"Vigilance crues" : le corpus réglementaire se met à jour

Un décret et un arrêté, parus ce 20 avril, opèrent un sérieux toilettage du dispositif de surveillance des cours d’eau et de vigilance sur les crues. Un corpus ancien, inchangé depuis 2007, et plus vraiment en adéquation avec les problématiques auxquelles sont confrontés les services en matière de prévision des crues.

Un décret (accompagné de deux arrêtés), paru ce 20 avril, adapte et complète les dispositions réglementaires relatives à la prévision des crues. L’organisation des missions de surveillance, de prévision et de transmission de l'information sur les crues, assurée par l'État, est définie (depuis 2003) aux articles L.564-1 à L.564-3 du code de l'environnement. Sa traduction au niveau réglementaire remonte à 2007 (décret n° 2007-1467) et n’a depuis fait l’objet d’aucune modification, relève le ministère de la Transition écologique dans la notice du texte. Or, cette "ancienneté" ne permet plus, selon lui, "d’appréhender toutes les problématiques auxquelles sont confrontés aujourd'hui les services en matière de prévision des crues". Le chapitre IV du titre VI du livre V du code de l'environnement est remplacé, au terme du décret, par les articles R.564-1 à R.564-9. Le ministère en tire également les conséquences en abrogeant l’arrêté du 15 février 2005 relatif aux schémas directeurs de prévision des crues et aux règlements de surveillance et de prévision des crues et à la transmission de l'information correspondante. Un nouvel arrêté, publié concomitamment, le remplace pour revoir complètement le contenu de ces documents. 

Début janvier, une note technique relative à la production opérationnelle de la vigilance crues était déjà revenue en détail sur le rôle des services de prévision des crues (SPC) et du service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations (Schapi) de la direction générale de la prévention des risques (DGPR) dans la chaîne de production de l'information de vigilance crues.

Organisation opérationnelle de la vigilance "crues"

Le Schapi, rattaché au ministère, qui édite le site d’avertissement "Vigicrues", s’appuie en métropole sur les services de prévision des crues (SPC) et outre-mer sur les cellules de veille hydrologique (CVH). Le décret intègre tout d'abord expressément (R.564-1) le rôle de ces dernières dans le dispositif. Les CVH des territoires où une vigilance crues est produite doivent à terme fonctionner de la même manière qu’un SPC. Le texte a pour principal mérite de mettre les points sur les i concernant l'organisation opérationnelle des SPC/CVH et du Schapi. L’objectif étant in fine d’assurer notamment, "la transmission aux préfets, maires et services concernés des informations de prévision et de suivi des crues leur permettant de répondre aux situations de crise ainsi que l'information des populations au moyen de bulletins d'information sur le niveau de danger des crues et de conseils de comportement" (R.564-2). Les SPC - via la veille sur la situation hydrométéorologique de leur territoire - "préparent les éléments nécessaires" à la mise en œuvre du dispositif national de vigilance en matière de crues, dont la "responsabilité opérationnelle" est confiée au Schapi (R.564-3). 

Des schémas directeurs de prévision des crues…

Quelques modifications sont par ailleurs à relever concernant le schéma directeur de prévision des crues (SDPC), qui détermine le périmètre de surveillance des crues et fournit aux SPC la marche à suivre. Le décret en précise la procédure d’élaboration aux mains du préfet coordonnateur de bassin et renvoie dorénavant pour ce qui est de la définition de son contenu à l’arrêté.

Le Schapi est consulté pour "avis conforme", ajoute le texte (R.564-5), après la consultation des personnes publiques, dont la liste est fournie, à savoir les associations départementales des maires intéressés, préfets de département et préfets de zone de défense et de sécurité concernés ainsi que l'autorité exécutive de chacune des collectivités territoriales ou groupements ayant mis en place leurs propres dispositifs de surveillance des crues.

