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Valorisation des terres de chantier : un projet de décret aménage les procédures de sortie du statut de déchet

Pour que des volumes de terres évacuées du site de leur excavation soient valorisés et utilisés dans des projets d'aménagement d'envergure comme, par exemple, sur les chantiers du Grand Paris, des Jeux olympiques ou encore du canal Seine-Nord, encore faut-il que la réglementation évolue. Preuve qu'elle continue de faire l'objet d'incessantes retouches, un projet de décret vise à modifier les procédures de sortie du statut de déchet. Sa mise en consultation est partielle et se plie à un rythme accéléré (jusqu’au 6 septembre). Explications.

Introduite dans le droit communautaire par une directive-cadre en 2008 (modifiée en 2018) et progressivement opérée par voie de règlements selon le type de déchets concernés, la sortie du statut de déchet ne passionne guère les foules. Elle représente pourtant un enjeu majeur, notamment en vue de faciliter la valorisation de certains matériaux comme les terres évacuées sur les chantiers de BTP. Un projet de décret modifiant le code de l’environnement et pris en application de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, parue en février dernier, précise comment cette sortie de statut doit être réalisée et quelles sont les règles de l'art en la matière. Ce texte intéresse les collectivités en tant que maîtres d’ouvrage et aménageurs, dès lors soumis à la législation sur les déchets. D’autant que d’importants volumes de ces terres sont ou vont être utilisés dans des projets d'aménagement d'envergure et que l’enjeu prend également de l’importance au vu du regain d’intérêt pour la réhabilitation de friches et le recyclage de foncier déjà artificialisé (voir notre article du 6 juillet dernier).

Mieux trier dans les ERP

Une réflexion s'est engagée l'an dernier pour faire évoluer la réglementation et que les terres excavées, "qu’elles soient polluées ou non", ne soient plus considérées spécifiquement comme un déchet. Un projet d'arrêté fit l'objet d'une consultation publique. Il suscita des réactions pour le moins contrastées. Les volets de ce nouveau texte qui sont consacrés à ce même sujet ont donc déjà fait l’objet d'une consultation l’an dernier. En clair, aujourd'hui le ministère de la Transition écologique met seulement en consultation ses articles 4 et 5. D’où, certainement, le délai très court pour y répondre (jusqu’au 6 septembre) et le peu de commentaires pour l'heure suscités. Ces deux articles portent en effet sur des sujets plus mineurs. Le premier impose le tri des déchets dans les établissements qui reçoivent du public (ERP) et relèvent des catégories 1 à 3, soit de 301 personnes à plus de 1.500 personnes. Au regard de cette obligation, le second (art. 5) actualise des dispositions déjà en vigueur sur le tri et la collecte séparée de certains types de déchets non dangereux comme le papier, le métal, le plastique, le verre, le bois ou encore le plâtre. Sans oublier de corriger un oubli en ajoutant à cette liste, du moins à moyen terme (à compter de janvier 2025), les déchets d'origine textile.

Passage obligé par une plateforme

Mais revenons sur la portée des articles du texte qui sont donc hors consultation. L’an dernier, un sujet de crispation fut pointé au travers d'une question au gouvernement par le sénateur centriste de la Moselle, Jean-Marie Mizzon : "Dans le droit actuel, le réemploi ou la valorisation de ces terres pour des opérations d'aménagement ou de construction est obligatoirement soumis à une procédure de sortie du régime juridique du statut de déchet via un traitement par une installation autorisée : installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) ou installation, ouvrages, travaux et activités (IOTA). Or, pour l'administration, continuer à qualifier de déchet les terres excavées rend difficile leur valorisation.
Pour régler cet épineux problème, l'administration propose de faire perdre ab initio le statut de déchet aux terres excavées (sans passage donc par une installation classée) destinées à une utilisation en génie civil ou en aménagement à condition de respecter certains critères environnementaux". Ce maintien du principe de l’obligation de traitement sur une plateforme relevant de la réglementation des ICPE, correspondant à la nature de l’opération à réaliser pour demander à sortir du statut de déchet, fut aussi demandé par la Fédération des entreprises du recyclage (Federec). L’article 1er du présent projet de décret ne remet pas en cause ce maintien mais ouvre la possibilité de faire de la sortie de statut de déchet dans des installations non classées ICPE ou IOTA. 

Déclarer dans un nouveau registre national

La qualité des matières sorties du statut de déchet et l’atteinte de critères jugés trop stricts par certains avaient également fait débat lors de la précédente consultation. Ce décret revient sur le sujet en précisant les modalités de contrôle, de respect des critères, tout en renvoyant à un arrêté ultérieur le soin de fixer les détails sur les fréquences, le déclenchement de ces contrôles ou encore leur objet précis (art. 1).
Le texte renforce par ailleurs les conditions de traçabilité par la création, à compter d’un an suite à sa publication, d’un registre national des terres excavées et sédiments. Cette base de données permettra "d’enregistrer les données transmises par les personnes produisant ou traitant des terres excavées et sédiments, y compris les personnes effectuant une opération de valorisation de terres excavées et sédiments et les personnes exploitant une installation de transit ou de regroupement de terres excavées et sédiments" (art. 2). Ce registre électronique, centralisé et conservé pendant au moins trois ans permettra d’identifier précisément la destination ou le lieu de valorisation des terres excavées et sédiments.

 

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