traitance non déclarée (27%) ainsi que sur la rémunération (21%) et le contrôle des compétences du sous-traitant (18,6%).

Concernant les préconisations destinées aux acheteurs, l’OECP recommande notamment un recours plus fréquent au contrat de sous-traitance, la mise en place de "pénalités conséquentes en cas de sous-traitance non déclarée" ou encore la simplification des délégations de paiements pour les sous-traitants indirects. Une meilleure pondération des critères (prix/qualité) et la promotion des GME, et donc de la cotraitance, font également partie des recommandations de l’OECP. 

Cette étude, inédite et approfondie, apporte donc de nombreuses pistes de réflexion pour améliorer le recours à la sous-traitance.

 

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