L’avis simple du comité de bassin est également recueilli. À l'exception de celui du Schapi, les avis des autres autorités et organismes consultés "sont réputés favorables s'ils n'interviennent pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission du projet de schéma". L’arrêté du préfet coordonnateur de bassin approuvant le schéma "est publié au Bulletin officiel du ministère chargé de la prévention des risques majeurs" (et non plus au Journal officiel).

La révision d’ensemble du schéma (suivant les mêmes formes que son élaboration) "intervient, au plus tard, dans un délai de six ans à compter de la publication du premier schéma ou de sa dernière révision" (contre dix ans auparavant). Pour permettre l'amélioration continue du dispositif, le texte introduit en outre la faculté de modifier ce schéma "en cours d'application lorsque les changements envisagés n'ont pas pour effet de porter atteinte à son économie générale". Ces modifications sont alors approuvées par arrêté, après avis du Schapi. 

… complétés par des règlements de surveillance, de prévision et transmission

Le déploiement de la vigilance "crues" est en outre organisé pour chaque sous-bassin par un règlement de surveillance, de prévision et transmission de l'information sur les crues (RIC), qui met en œuvre le SDPC concerné. Ce document est élaboré conformément aux articles R.564-7 à R.564-9 (introduits par le décret). et son contenu est là encore détaillé dans le nouvel arrêté.

La procédure conduite par le préfet sous l'autorité duquel est placé le SPC ou la CVH concerné est identique à celle organisée pour l’approbation des SDPC. Le Schapi se prononce pour avis conforme (ainsi que pour toute évolution conduisant à une nouvelle approbation), après consultation des personnes publiques. L’avis du comité de bassin n’est toutefois pas requis ici. La révision d’ensemble du règlement intervient  "au plus tard, dans un délai de six ans à compter de la publication du premier règlement ou de sa dernière révision" (contre cinq ans auparavant). En cas de besoin, le règlement peut être modifié en cours d’application, sous réserve de ne pas porter atteinte à son économie générale. 

Complémentarité avec les dispositifs développés par les collectivités

L’État n’a pas l’exclusivité dans le domaine de la vigilance "crues". Les collectivités peuvent mettre en place pour leurs besoins propres des dispositifs de surveillance complémentaires de ceux mis en place par l’État. En sus des tronçons de cours d’eau surveillés par l’État, le SDPC et le RIC font donc entre autres référence aux gestionnaires des ouvrages hydrauliques susceptibles d'avoir un impact sur les crues.

Face à la montée en puissance des collectivités "gémapiennes" sur la production de données sur les secteurs non surveillés, on perçoit en filigrane les besoins d’accompagnement. Des échanges sont en particulier indispensables notamment avec les acteurs chargés de la gestion de crise. Le règlement intègre ainsi dans la boucle, au terme de l’arrêté, "les autorités détentrices d'un pouvoir de police" et "les structures dont l'importance des équipements et leur vulnérabilité justifient que soit transmise à leurs responsables l'information sur les crues". Il précise notamment "les conditions de cohérence" entre ces dispositifs complémentaires de surveillance développés par les collectivités ou leurs groupements et ceux mis en place par l'État et ses établissements publics.

Ce règlement comprend également "la description des informations échangées gratuitement entre l'État, ses établissements publics, les exploitants d'ouvrages hydrauliques et les collectivités territoriales et leurs groupements qui concourent à la complémentarité des dispositifs". Les niveaux de service associés à la vigilance sont eux aussi définis dans les RIC. 

 
Références : décret n° 2023-284 du 18 avril 2023 relatif aux missions de surveillance des cours d'eau, de prévision des crues et de production de la vigilance sur les crues ; arrêté du 18 avril 2023 abrogeant l'arrêté du 15 février 2005 relatif aux schémas directeurs de prévision des crues et aux règlements de surveillance et de prévision des crues et à la transmission de l'information correspondante ; arrêté du 18 avril 2023 relatif aux schémas directeurs de prévision des crues et aux règlements de surveillance et de prévision des crues et à la transmission de l'information correspondante, JO du 20 avril 2023, textes n° 25, 27 et 28.